Après deux décennies à languir sous le soleil hostile de la modernité, la saga du dragon a pu renaître de ses cendres en suivant la mouvance de ces dernières années, celles des remastered et des suites inespérées (Shenmue III ou Final Fantasy VII…). Panzer Dragoon Remake est donc le remake que personne n’attendait, celui d’un jeu cultissime signé Sega.
Comme l’original, on retrouve une trame minimaliste, celle d’un rail shooter à dos de dragon qui a le parfum du voyage : une Venise en ruine, prête à s’écrouler lorsqu’on la survole, un désert fourmillant de bestioles grouillantes (gigantesques vers des sables qu’on croirait sortir de Dune de Frank Herbert), un canyon mystérieux et industriel dans lequel se nichent des tunnels inquiétants… On pourchasse un dragon noir qui a pour ligne de mire une sombre tour, synonyme de destruction si jamais ce dernier l’atteint.
Panzer Dragoon Remake ne s’aventure pas à modifier cet itinéraire, à l’amplifier et ne se perd pas non plus en chemins alternatifs, une prise de risque inutile quand on connait l’exigence des fans. Le jeu reste par exemple très court. Comptez 1 à 2 h pour le finir. Mais n’en doutez pas, il se rejoue à l’infini une fois que l’on accepte l’hypnose et les fulgurances d’une aventure millimétrée, chorégraphiée à merveille, à la manière des meilleurs shoots.
Le jeu s’adresse avant tout aux fans, ceux qui ont connu l’épisode Saturn. Lesquels avaient à l’époque les yeux écarquillés et passaient de plein pied dans l’ère 32-bit. En 1994, la Saturn n’en était qu’à ses débuts et donnait déjà tout, avec ce jeu, pour subjuguer le joueur : 3D inédite, univers inspiré par l’œuvre de Jean Giraud alias Mœbius, un génie de la BD, une cinématique d’intro d’une intensité rarement vécue et une bande son orchestrale impressionnante.
Sur Switch, exit cette 3D toute en suggestion, paraissant un peu vide aujourd’hui et qui se concentrait sur l’effet « wahou » des volumes en 3 dimensions, lesquels s’entrechoquaient, ou se rapprochaient de nous en gros plan. Le dragon est désormais vu de loin, histoire de le noyer dans des décors souvent magnifiques, travaillés à l’extrême. C’est flagrant dans le premier niveau, le fameux « episode 1 » et sa cité en ruine. Le contraire est vrai aussi, le quatrième niveau, et sa série de coursives à grande vitesse, aurait mérité un tout autre impact graphique, et s’avère même un peu terne en comparaison de ce passage qui a marqué les joueurs au milieu des années 90.
À se perdre dans les décors, on se perd aussi avec les commandes. Dès le premier contact, le viseur (divisé en trois carrés se superposant du plus petit au plus grand), se balade à grande vitesse sur l’écran. Si vous ne connaissez pas le jeu original, nul doute que cela ne vous dérangera pas (trop). Mais pour le connaisseur, difficile de trouver ses marques. Le passage dans les options parait obligatoire pour retrouver les sensations d’époque. Cibler oui, locker, oui mais avec aisance et fluidité. On finit in fine par s’habituer. Le dernier patch a par ailleurs rendu ces commandes moins heurtées (le viseur en particulier se contrôle mieux), mais on est loin de la perfection du gameplay de l’épisode Saturn.
Pour évoquer les contrôles modernes, il nous est permis d’utiliser les deux sticks pour diriger à notre guise le dragon et le viseur, mais ils ont perturbé (pour ne pas dire autre chose) votre humble serviteur, trop habitué aux commandes d’antan. À vous de voir si vous n’êtes pas frileux à ce type de commande.
L’autre défaut qui peut finir par agacer est le vol du dragon. Sur Saturn, le dragon battait élégamment des ailes mais restait stable à l’image. Sur Switch, le dragon fait littéralement des bonds de haut en bas dès qu’il bat des ailes, ce qui rend certains passages illisibles et certaines esquives impossibles. Cet aspect irrite, tout comme ces gâchettes pour changer de vue. Oui, le jeu reprend l’idée géniale de l’original, celle de couvrir l’action à 360°. On peut toujours en abuser, et il le faudra car l’ennemi nous attaque de tous les côtés. Mais il faudra prévoir le coup à l’avance car le mouvement de la caméra s’opère une fois qu’on relâche la pression du bouton. Dans un jeu où chaque centième de seconde compte (rappelez-vous l’épisode 5 et son armada qui vous assaille en traître), on peut rager contre cette latence.
Autre point de déception, le contenu est un peu chiche pour qui aurait rêvé d’un musée virtuel pour profiter des artworks d’hier et d’aujourd’hui (il faudra finir le jeu pour en découvrir quelques-uns) et même d’un sound test. Peut-être que les programmeurs se sont dit que le jeu se suffisait à lui-même. Une énigme quand on sait que le lore de la saga du dragon se prêtait parfaitement à ce type de bonus.
C’est la musique qui fait le lien le plus sublime entre hier et aujourd’hui. Les nostalgiques retrouveront la bande son originale, puissante et orchestrale, qui a su marquer les joueurs de l’époque. Les plus aventureux se risqueront à jouer ce remake avec les musiques inédites (disponibles désormais avec le patch). Ces nouvelles musiques sont signées Saori Kobayashi qui avait déjà officié sur les épisodes Panzer Dragoon Saga et Orta, deux épisodes reconnus pour la puissance de leurs compositions. Sans dénaturer l’esprit originel, la musicienne a su apporter sa touche, faite de chœurs et de sons ambiants tissés à même les thèmes originaux.
Conclusion
Retour inattendu de la saga du dragon, Panzer Dragoon Remake affiche formellement un profond respect pour l'œuvre originale, quitte à jouer les timides et à oublier un brin d'audace pour se démarquer... Sur le fond, les commandes paraissent bien plus heurtées qu'avant et il faudra s'y habituer ou renoncer, le bleu à l’âme, au gameplay d'antan. Malgré ces défauts, l'aventure mérite d'être découverte et redécouverte, en espérant de nouveaux patchs améliorant la jouabilité. Elle comblera sans aucun doute une majorité de fans tout en permettant à ceux qui n'ont pas connu la Saturn de s'y essayer.
LES PLUS
- + Voler à dos de dragon
- + L'univers respecté
- + Les nouvelles musiques
LES MOINS
- - Les commandes perfectibles
- - Peu de contenu additionnel
- - Inégal graphiquement
Ca me fait grave envie de me le faire.
Je n’y avais pas touché a l’epoque