Replongeons nous dans nos cours de biologie de lycée : avez vous quelques souvenirs des petits pois de Mendel, des allèles dominants ou récessifs ou encore de l’homozygotie et de l’hétérozygotie ? Si tout ceci est un vulgaire charabia, il semblerait que la génétique ne soit qu’un vague souvenir pour vous… si en revanche, vous êtes incollables sur les croisements génétiques et leurs conséquences, le jeu dont nous allons discuter ensemble aujourd’hui pourrait bien vous séduire. Et si nous nous amusions aux apprentis généticiens, sur une terre peuplée d’animaux non dénués de charme ?
Développé et édité par Stray Fawn Studio, Niche – Un jeu de survie générique – est un soft complètement décalé et regorgeant de contenus pour toutes celles et ceux qui s’intéressent à la génétique (niveau débutant tout de même).
Quand Adam rencontre Ève
Échoué sur une île déserte, votre aventure débute sur un petit îlot perdu au beau milieu de l’océan, loin de votre chez vous rassurant et débordant (probablement) de congénères. Votre première mission consiste à trouver de la nourriture afin d’espérer survivre dans cet espace inconnu mais visiblement bien peu hostile. Pour y parvenir, il vous suffit de vous avancer jusqu’à l’arbre fruitier le plus proche afin d’en extraire quelques baies. Ces dernières seront salvatrices et tout bonnement indispensables (au moins dans un premier temps) afin de rester en vie. Chacun de vos déplacements devra être réfléchi, votre énergie est précieuse et il ne faudrait pas l’épuiser dans des pérégrinations inutiles. Rapidement, cet îlot sera trop petit et vous souhaiterez prendre la poudre d’escampette pour vagabonder ailleurs… dans l’espoir d’y trouver notamment une femelle pour y fonder une famille.
La nouvelle île sera en effet plus clémente de ce point de vue : une femelle à l’horizon accepte sans mal vos avances et quelques jours plus tard, tandis que vous aurez pris soin de bâtir un nid douillet pur y accueillir votre progéniture, un « petit vous » viendra au monde, véritable union entre vos deux êtres. Chérissez le comme il vous plaira… si ses compétences génétiques vous semblent satisfaisantes (fichtre que la nature est cruelle !). Chaque animal dispose en effet d’un rang, similaire à une classe sociale archaïque, avec toutes ses capacités associées : ainsi les mieux placés sur la pyramide des classes pourront s’alimenter même si la nourriture devient rare, tandis que les rangs oméga pourraient bien se voir exilés si les alpha le décident (fichtre que la nature est cruelle !).
Le tutoriel prend fin ici, libre à vous de poursuive l’aventure comme bon vous semble : « adapte toi ou éteins toi ! ».
Quand les gènes s’en mêlent (et s’emmêlent…)
Vous l’aurez compris : votre mission est celle de la vie. Survivre dans le monde qui vous est offert à la naissance, collecter de la nourriture, rester vaillant malgré les difficultés qui vont se dresser contre vous, et détenir une descendance digne de survivre à son tour. Deux modes de jeu sont disponibles afin de vous offrir le meilleur scénario : le mode aventure (recommandé pour les novices), mais aussi le mode bac à sable avec de multiples paramètres pour jouer à Dieu dans toutes les situations possibles y compris les plus complexes.
La force du soft se niche (!) inéluctablement dans sa part belle donnée à la génétique de vos animaux. Chaque individu dispose de son patrimoine propre, avec ses points forts et ses points faibles, ses compétences et toutes ses petites particularités. L’ensemble est inscrit dans une jolie reconstitution chromosomique, avec chaque gène identifié sur un locus (localisation) et ses allèles associés. En d’autres termes, chaque animal du jeu porte une partie du patrimoine de sa mère, ainsi qu’une partie du patrimoine génétique de son père. L’expression génétique sera alors liée à la dominance d’un allèle sur un autre, ou bien l’expression des deux ensemble.
Quelques exemples simples.
Les yeux d’une de nos femelles de l’île sont marron. Cette dernière porte pourtant les yeux verts dans son patrimoine génétique. Elle dispose donc de deux allèles pour la couleur des yeux : l’allèle marron (ici dominant), et l’allèle vert (récessif). Elle pourra transmettre soit l’un soit l’autre… peut être parviendrez vous à obtenir un jeune avec les yeux verts si ses deux allèles sont verts ?
Certains allèles peuvent aussi fonctionner ensemble, notamment ceux concernant la fourrure de l’animal. Parviendrez vous à obtenir des couleurs multiples au sein de votre communauté ?
Chaque critère est ainsi déterminé (les yeux et la fourrure donc, mais aussi les oreilles, les cornes, les crocs…) pour chaque animal. Aussi, pour complexifier l’ensemble, les mutations sont aussi de la partie… vous vous souvenez, ces petits bouleversements génétiques qui arrivent sans crier gare ? Vous pouvez les influencer ici en sélectionnant le gène à faire muter… bien en entendu, cela ne fonctionnera pas à tous les coups, mais vous pourrez tout de même tenter d’influencer le devenir de votre tribu, préférez vous que vos animaux soient de valeureux combattants ou bien de paisibles créatures mais dotées d’une grande résistance ?
En connaissant tous ces critères, vos animaux disposeront alors de compétences plus ou moins talentueuses. Une queue adaptée permettra de se déplacer avec aisance dans l’eau, tandis que la force permettra de causer davantage de dégâts aux quelques habitants de l’île pour en extraire de la viande. Se nourrir est un point clef, ne l’oubliez jamais !
L’univers de la création
Votre aventure se dispatche sur plusieurs îles plus ou moins spacieuses, elles mêmes découpées en multiples hexagones, tel un tableau de petites cases à parcourir. Selon vos compétences, vous ne pourrez parcourir qu’un certain nombre de cases par jour, votre énergie est malheureusement rapidement à plat.
La vie de vos animaux se découpe en plusieurs journées au cours desquelles il vous faudra mener à bien vos missions de survies (se nourrir, explorer, combattre, se reproduire, etc). Au cours de chaque jour, il vous faudra sélectionner chacun de vos animaux pour les guider un à un aux tâches que vous souhaitez les voir exécuter. La journée peut ensuite se terminer paisiblement en maintenant appuyée la touche X.
La vie côtoie par définition la mort. Vos premiers animaux perdront la vie au bout de quelques jours et laisseront la place aux descendants. Ces derniers devront alors faire perdurer la tribu, rencontrer d’autres individus pour éviter la consanguinité, et découvrir de nouveaux territoires.
Cet univers où la vie s’éveille… n’en est pas moins dépourvu de quelques défauts pour le dieu protecteur que vous êtes. En effet, le déplacement sur ces cartes n’est pas toujours des plus agréable, agencées par ces multiples hexagones. Il est fort probable que le jeu soit plus agréable sur ordinateur avec l’usage d’une souris. Aussi, vous aurez sans doute l’impression de répéter les mêmes tâches, la gestion de la nourriture devrait notamment vous prendre pas mal de temps au début afin de ne pas en manquer (ça mange bien ces petites bêtes !). Méfiance à ne pas trop vite vous développer… il faut parvenir à gérer tout le monde !
Cet univers où la vie s’éveille… présente des animaux ressemblant à de grosses souris aux dents de sabres. Rapidement, vous découvrirez des espèces bien différentes et tenterez assurément de les coupler avec vos femelles afin d’en extraire le patrimoine génétique aussi fort que majestueux. Les textures du jeu sont malgré tout un peu grossières, avec une végétation un peu brouillonne.
Cet univers où la vie s’éveille… reste, malgré ces quelques défauts, un bien joli programme pour faire de la génétique tout en s’amusant… un concept bien incongru dans l’univers du jeu vidéo, une idée originale qui mérite d’être soulignée !
Niche – un jeu de survie génétique – est disponible sur l’eShop de la Nintendo Switch au prix de 18 euros environ (actuellement en promotion à 16,19 euros jusqu’au 3 septembre 2020).
Le saviez vous ?
Il est coutume qu’un chercheur à l’origine de la découverte d’un gène lui donne son nom. Mais parfois, les généticiens font preuve d’une brin de folie et donnent des noms originaux à leurs trouvailles, comme par exemple :
- le gène Peter Pan qui est déterminant dans la croissance des drosophiles (de petites mouches très étudiées en laboratoires). Si ce gène est défectueux, les larves de drosophiles ne grandissent pas… tout comme Peter Pan.
- L’absence d’expression du gène Sonic Hedgehog, quant à lui, cause la pousse de multiples petites pointes sur le corps des drosophiles… cela n’est pas sans rappeler le célèbre hérisson bleu !
Conclusion
Malgré quelques défauts notables, notamment la répétition des tâches et une jouabilité à la manette discutable, Niche est un jeu totalement hors du commun qui parvient à plonger les joueurs dans l’univers de la génétique avec beaucoup de travail de vulgarisation afin de le rendre accessible et divertissant. Les combinaisons possibles afin d’obtenir de nouveaux animaux sont multiples et les différents modes de jeu permettent à tout le monde de se tenter aux joies de la génétique. De futures vocations pourraient t-elles naître ? Ou tout simplement une belle façon de réviser sa génétique avec la rentrée...
LES PLUS
- Une très belle idée, futée et originale !
- Un jeu malin mettant en scène la génétique de façon ludique et accessible, attractif pour les adultes, ludique pour les adolescents souhaitant travailler la génétique tout en s’amusant
- Bon contenu avec un tarif correct
- Jeu en français
LES MOINS
- Jouabilité discutable. Ces petites cases nous ont passablement agacées avec la manette
- Répétitif
- Textures simplistes