La boucle est bouclée. Jeu à l’origine destiné aux smartphones, Worm Jazz rappellera un titre qui a fait la gloire des premiers téléphones portables : le fameux, l’inénarrable, l’indéboulonnable Snake. Vous connaissez forcément, ce serpent qui grandit à mesure qu’il avale des bouboules. Ici, il s’agit d’un lombric tout rose et tout visqueux qui s’allonge démesurément. Et ce pauvre s’est retrouvé piégé dans une suite de labyrinthes fous, obligé d’aller sans cesse vers l’avant (pas de marche arrière) et en gobant tout sur son passage… Même des bombes !
Alors, ce concept mixant Snake/labyrinthe/bombes, c’est nouveau ? Le mélange Snake/labyrinthe est déjà celui d’un classique de l’arcade eighties, made in SNK, j’ai nommé Nibbler. Tout comme le principe bombes/labyrinthes, faisant immédiatement penser à Bomberman. Non, Worm Jazz ne réinvente rien, et n’a surtout pas l’ambition de révolutionner le jeu-vidéo. Le développeur (unique) renoue avec un type de jeu, proche dans l’esprit du jeu de détente, faisant appel à 100% à nos neurones et à 0% à nos réflexes (rouillés à force d’outrance et de Fortnite).
Il n’y a par exemple pas de game over à proprement parler. Il n’y a aucun ennemi et il est possible d’annuler autant de fois que l’on veut les actions jouées, de rembobiner la partie à sa guise si on estime avoir fait fausse route. Côté pouvoirs, à gagner au fil de notre progression, notre vers (solitaire) avalera bombe sur bombe, traversera des portails magiques ou fera rouler des rochers dans des labyrinthes de plus en plus emberlificotés.
Dommage toutefois que le titre manque d’un soupçon de folie (même si en effet associer un lombric au jazz n’est pas commun !). C’est propre et c’est bien fait, et quelque part l’essentiel est là, mais les environnements au nombre de 3 sont plus que sobres. Voyez plutôt : un terrain boueux sous la pluie, un lac glacé et un désert… Désertique. Et les musiques, des petits airs jazzy bien sympas (au nombre de 3), ont le malheur de tourner en boucle. Aucune histoire, des collectibles dignes d’un gag (une poignée de chapeaux à collectionner pour déguiser notre worm). La petite musique de la lassitude, arrivant au hasard d’une partie (et d’ailleurs sur n’importe quel jeu même sur un Zelda, c’est possible), vient d’avantage de ce manque de variété que du challenge en lui-même, éminemment bon. Un paradoxe ludique sur lequel il est bon de méditer.
La soixantaine de niveaux opposent en effet une bien belle résistance, surtout si on tente d’obtenir à chaque fois les 3 étoiles. Il faut pour ça gober toutes les boulettes du niveaux. Le développeur s’est visiblement fait plaisir avec ces casses-têtes, en multipliant les possibilités et les fausses pistes. Un plaisir presque sadique d’ailleurs (« la sortie te tend les bras, elle est là, mais non, c’est pas ça qu’il faut faire…») Le level design est d’ailleurs remarquable de complexité, car si les mécanismes de base sont toujours les mêmes, chaque niveau a sa petite subtilité, sa propre difficulté, son petit truc à lui. C’est d’autant plus remarquable que le genre du jeu de labyrinthe est vieux comme le monde.
Si faire un perfect restera un petit exploit (le jeu a du mordant, ça ne fait aucun doute), le niveau de difficulté reste déterminé par le joueur lui même, et à son entêtement à vouloir avaler l’entièreté des pastilles. C’est quelque part ce qui fait l’excellence de ce Worm Jazz. Le joueur gère sa partie comme il entend. Libre à nous de chercher la sortie en priorité, si on veut juste jouer pour le fun ou pour avancer dans le jeu (pour découvrir tous les niveaux par exemple). Ou si l’on se sent bloqué sur un niveau, de le terminer sans stress (et sans les 3 étoiles) pour passer à un autre et le reprendre plus tard, au calme, le cerveau reposé. Car oui, votre cerveau va fortement « swingué » si vous vous lancez dans une partie de Worm Jazz.
Conclusion
Dénouer des nœuds à la force de nos anneaux, le tout sur de la contrebasse/piano/speculos/whisky/bar, telle est la joie simple proposée par ce Worm Jazz. Avec cette suite de labyrinthes/puzzles en mode Snake, le jeu ne défraiera pas la chronique et ne défrisera peut-être pas les moustaches du joueur avide de sensations fortes. Mais au moins, ce qu'il fait, il le fait bien. Il le fait même parfaitement bien. Un bon petit jeu.
LES PLUS
- Votre cerveau va fumer, c'est sûr...
- Le jazz en fond sonore, ça change et ça détend
- Niveau de difficulté « adaptatif »
- Possibilité de « rembobiner » le jeu
- Tout plein de niveaux, partout
LES MOINS
- Trois boucles musicales
- Peu de variété pour les décors
- Tristounet graphiquement