Pourtant arrivé en février 2017 sur Steam, ce n’est que trois ans plus tard que Réflection of Mine est porté sur Nintendo Switch. Il s’agit d’un très bon puzzle hardcore qui a pour thème les troubles dissociatifs de l’identité, sur fond d’horreur et de fiction. Même si nous n’en sommes pas revenus complètement indemnes, nous avons réussi à vous livrer nos impressions, ci-dessous.
Dès les premières secondes, nous sommes dans l’ambiance sombre de Reflection of Mine (RoM). Comme l’avait magnifiquement déjà fait Marylin Manson, une reprise de Sweat Dreams, par Expect Amour, à travers le morceau Southside, nous accueille sur les premiers menus. Avant de commencer, deux choix de difficulté s’offrent à vous parmi les trois proposées. Phobie, est le mode facile permettant d’utiliser des indices, checkpoints et de détruire certains obstacles mais pas de finir le jeu à 100%. Hystérie, équivalent d’un mode normal, garde les indices, checkpoints et permet de pouvoir terminer les niveaux avec n’importe quel nombre de pas. Enfin, dans le mode Névrose, qu’il n’est possible de débloquer qu’après avoir fini le jeu une première fois, nous sommes dans l’inverse du mode Hystérie, nous n’avons plus aucune aide. Une fois le niveau de difficulté choisi, nous partons à l’aventure.
Les Secrets de Lilly
Nous sommes manifestement dans une salle d’attente et nous avons rendez-vous avec notre psychologue qui nous demande comment il doit nous appeler aujourd’hui et si nous savons pourquoi nous sommes ici. Alors que notre personnage pense être venu pour soigner quelques pertes de mémoires, le psy nous indique qu’il s’agit d’une situation bien plus grave. En effet, nous sommes tout d’abord responsable d’avoir fait brûler une église, puis, après avoir disparu pendant deux semaines, avoir mis le feu à un hôtel. Simple pyromane ? Non, car nous avons également été « témoin » d’un meurtre cruel et nous nous sommes enfui d’un asile. Pourtant, Lilly Witchgan, notre protagoniste, ne se souvient de rien. Lorsqu’elle s’entretient avec le psy, un autre personnage lui parle dans sa tête, une sorte de conscience sombre qui lui reproche d’occulter ses souvenirs. Le docteur revient ensuite à la charge en présentant différents journaux intimes à Lilly ; lui sont-ils familiers ? Seulement le sien, lui répond Lilly malgré la voix dans sa tête qui lui précise qu’elle reconnaît également son propre journal. Malheureusement le psy renchérit que tous ces journaux intimes portant des noms de propriétaires différents appartiennent à Lilly, qui souffre d’un trouble dissociatif de l’identité. « Qu’est-ce qui ne va pas chez moi, docteur ? » demande innocemment la jeune fille. Après une brève explication par son docteur, Lilly lui explique que ses souvenirs sont comme un archipel où elle n’arrive pas à distinguer toutes les îles. Enfin, le psy lui propose de parcourir « ses journaux » et à travers une cinématique nous voyons clairement que Lilly possède un bon nombre de personnalités en elle, à travers les émotions et les écritures différentes de ces pages de journaux intimes. La mémoire de Lilly est une sorte de puzzle inachevé que nous allons parcourir à travers plus d’une cinquantaine de niveaux, à la rencontre de toutes les facettes de ses personnalités, pour tenter de comprendre ce qu’il s’est passé.
Silence, et… action !
Le level design de RoM est quasiment toujours construit de la même manière car il est lié au gameplay. Chaque tableau est divisé en deux avec de part et d’autre une ambiance et un personnage différent, ; au départ il s’agira d’avoir Lilly à gauche et l’un des ses alters à droite. Lorsque nous déplaçons un personnage, l’autre se déplace en même temps, un peu à la façon des effets de la double cerise dans Mario 3D World ou Captaine Toad. Le but de chaque niveau est d’amener en même temps les deux personnages sur un pentacle qui se trouve face à un miroir, dans lequel se trouve le reflet de l’autre. Bien entendu, le chemin est difficile et parsemé de pièges, d’embûches, comme des pics acérés, d’obstacles et d’ennemis. Ainsi, comme Lilly, nous avons dû scinder notre esprit en anticipant les mouvements des deux personnages, nous obligeant souvent à retourner sur nos pas, ou nous plaquer contre un mur, pour que l’autre personnage puisse continuer de progresser dans sa direction. En jouant sur les deux premiers niveaux de difficulté, il est possible, en amenant les deux personnages à un checkpoint, de revenir à cette position lorsque nous mourrons. Vu la difficulté du jeu, ce n’est pas du luxe. En mourant un certain nombre de fois, nous avons vu la Mort nous proposer de l’aide et en acceptant, nous nous sommes retrouvés dans un mini-jeu où nous contrôlions toujours deux personnages, dans un style de runner vu de haut. Le but est simple, il faut éviter des pièges et ramasser des masques qui serviront d’indices pour progresser dans le cheminement de nos personnages. En jeu, lorsque nous activons un masque, cela fait apparaître un fantôme sur chaque partie du tableau, qui établira le chemin à parcourir ; il suffit de le suivre pour arriver au bout de l’épreuve et passer au niveau suivant. Pour chaque tableau, un nombre de pas maximum est affiché. Dans les deux premiers modes de difficulté il sera possible d’ignorer cela et de finir un tableau avec plus de déplacements que prévu. Simplement, en finissant à temps, cela sera notifié dans le jeu et cela donne la possibilité de s’amuser à faire le jeu à cent pour cent (pour ce critère) en retournant dans les tableaux non notifiés. Pour retracer les événements cités plus haut par le psy, nous traverserons une forêt, un hôtel, une église et un asile. Chaque lieu a son ambiance particulière et nous y ferons des rencontres, celles des autres « moi » de Lilly que nous retrouverons dans la deuxième partie de chaque stage. Une fois que tous les tableaux d’un environnement sont terminés, le jeu nous demande de retourner dans quatre tableaux bien précis où nous devrons y récupérer des clés. Cela permet d’avoir encore plus de challenge mais c’est surtout pour que nous soit dévoilé encore plus de détails sur un scénario vraiment très développé pour un jeu de puzzle.
Lilly et ses alter
Lilly compte une dizaine de personnalités en elle ; Emily Lims que nous rencontrons très tôt dans l’histoire, est une fille aux allures gothiques qui est la seule à avoir conscience de tous les autres alters et de leur dangerosité. Lizzy, elle, souhaite devenir aussi belle qu’une certaine Elizabeth Short surnommée le Dahlia Noir suite à un drame que nous vivrons dans le jeu. Après l’avoir croisée dans un café près de chez elle, Lilly l’a tant admirée et a tant voulu lui ressembler qu’une nouvelle personnalité a pris possession de son esprit. Pour les autres, nous ne spoilerons pas mais disons simplement que le scénario est bien construit et que nous avons pu jouer avec une fille zombie, une jumelle démoniaque, un ange, une diablesse, une bonne sœur, une sainte, une accro aux médicaments et son double quand les pilules font effet. Chacune a ses possibilités ou talents qu’il faudra exploiter pour venir à bout de la cinquantaine de tableaux de RoM. Des PNJ complètement fous sont aussi de la partie, pour enrichir le scénario.
L’art Gothique
Sur son aspect graphique le jeu a également été bien travaillé. Les personnages ont un aspect SD (super deformed) avec un petit corps et une grosse tête. Les décors sont assez détaillés et chacun des quatre environnements respecte bien le thème à travers ses niveaux. Il y a aussi des jeux d’ombres et de lumières qui apportent leurs effets dans ces endroits tous plus glauques les uns que les autres. Lors d’interludes, nous avons pu voir des illustrations vraiment bien faites, sur fond de vieux papier de journal intime, ce qui ajoute toujours plus à l’ambiance. Du côté de la bande son, c’est Expect Amour, un one-man band, qui s’est occupé de composer les morceaux. Les musiques collent parfaitement au jeu, dans un style appelé « Witch House », très populaire en Russie, pays d’origine de RedBlackSpade, le créateur du jeu. Comme il le dit lui-même, c’est une musique électronique très lourde, sombre et il est certain qu’associé au scénario torturé, cela apporte vraiment de la profondeur à RoM.
De nos jours la vie est dure
Le jeu est maniable, jouable avec la manette pro ou les Joy-cons. Pour terminer Reflection of Mine et percer tous ses secrets en mode Hystérie, il nous a fallu presque trente heures. Le jeu est très difficile, complexe, surtout dans ses derniers niveaux mais en aucun cas injuste ou punitif, chacune de nos morts n’étaient dues qu’à une erreur d’inattention, de jugement ou de timing.
Conclusion
Avec en toile de fond les troubles dissociatifs de l’identité dont souffre Lilly la protagoniste, la complexité du titre joue sur deux tableaux, comme son gameplay. D’un côté par sa difficulté qui pourrait en rebuter plus d’un, mais qui ravira les fans du genre, de l’autre par son scénario riche, intense et torturé qui prend parfois position, comme par exemple sur des questions de religion. Reflection of Mine est une petite perle indépendante pour qui n’a pas peur de passer de longues heures à se creuser la tête sur Nintendo Switch.
LES PLUS
- Le scénario et le thème abordé
- La patte graphique et les illustrations
- La bande son envoûtante
- Les bonus de scénario
- Jeu en français
- Les aides mais…
LES MOINS
- … Le jeu reste difficile en mode normal