Ejecté de son usine, un petit robot se retrouve au beau milieu d’une vaste cité désertée par sa population. Y règnent d’autres robots, des congénères particulièrement vilains, qui vont, à votre passage, vous identifier comme un intrus à éliminer au plus vite…
Délicieuse ambiance post-apo que voilà, digne des pulps et des films SF américains des années 50, avec au menu, dans ces rues dévastées, une armada de cousins plus ou moins éloignés de Robby le Robot. Chaque lieu, chaque droïde (du flottant à tentacules au Goldorak qui écrabouille tout), tous nous sont présentés sous forme de cartes postales joliement décalées, au style rétro. L’aspect graphique, avec une 3D isométrique jouant beaucoup sur la valeur des plans (comme ces passerelles laissant apercevoir la ville en contrebas), entre couleurs délavées et style cartoonesque, est ce qu’il y a de plus saisissant au premier contact. Les environnements sont à la fois variés, ultra détaillés et le plus souvent superbes, en dehors de certains intérieurs d’usines un peu plus sobres, et bien moroses (mais c’est voulu, donc « pas de ‘blème, si c’est blême »). La musique, atmosphérique à souhait, contamine le jeu à la manière du radium dans l’air, c’est-à-dire « à merveille ». C’est immersif, pour sûr. Et c’est surtout très réussi du point de vue de l’ambiance.
Le premier monde, linéaire comme un tuto’, nous permet de prendre la mesure des commandes. Et plus précisément d’apprécier ce qui distingue Retro Machina des autres jeux : cette possibilité de prendre le contrôle d’un robot ennemi (un seul à la fois), avec l’aide de la gachette gauche pour sélectionner et du stick droit pour le déplacer, et de tirer parti de son pouvoir. Le simple bot, corrompu, pourra ainsi activer un interrupteur pendant que nous, nous vaquerons tranquillement à nos occupations. Un robot guérisseur pourra nous sauver la mise durant un combat qui tourne au vinaigre (et huile de vidange). Nous pourrons également user de ce pouvoir pour déplacer des passerelles ou autre objets électroniques capables d’empathie avec nous.
Même si l’exploration et l’action vont prédominer durant la joute, Retro Machina nous propose quelques énigmes bienvenues où nous pourrons abuser de notre super-pouvoir. Autant le dire de suite, nous aurions aimé qu’elles soient le coeur du jeu. Car les combats, qui pullulent, montrent vite les limites du gameplay. La vue éloignée n’aide pas à être précis. Notre allonge, même améliorée, n’est pas fameuse et notre puissance de frappe est ridicule. Notre possibilité de contrôler un ennemi peut aider, mais le système de ciblage est capricieux et le jeu ne nous laisse aucun répit (il n’y a pas de pause tactique) pour en abuser. Comme nos pouvoirs ne sont pas forcément déterminants pour écourter ces rixes, la frustration pointe le bout de son nez. Surtout quand le jeu nous balance des suites d’ennemis en mode « arène fermée ». Le plus gros point noir du système de combat reste cette esquive : une roulade molle à souhait, lourde, qui ne nous permet même pas d’être invincible durant une fraction de seconde. Il n’est pas rare de se faire toucher en esquivant car notre hitbox, en roulant par terre, devient tout à coup énorme. Bref, la sentence est sans appel : l’esquive ne sert à rien quand il s’agit de faire vite, alors autant faire un pas de côté et courir à toute berzingue pour s’extraire du danger.
La map est vaste et alambiquée, à la manière d’un labyrinthe fou, avec des pans entiers du sol qui ont disparu. Le but est de récupérer des clés et d’allumer des interrupteurs afin de débloquer de nouveaux quartiers et ainsi de suite. Et en glanant des pouvoirs, comme la lévitation, la map se découvre à la manière d’un metroïdvania. Du classique ! Il existe de rares ascenseurs numérotés. Des numéros qui nous permettront de nous aiguiller sur le chemin à prendre. Ce ne sont pas de maigres indices, car même avec la map ouverte, difficile de retrouver son chemin et de savoir exactement où aller. Pour nous aider à nous guider, on pourra essaimer la mort comme le petit poucet comme il n’y a pas de respawn des ennemis. Si vous voyez des robots en vie, c’est bien par là qu’il faut se faufiler !
Parlons maintenant du système de sauvegarde, de la progression en général, et de ce fameux respawn, ou pas, des ennemis. À part si un patch miraculeux sort pour cette version Switch et nous fait mentir (et encore, est-ce pardonnable ?), il est possible de se voir pourrir la partie, et à jamais, par un bug désespérant.
Premier constat, la sauvegarde est automatique, et ça sauvegarde à chaque changement d’écran. Impossible de faire des sauvegardes manuelles, histoire de revenir en arrière quand le jeu buggue donc. Deuxième constat, il n’y a pas de respawn des ennemis une fois tués, en dehors de ceux que l’on rencontre dans une arène fermée.
Constat amer, si nous tuons des ennemis d’une arène (qui ne dit souvent pas son nom, en mode surprise) avant que les portes ne se ferment, ils ne sont pas décomptés. Or ces portes ne s’ouvrent qu’une fois le nombre d’ennemis tués requis soit atteint. En résumé, nous nous retrouvons donc enfermés dans une salle, avec la musique de combat en fond mais sans qu’il n’y ait plus un seul ennemi à combattre. Impossible de s’enfuir, impossible de sortir de notre geôle. Et relancer la partie ne sert à rien, puisque les ennemis tués hors arène le sont ad vitam et ne réapparaitront plus jamais. Les portes se referment systématiquement donc sur nous et notre progression, tout l’édifice patiemment construit, s’écroule comme un château de cartes.
Des larmes de rage et de colère en perspective, et rien n’indique que cela ne se reproduira pas lors d’une nouvelle partie. L’angoisse du bug qui anéantit tout est parfois pire que le bug lui-même !
Conclusion
Il existe des jeux, rares, qui ont un énorme potentiel et de réelles qualités esthétiques et ludiques mais qui sur un seul défaut de conception vont s'effondrer totalement. Retro Machina est l'exemple type du jeu qui s'auto-détruit, si par malchance, vous êtes confrontés à un terrible bug qui annulera toute votre progression. Si par miracle, vous ne croisez pas cette horreur au rire sardonique (qu'on appelle donc "terrible bug"), ou que le jeu soit patché à temps, nul doute que Retro Machina saura vous séduire par son ambiance rétro-futuriste et son aventure de longue haleine.
LES PLUS
- Graphiquement, c'est très joli
- Un background fouillé et intrigant
- Prendre le contrôle des ennemis
- Monde immense
- Musique athmosphérique au top !
- Bon jeu, si tout va bien
- Longue durée de vie, si tout va bien
LES MOINS
- Map peu lisible
- Trop de combats
- Système d'esquive ratée
- Un bug peut saccager toute votre expérience
- Système de sauvegarde et de non-respawn des ennemis à revoir