Soleil, grenadine et doigts de pied en éventail ! Voici venu le temps des vacances… Enfin, surtout pour les monstres (désolé pour nous, pauvres humains, les vacances sont finies). Avec son sac fluo harnaché sur le dos, notre monstre en question est un touriste féru d’histoire humaine. Et ce bougre poilu (et sans visage) va visiter cette mythique Angleterre, morcelée en une myriade de petites îles faisant office de musée d’objets humains. Du parapluie au vélo d’appartement, en passant par une imprimante, comme autant d’obscurs vestiges, tous sont posés sur des socles avec des petits panneaux délivrant des explications totalement fantaisistes et hilarantes. C’est le sens que l’on donnerait, avec une pointe d’humour, à ces objets si nous avions oublié leur utilité ou si nous étions nous-même des monstres. Et les monstres, ça fait quoi en vacances ? Eh bien, ça coupe du bois.
Le jeu est une suite d’îles, comme autant de puzzles à défaire. Nous devons connecter chacune de ces îles à l’aide de bûches, servant idéalement de ponts flottants, pour se sortir de ce labyrinthe. Il faudra donc déforester le peu d’arbre qu’il reste en Angleterre, du sapin jovial au bouleau silencieux, sans vergogne et avec un brin de méthode. Les contraintes pour déplacer les bûches sont nombreuses, spatiales principalement, avec des îlots plus ou moins grands, où chaque rocher et souche d’arbre seront des obstacles impossibles, croit-on, à franchir. Notre monstre ne peut pas tirer les bûches, il ne peut que les pousser, les faisant basculer lorsqu’elles sont à la verticale ou en les faisant rouler. Ça implique qu’elles roulent jusqu’à rencontrer un obstacle ou de l’eau, ce qui nous oblige à réfléchir chacune de nos actions pour arriver à notre objectif : passer sur l’autre île, vous savez, celle qui nous tend les bras depuis tout à l’heure.
Le gameplay est évolutif mais d’une manière singulière puisque nous ne gagnons pas de pouvoir ou autre gratification typique des jeux d’aujourd’hui : nous avons tous les mouvements et les actions pour déplacer nos bûches dès le départ. C’est le jeu qui, par ses énigmes et de petits ajouts à divers endroits (comme des troncs plus grands par exemple), va nous permettre de nous aguerrir et de découvrir toutes les possibilités, bien plus grandes qu’elles n’y paraissent. Les zones distinctes apportent ces petites variations bienvenues pour un jeu qui, disons-le, ne cherche jamais à tout bouleverser. Tout est fait par petites touches délicates.
D’ailleurs, le jeu surprend à la fois par son minimalisme mignon et son envergure. Rien ne laisse présager en effet de l’envergure du jeu, avec son principe vieux comme le monde revisitant Sokoban (un jeu japonais de 1980 où l’on poussait des caisses dans un labyrinthe). Un principe pour le coup maintes fois revisité avec ses commandes faciles à prendre en main dès les premières secondes, ses graphismes enfantins ainsi que sa bande-son zen et éparse. Rien ne laisse présager du périple, de cette aventure sans histoire, qui va nous perdre aux confins d’une carte immense. La destination, voire la fin du jeu, va vite devenir secondaire car, avec plus de 400 îles et plus encore, Monster’s Expedition va vous donner le goût du chemin de traverse, du pas de côté, de l’exploration, plutôt que de filer tout droit vers une sortie qui, de toute façon, vous vous en apercevrez, s’éloignera de plus en plus quoique vous fassiez.
Le jeu est hautement relaxant et amusant. Les graphismes sont mignons, sans fioritures autres que des belles couleurs ouatées, des petites animations soignées, même si les environnements sont finalement assez peu variés. Notre monstre, même sans visage, est hyper expressif par ses mouvements et même lorsqu’il est immobile : le simple fait qu’il puisse se reposer sur un banc, s’assoir au bord de l’eau ou qu’il prenne une boisson chaude à la machine à café le rend irrésistible. Notre monstre, pour sûr, est vraiment en vacances ! Hautement relaxant, oui, Monster’s Expedition l’est. Mais il a aussi ses quelques moments difficiles, ses petits pics de difficulté, deux trois moments qui vont vous rendre chèvre, et chauve à force de vous arracher les cheveux. Car les programmeurs aiment les chemins trompeurs, les fausses pistes, les « Ah, bien tenté mais ce n’est pas ça, recommence encore ! ». Heureusement, Monster’s Expedition est un jeu sympa jusqu’au bout : point de punition, nous pouvons rembobiner le fil de nos actions en appuyant sur B et revenir en arrière afin d’opter pour une meilleure solution. Et si vous bloquez trop sur une île, plutôt que de regarder la soluce, le jeu vous propose d’aller vadrouiller ailleurs, ce qui est idéal pour s’aérer les idées. Le monde est vaste et les chemins sont innombrables, profitez-en !
La durée de vie est plus qu’honorable. Comptez, selon votre niveau aux jeux de logique, dix à vingt heures de jeu pour prendre le bateau du retour. Une grosse poignée d’heures de jeu en plus pour le finir à 100%. Nous pouvons chipoter sur des moments de lag (souvent liés aux murs de difficultés), quelques longueurs à gambader sur une même zone et des petites répétitions car, sur plus de 400 îles, il y a forcément des énigmes et des décors qui se ressemblent. Mais ce serait pinailler, car Monster’s Expedition fait montre d’une certaine forme de perfection, d’un jusqu’au boutisme génial dans le genre « pousser des trucs » et s’avère être un chouette voyage mémorable pour tout amateur de puzzles.
Conclusion
Nouvelle, que disons-nous, énième itération du genre "on pousse des trucs dans un labyrinthe", Monster's Expedition va pourtant faire de la déforestation une activité monstrueusement addictive, pour un périple d'une envergure vraiment étonnante. Mignon, parsemé tout le long d'un soin constant et d'un humour absurde, délicat, Monster's Expedition est une réussite pour le genre, et même bien au-delà. Quel que soit votre âge ou votre sensibilité, vous allez aimer le monstre et vous allez aimer pousser des bûches avec lui. Un jeu avec un air de vacances, indispensable pour la rentrée !
LES PLUS
- Le Monstre très attachant
- Graphiquement mignon
- Un principe simple mais efficace
- Un vaste monde à découvrir
- Tout à la fois relaxant et exigeant
- Le musée d'objets humains, très drôle
LES MOINS
- Quelques répétitions côté puzzles
- Des environnements peu variés