Le développeur SWERY est devenu le spécialiste des jeux divisant la communauté des joueurs, et ce n’est pas Deadly Premonition 2 qui viendra nous contredire avec sa technique fluctuante, mais son univers si accrocheur. Cela ne l’empêche pas de continuer à proposer des projets trouvant toujours un écho auprès de sa fan base, ainsi son dernier jeu : The Good Life, kickstarté à hauteur de 630 000 € quand même, arrive aujourd’hui sur nos Switchs. La recette a-t-elle changé ? Non, le dernier titre du studio White Owls sera clivant, voici pourquoi.
Deadly Stardew Valley Premonition
Dans The Good Life nous incarnons Naomi Hayward, une journaliste new-yorkaise qui se retrouve à devoir faire un reportage sur la ville de Rainy Woods, ville autoproclamée la plus heureuse du monde. Partant du principe que cette ville se trouve en plein milieu de la campagne anglaise, cette assertion porte déjà sérieusement à débat… mais qui sommes-nous pour juger du climat anglais ? Quoi qu’il en soit, nous vivrons cette aventure en Angleterre, et qui dit jeu se basant au Royaume-Uni dit PNJ parlant en anglais.
C’est le premier point clivant à évoquer. The Good Life n’est pas traduit de l’anglais au français. Si pour la plupart des jeux ce n’est pas vraiment un problème, ici SWERY oblige, la gouaille de nos interlocuteurs fait partie intégrante du plaisir de jouer. Les dialogues sont très bien écrits, avec beaucoup de dérision et un narrateur so english, mais certains protagonistes viennent aussi du fin fond de la campagne et pour ajouter au folklore, quoi de mieux que de mettre un peu de patois dans les dialogues. Imaginer un anglais en train de devoir regarder un épisode des ch’tis vs les marseillais mais avec juste les sous-titres. Voilà à quoi ressemblent certains passages, heureusement peu nombreux, de The Good Life. Un bon niveau en anglais est donc obligatoire pour en profiter pleinement.
L’anglais ne nous faisant pas peur, nous nous sommes lancés dans les aventures de Naomi l’esprit léger. Nous avons alors découvert une jeune femme percluse de dettes : 300 000 € rien que ça, et pas vraiment ravie d’être obligée de mener à bien cette mission pour les rembourser. Heureusement, elle n’aura pas à compter seulement sur ses qualités journalistiques pour avancer sur la voie de la rédemption financière. Elle disposera aussi d’un réseau social : Flamingo, pour devenir l’influenceuse la plus suivie du moment et ainsi engranger le cash telle une banquière sous acide. Dernier point, Naomi pourra glaner de-ci, de-là divers éléments, allant du scarabée commun au minerai précieux. Chacun de ces éléments pourra se revendre, de quoi en finir rapidement avec ces pépins monétaires.
Et bien non, car le monde de The Good Life est grand et difficile. Chaque action que nous ferons aura un coût, qu’il soit humain ou financier. Il nous faudra prendre soin de Naomi en même temps que de son porte-monnaie. Nous aurons à gérer différents éléments pour mener à bien nos missions. Il y aura d’abord notre argent. Il faut rembourser notre dette, mais ce n’est pas tout, il faut bien vivre aussi. Acheter du matériel plus performant, de quoi se nourrir, se vêtir, se téléporter et se reposer, bref vivre sa vie. Il faudra aussi gérer notre faim, notre stress, notre sommeil sous peine de devoir gérer notre maladie.
Les Sims tueurs en série
Notre journée sera ainsi faite de repas, de soin du visage et de nettoyage corporel avant de nous sentir prêts à partir découvrir les mystères que cache cette ville la plus heureuse du monde. Mais si le maquillage, la douche et la cuisine ne prennent que quelques secondes, la recherche d’ingrédients ne se fera pas toute seule. Durant nos déambulations dans la campagne anglaise, il nous faudra glaner les différents éléments que nous trouvons sur notre route. Avec un peu de chance, ceux-ci seront des graines de légumineuses que nous pourrons faire pousser dans notre modeste potager avant de pouvoir les consommer.
Au pire nous pourrons acheter des graines ou des repas complets chez les différents commerçants de la ville, mais cela grèvera sérieusement notre budget. Pour nous renflouer, il sera nécessaire de photographier tout ce qui pourra intéresser notre communauté. Prendre la photo d’un cadavre fera forcément le buzz, mais ce n’est pas la seule à avoir cet effet. Tous les deux jours, une série de cinq hashtags nous dira ce qui nous amènera le plus de followers, clés de notre sauvetage pécuniaire.
Il faudra donc nous déplacer dans ce vaste open world fait de route, de chemins de terre, de vaste prairie herbeuse, et fait surtout de longs murets en pierre que notre journaliste sera bien incapable de franchir. Heureusement, pour elle, elle aura très vite la possibilité de se transformer en chien ou en chat. Ces derniers possèdent différents attributs. Le chien courra plus vite et repérera la trace de tout ce qui a une odeur. Le chat s’attaquera à tout ce qui vit pour en faire une escalope et pourra grimper à certains murs pour monter sur les toits et atteindre des hauteurs inaccessibles sinon.
Les habitants subissant ces transformations la nuit, nous pourrons discuter avec eux sous ces formes. Cela n’a rien d’anodin. Selon que nous privilégions les êtres canins ou félins, une fois retrouvée leur apparence normale, nous bénéficierons de tarifs avantageux chez ceux ayant la transformation que nous préférons. Et comme l’argent est le nerf de la guerre dans le titre de SWERY, une fois notre choix fait, nous ferons tout pour en maximiser les gains.
My Time sur un mouton enlaidi
La faune est, elle aussi, sujette aux variations jour/nuit. Ce qui amènera le second point clivant de ce jeu, le farming. Si les personnages de The Good Life ont tous leur personnalité et un chara-design qui leur sont propres, ils ont, par contre, la même mauvaise habitude de nous envoyer faire leur course pour faire avancer les quêtes. Les quêtes fedex vont s’enchaîner un rythme effréné tout au long de la grosse vingtaine d’heures pour voir le bout de notre enquête. Et obtenir un élément bien précis disponible soit de jour soit de nuit sera une source de frustration. Heureusement, le second degré de la narration viendra adoucir les bords et mettra un peu de légèreté dans nos pérégrinations.
Spoiler Alert : Nous vous conseillons d’ailleurs de choisir la route A, comme conseillé par le jeu d’ailleurs, pour rapidement débloquer le déplacement à dos de mouton et gagner un temps énorme durant les longs déplacements.
Un scénario plein d’humour et de rebondissements, des personnages hauts en couleur, une multitude de taches à mener pour gérer notre vie virtuelle. Que pouvait-il mal se passer ? Et bien, une fois encore, le manque de moyen va être un dur écueil à surmonter. La technique est, encore une fois pour un jeu de SWERY, à la ramasse.
D’un point de vue graphique, The Good Life est indigne d’un jeu sorti en 2021. Les textures sont pixelisées et le flou ne disparaît qu’un mètre devant nous. Les fleurs et autres éléments plus petits, comme les odeurs en vue canine, apparaissent au dernier moment. Les ralentissements sont légion, aussi bien en intérieur qu’en extérieur. Seule la mise en place d’une carte très vallonnée peut être considérée comme une réussite tant elle donne l’impression de se balader dans une campagne anglaise idéalisée faite d’enclos à mouton, de monts et de lacs.
La bande-son est agréable, mais le manque de moyens sur les doublages rend les quelques interjections lancées par Naomi vite pénible, surtout à dos de mouton. Entendre vingt fois d’affilées Yeah Baby à de quoi faire perdre patience au plus zen d’entre nous.
En ce qui concerne la prise ne main, le constat est encore une fois mitigé. La navigation dans les menus manque de raccourci et prend du temps pour pas grand-chose, tandis que les changements chat/chien doivent obligatoirement passer par une transformation en Naomi. Du coup, nous passons notre temps, en début de partie, à faire : chien pour foncer, Naomi, chat pour sauter, Naomi, re chien pour courir rapidement. C’est frustrant.
La narration est bien sûr au top, les quêtes annexes sont toutes plus étonnantes les unes que les autres, comme celle demandant d’être saoule tous les soirs. La gestion de notre lopin de terre est agréable, même si elle demande énormément d’argent. Pouvoir se promener dans une roseraie aménagée par nos soins et un pur moment de plaisir. Bref le soin apporté à ce qui fait le sel d’un jeu vidéo a été peaufiné pour rendre ce monde si vivant et attachant.
Conclusion
The Good Life est un jeu de SWERY, pétri de bonnes intentions et de mécaniques qui s’entremêlent pour former un tout cohérent, plein de possibilités offertes aux joueurs, qui pourra vivre son aventure comme il le souhaite. Un titre à la narration extrêmement soigné, aux dialogues remplis d’humour et de seconds degrés. Mais c’est aussi un titre techniquement à la traîne, aux graphismes d’un autre temps, à la bande-son agréable, mais au doublage limité et à l’ergonomie améliorable. De plus son passage de 25 € sur Steam à 34 € sur Switch semble inexplicable. Encore un titre clivant, qui n’a pas son équivalent dans la production actuelle en mélangeant des genres tels le jeu de survie, le jeu d’aventure et le jeu de gestion, mais qui n’a clairement pas les moyens de ses ambitions. Malgré cela, qu’il est difficile de le lâcher une fois commencé, et c’est bien là l’essentiel.
LES PLUS
- Une narration pleine d’humour, de mystères et de rebondissements
- Des personnages hauts en couleur au chara-design affirmé et original
- La bande-son est calme et soignée
- La gestion des attributs de Naomi est simple et efficace
- Le monde ouvert est tout en relief
- Nos incarnons un chat et un chien ! Et aussi une journaliste, d’accord.
- Un million de choses à faire, toutes interconnectées
- Qu’il est attachant ce jeu !
LES MOINS
- Les graphismes sont clairement très vilains
- Beaucoup de lag entachent l’expérience
- Les quêtes fedex sont vite lassantes
- Seul l’anglais est disponible et il faut un bon niveau
- L’ergonomie est améliorable