Best Month Ever ! c’est la volonté d’étudiants et de professionnels de la Warsaw Film School de se faire rencontrer le Thelma et Louise de Ridley Scott avec le Monde Parfait de Clint Eastwood. Un road movie à la fois déjanté et émouvant qui aborde des thèmes de société sombres capables de nous faire regretter de n’être que des êtres humains imparfaits. Ce voyage à travers les États-Unis, nous allons le mener sous la forme d’un jeu d’aventure narratif. L’occasion pour nous de réviser nos cours de géographie et d’humanisme.
La vie c’était pas mieux avant
L’histoire que nous allons vivre se déroule à la fin des années 60. Une époque de liberté et d’émancipation pour beaucoup, mais qui n’est que le point de départ d’un rêve égalitaire que nous sommes toujours en devoir de construire pour les générations futures. Nous allons accompagner Louise et son fils Mitch, âgé de huit ans, durant ce qui sera le meilleur mois de leur vie. C’est un Mitch devenu adulte qui s’occupera de la narration tout au long des douze chapitres que compte notre histoire.
Celle-ci commence très difficilement. Nous apprenons que Louise souffre d’un mal qui ne lui laisse plus qu’un mois à vivre. Elle part alors à la recherche d’un foyer accueillant pour son fils. L’occasion pour elle de renouer les fils d’un passé chaotique. Nous allons ainsi revivre, sous forme de flashback, les événements marquants de la vie d’enfant et de jeune femme de Louise tout en avançant dans notre périple.
Les thèmes abordés tout au long de nos déambulations sont loin d’être faciles et d’ailleurs un avertissement annonce d’emblée la couleur lors du démarrage du jeu. Que ce soit le racisme, l’inceste ou la prostitution, rien n’est galvaudé, du moins dans les textes. Heureusement pour nous, les images sont bien plus chastes et un voile noir viendra limiter le malaise que nous pouvons ressentir face à certaines situations révoltantes.
Les personnages que nous allons rencontrer tout au long des trois heures que dure cette histoire sont bien distincts et apportent tous leur pierre à l’édifice que cherche à bâtir le studio polonais. Sans être le point le plus important de notre aventure, celle-ci se focalisant naturellement sur Louise et Mitch, nous allons faire la connaissance de personnages envers qui nos sentiments iront de la reconnaissance sincère à l’envie de leur balancer un bon coup en dessous de la ceinture pour être sûr qu’ils aient beaucoup de difficulté à se reproduire.
L’école de la technique
Si cette histoire est prenante de bout en bout, les mécaniques mises en place sont plus succinctes. Il nous faudra essentiellement déplacer le personnage dont nous avons le contrôle d’un point d’intérêt à un autre pour ensuite faire des choix moraux qui dicteront quel adulte deviendra Mitch plus tard. Chacun de nos choix influencera ainsi trois traits de caractère positivement ou négativement. Un système de couleur et de plus ou moins nous aidera toujours à décider.
Si les premiers choix ne font intervenir qu’une seule catégorie, telle l’honnêteté, très vite, nos choix en feront intervenir plusieurs, pas forcément de manière positive. À nous de mixer en fonction de nos envies, pour atteindre l’une des neuf fins disponibles. En fonction des valeurs que nous cherchons à défendre et des choix que nous ferons, l’enfance de Louise ainsi que la vie future de Mitch pourront se révéler bien différentes. L’aventure de base étant courte, il est très facile de reprendre depuis le début pour faire évoluer différemment la conclusion de notre road movie.
Des phases de QTE sont elles aussi présentes régulièrement durant notre voyage. Elles aussi ont une influence sur la suite des événements que nous allons vivre et sur les dialogues qui vont en découler. Sous forme de mini-jeux qui ne prennent jamais trop d’importance dans la narration, ces phases apportent un petit vent de fraîcheur dans une histoire pleine de bons sentiments, mais qui se déroule dans un univers fourmillant de coins sombres.
Mais le principal écueil concerne la partie technique. Si la volonté d’apporter des détails à ce monde pour nous faire revivre cette époque est évidente, les graphismes, sur Switch, malgré un joli filtre sépia, souffrent d’un aliasing très prononcé et d’une définition assez pauvre. Nos personnages, quant à eux, évoluent à travers des animations souvent étonnantes et les contrôles peuvent aussi se montrer capricieux. Les phases concernées sont rares, tant c’est la narration et les dialogues qui prennent l’essentiel de notre temps, mais elles existent tout de même.
La partie musicale souffre elle aussi d’un manque évident de moyen nous laissant trop souvent sans aucune musique alors qu’à d’autres instants la formidable bande-son de cette époque nous arrive dans les oreilles. Les bruitages sont plus réguliers tout comme les doublages, malheureusement, comme pour les sous-titres, uniquement en anglais. Les dialogues ne nécessitent pas un niveau d’anglais exceptionnel, mais il demande quand même un minimum pour comprendre les enjeux auxquels nous confronte cette histoire poignante.
Conclusion
S’il est souvent reprocher au jeu vidéo un manque de profondeur dans son propos, Best Month Ever ! en est un parfait contre-exemple. Sa narration aborde beaucoup de sujets de société, jugés encore tabou, avec beaucoup de finesse et de pudeur sans jamais édulcorer son contenu. Bien sûr le titre de Warsaw Film School souffre de lacune technique, mais il n’en propose pas moins un voyage poignant au cœur d’une Amérique en pleins bouleversements sociaux dans laquelle sévissent des maux que nous n’avons toujours pas réussi à éradiquer. Best Month Ever ! est un titre qui ne cherche pas à faire dans le manichéen, mais qui peut offrir de vrais moments de joie comme de tristesse.
LES PLUS
- Jamais manichéen dans son propos, Best Month Ever ! nous laisse libre de nos actions
- Chaque choix est parfaitement clair dans ses répercussions
- La narration est toujours juste
- Les doublages, en anglais, sont de qualités
- Les thèmes matures sont abordés sans voyeurisme
- Les mini-jeux rafraîchissent les moments de tensions
- La durée de vie de trois heures permet de refaire facilement l’aventure pour varier nos choix
LES MOINS
- Les contrôles sont parfois très fluctuants
- La partie graphique est trop limitée et aliasée
- Les animations des personnages sont souvent étonnantes
- Demande un niveau correct en anglais pour être joué