Amateurs d’expériences narratives, bienvenue dans Behind the Frame, petit indé sans autre prétention que de nous immerger dans l’intimité d’une artiste peintre. L’occasion de s’extraire de l’habituel carcan, parfois pesant, de ces triple A survoltés à la gâchette un peu trop facile, le temps d’une parenthèse apaisante et contemplative, armé de son seul pinceau…
Fenêtre sur cour
Au coeur de l’intrigue, l’héroïne, censée achever la pièce finale de sa galerie, se laisse pourtant distraire par l’intrigant voisin d’en face, ce vieux monsieur qui coule des jours solitaires avec son chat. Entre les deux amoureux, transis, d’art pictural, s’établit ainsi, peu à peu, un curieux jeu de regard par fenêtres interposées… Toute à son obsession, impossible dans ces conditions, pour la jeune peintre d’en revenir à son ultime tableau tant qu’elle n’aura pas, d’abord, résolu le mystère de ce fascinant riverain.
Simple comme bonjour, l’histoire se suit avec un réel plaisir, efficacement jalonnée de modestes énigmes concourant à la composante “puzzle game” du titre. Les rares phases de jeu hors-narration font à ce titre largement appel à notre sens de l’observation. Sans chrono, sans se presser, et pour cause : 1h à 1h30 suffisent à conclure l’aventure.
L’art est tout, et tout est art
S’il pêche évidemment par sa micro-durée de vie, Behind the Frame telle la douce langueur d’une nuit d’été, séduit fort heureusement, c’est là son principal argument, par son atmosphère propice à la rêverie ; entre deux coups de pinceau, nous nous acquittons nonchalamment de quelques tâches, glissons un oeil chez l’énigmatique doyen, en revenons à notre fresque incomplète une fois démêlé un petit casse-tête, afin d’obtenir la couleur qui, jusqu’à présent, nous faisait défaut.
Ensuite, le cycle se répète. Dessiner, peindre, manger, boire son café, écouter un filet de musique, en quête d’inspiration et de nouvelles teintes… Le jeu bégaie, un peu, beaucoup. Les affres de l’ordinaire. Behind the Frame vaut toutefois pour son scénario, finement ciselé, qu’il serait impardonnable de spoiler au vu de sa brièveté. Pour son ergonomie aussi, spécialement sur Switch, mode tactile oblige.
Ghibli l’enchanteur
Néanmoins, c’est avant tout par sa direction artistique, irréprochable, que Behind the Frame éblouit le plus intensément. Fins et colorés, les graphismes qui, clairement, s’inscrivent dans la veine du studio Ghibli – mais si, mais si, Princesse Mononoké, Mon voisin Totoro, et puis Ni No Kuni pour le jeu vidéo -, justifient à eux seuls de se laisser tenter. Un bijou de dessin animé, ou presque.
Que dire, sinon, de la bande-son, au moins tout aussi magique ? S’en dégage un merveilleux sentiment de calme, de plénitude, voire de franche félicité à l’écoute du plus doux des froissements ou fascinant cliquetis, l’environnement bruissant de ces sons anodins du quotidien qui, les uns des autres, se détachent nettement. Privilégiez d’ailleurs le port du casque, favorisant pleinement l’immersion au sein de ce bref moment d’authenticité, émotionnellement engageant.
Conclusion
Assurément à part, Behind the Frame se révèle, visuellement, digne d'une production animée des studios Ghibli, accompagné pour ne rien gâcher, d'une bande-son tout bonnement sublime. Rarement notre esprit n'aura, paradoxalement, aussi librement vagabondé que dans l'espace confiné de cet appartement d'artiste, cadre d'un huis-clos narratif faussement naïf, désarmant de sincérité. Un court, trop court voyage émotionnel et sensoriel d'à peine 1h30, mais le jeu en vaut la chandelle.
LES PLUS
- Ses graphismes d'inspiration "ghibliesque"
- Sa bande-son enchanteresse
- Son scénario touchant
- Sa simplicité de gameplay
- En français
LES MOINS
- Beaucoup, beaucoup trop court
- Enigmes beaucoup, beaucoup trop simples
Ca donne envie !