Les yeux dans le rétro, l’éditeur brésilien QUByte qui poursuit main dans la main son petit bonhomme de chemin avec les développeurs de Piko Interactive, nous gratifie d’un nouveau titre fleurant bon les 16, 8 bits. Moins illustre que d’autres de ses contemporains précédemment portés sur Nintendo Switch, tels The Immortal, The Humans ou Jim Power pour ne citer qu’eux, Radical Rex valait-il vraiment qu’on le ressuscite ? Rien n’est moins sûr et voici pourquoi.
Et ça continue, encore et encore
Avant d’évoquer le jeu en lui-même, attardons-nous d’abord sur son moteur qui fait encore les frais de l’émulateur calamiteux à l’oeuvre depuis le tout premier rejeton de la série des “Classics”, dont nous avions déjà souligné le manque d’optimisation à ce point criant qu’il parvient à ternir l’expérience du Nintendo Switch Online (NSO pour les intimes), sur les consoles virtuelles duquel il sévit aussi… au prix, rappelons-le, de l’accès annuel à l’ensemble du catalogue du NSO+.
Rien de nouveau à l’horizon, donc. Nous déplorons toujours l’absence, et d’artworks de la genèse du titre, et de filtre graphique susceptible d’adoucir des contours passablement crénelés, pixels préhistoriques obligent. Nous pestons toujours devant les étirements inutiles, disgracieux en diable, de l’image sur notre écran bien plus large que les télés cathodiques d’antan. La pilule est d’autant plus difficile à avaler que d’autres studios ont su avec brio éviter pareils écueils, à l’instar des dernières compilations de Turrican confiées aux bons soins de Factor 5.
Jamais l’idée d’une édition spéciale comprenant boîte dédiée et manuel, desquels tiraient grand plaisir les amateurs – c’était l’bon temps -, n’a semble-t-il effleuré l’esprit des développeurs. En résulte l’impression d’un travail bâclé frôlant le degré zéro de l’amour du rétrogaming, amer constat que ne viennent pas adoucir les qualités vidéoludiques du jeu.
Et pourtant, pourtant…
Et pourtant, l’immersion en terre jurassique s’annonçait sous les meilleures auspices au lancement de la version 16 bits de Radical Rex. Notre curiosité piquée au vif par le sympathique logo d’un dinosaure juché sur un skate-board, nous avions pris fébrilement le contrôle de l’archaïque créature, flanquée de son fidèle ptérodactyle. Mais à peine nous étions-nous emparés de notre planche à roulettes que tout s’est détraqué. Extrêmement brèves, les phases de glisse pâtissent en effet de la fâcheuse manie qu’a notre avatar de rengainer son ORI (objet roulant identifié) au moindre obstacle rencontré (et heurté, cqfd).
Or, ces derniers ne manquent pas, s’agissant d’un action-platformer des plus classiques qui requiert du joueur qu’il atteigne la fin de niveaux (forcément) très linéaires en effectuant (forcément) des sauts, tout en exterminant (forcément) la faune alentour, passablement belligérante. On s’accommode toutefois durant la première moitié du titre – une bonne grosse demi-heure – de son conformisme, contrebalancé par laes décors soignés, fourmillant de détails, le pixel art parfaitement restitué et les stages, relativement étendus, qui se renouvellent agréablement : jungle, marais, cimetière de dinosaures, lac…
Funeste erreur, cependant, que de se réjouir trop tôt, car les environnements de prime abord si variés, finissent par se faire écho. Faute de temps, de moyens ou d’inspiration, les démiurges d’alors ont pilé au milieu du gué. Guère plus innovant, le gameplay peine à se distinguer du tout-venant ; bondir, cracher une flamme, régaler nos adversaires d’une mandale façon Mawashi-geri ? Typique des nineties.
Veni, vidi, vici
Les ennemis, qu’il convient dans un premier temps de rôtir avant de les achever au corps-à-corps, exigent que nous restions attentifs à notre distance de tir ainsi qu’à leurs attaques, qui en appellent à de fréquentes esquives. En découle une variété de bon aloi dans les affrontements, chacun des boss disposant de surcroît d’un pattern spécifique à appréhender. Petit bonus bienvenu, des items disséminés dans les niveaux contribuent à augmenter la portée de notre flamme, nous simplifiant alors drastiquement la mise sur le terrain. Une bonne idée, incitant à explorer le moindre recoin !
Quant à la déclinaison Gameboy du jeu, aimablement incluse, elle s’avère sans surprise en tout point fidèle aux qualités et défauts de son aînée sur consoles 16 bits. Le champ de nos actions se voit en revanche réduit à deux coups essentiels, maniabilité portable oblige : sauter, embraser. En dépit de sa terrible monotonie graphique, cet opus se laisse parcourir sans déplaisir, pas plus qu’il ne nécessite de skill de champion.
Ainsi serions-nous, à l’heure du bilan, bien incapables de départager ces deux volets plaisants à l’usage, aux level design et gameplay conformes aux standards des années Dorothée. Éculé, le scénario nous confronte au kidnapping de notre bien-aimée, victime d’un odieux magicien. Assurément moins redondante que les environnements traversés, c’est finalement la bande-son, plutôt rythmée, qui résume au mieux notre sentiment sitôt venu le moment de refermer cette compilation : Radical Rex s’inscrit tout bonnement dans la moyenne des productions de son époque.
Conclusion
S’il n'est jamais dénué d'intérêt de s'essayer à un jeu rétro demeuré jusqu’alors totalement inconnu, force est de constater que le portage de Radical Rex se révèle bien trop fainéante pour nous émouvoir plus que de raison. Beaucoup trop conventionnel, déjà à l'époque, dans son gameplay et graphiquement insuffisant, cet action/platformer revenu d'entre les morts se contente d'une timide apparition sur Nintendo Switch qui ne comblera que les fous furieux du rétro gaming, au regard des rares options de confort disponibles. Gageons que QUByte et Piko sauront se montrer plus ambitieux à l'avenir car depuis quelques temps déjà, les studios adverses font largement mieux en la matière.
LES PLUS
- Les mécaniques sont classiques, mais fonctionnent parfaitement
- Les décors sont soignés et détaillés…
- La bande-son est rythmée et nous accompagne agréablement
- La narration est rigolote pour le genre
- Les deux versions 8 bits et 16 bits sont disponibles
LES MOINS
- Toujours ce même moteur d’émulation, en-deçà des solutions concurrentes
- … mais ils ne se renouvellent plus à partir de la deuxième moitié du jeu
- Deux heures suffisent à plier les deux volets, en raison d'une faible difficulté
- Un titre certes plaisant, mais déjà trop classique à sa sortie en 94
- Le skate-board, clairement sous-exploité