Dernier avatar vidéoludique d’une franchise adulée des amateurs de wargames, Warhammer 40k: Shootas, Blood and Teef a déboulé le 20 octobre dernier sur toutes les plateformes du marché à l’initiative des développeurs de Rogueside. Sa reconversion sur le tard en trépidant run’n’gun, saura-t-elle convaincre les joueurs qui peuvent désormais s’y adonner, en ligne ou localement, jusqu’à 4 simultanément ? À vos flingues, prêts ? … WAAAAAAAAAGH !!!
Petit tour d’horizon
1987. Issu de l’imagination fertile du concepteur britannique Rick Priestley œuvrant alors pour le compte de Games Workshop, un jeu de stratégie fait sensation : Warhammer 40K, consistant à se constituer une armée de figurines à peindre et à collectionner afin d’à coups de dés, écraser son adversaire. Forte de son succès, la licence n’a depuis lors eu de cesse d’accueillir extensions, rééditions et déclinaisons à la pelle sur Pc et machines de salon.
Il faut dire que son lore dystopique drôlement fourni, assorti d’un sous-texte pamphlétaire relatif à nos guerres modernes, se prête à toutes les excentricités. Votre terrain de jeu ? L’Univers, excusez du peu, que l’humanité suffisamment avancée technologiquement, s’est mis en tête de coloniser sous l’égide de l’Empereur-Dieu, dont la parole et les troupes font loi en ce 40ème millénaire face au Chaos, ses suppôts et des Xenos rarement coopératifs – terme fourre-tout visant à qualifier l’ensemble des races extraterrestres.
Plus spécifiquement, cette nouvelle itération traite de l’offensive sur la planète Luteus, d’une faction Ork convoitant le précieux carburant – en ce moment, on les comprend – dont jouissent impunément les colons terriens, impulsée par l’Ogruk – ou big boss, dans l’jargon – Grutekka. À bord de l’avion depuis lequel les séditieux canardent allègrement les Impériaux – miam, des humains tout frais -, l’impitoyable chef de guerre – Grutekka, donc- qui ne manque décidément pas de toupet, commet l’irréparable en s’emparant par la force de l’adorable Squig poilu – une sorte de perruque honorifique, rassurez-vous – qu’arbore le valeureux Gargaz Teefgrabba, avant d’expulser sa carcasse hors de la carlingue. Le pauvre hère, que nous incarnons, n’aspire dorénavant plus qu’à se venger de l’immonde pourceau… quitte à casser des gueules. L’Ork, ce fin tacticien.
Sitôt dit, sitôt fait, nous cassons des gueules, prenons le contrôle d’une base arrière de nos congénères préétablis sur la planète, cassons des gueules, chapardons un aéronef humain – avec le plein, s’il-vous-plaît -, et nous élançons finalement dans l’espace sur les traces du voleur de scalp… où, bien sûr, nous ne manquerons pas de casser des gueules : unités impériales, Space Marines (des soldats génétiquement modifiés entièrement dévoués à l’Empereur-Dieu) et Snotlings (les petites mains des Orks, pas chère la chair à canon), entre autres adeptes du culte de Genestealer (des Tyranides, aberrations aliens susceptibles de muter en armes, vaisseaux ou véhicules selon les besoins de la ruche).
Komment kon utilise les fling’ et les dakkas ?
Au lancement d’une partie, vous êtes invité à rejoindre un clan, à déterminer votre classe de personnage (de laquelle dépend votre capacité spéciale, en sus d’un type de grenade spécifique), ainsi qu’à vous constituer un arsenal parmi 20 armes aux statistiques variables, équitablement réparties en 5 catégories : flingues, mitrailleuses, fusils à pompe, lance-roquettes et armes spéciales (lance-flammes ou disqueuses). Dans un premier temps, il faudra toutefois vous contenter du Kalibr’ (la pétoire de base des Orks), l’éventail de vos joujoux s’enrichissant des modèles précités au fil de l’aventure et de vos emplettes en boutique. Le changement d’arme(s) s’effectue aux checkpoints, d’une simple pression sur la touche -.
Primordiale dans ce genre de jeu, la maniabilité se montre aussi réactive qu’intuitive. Sans surprise, les déplacements s’effectuent avec le stick gauche, la visée grâce à son homologue de droite. Pour tirer ? Ce bon vieux ZR. Respectivement affectés au lancer de grenade et l’attaque au corps-à-corps, L et R s’avèrent incontournables à l’usage bien que ZL, dont dépend le saut, n’ait pas à rougir : entrecoupant la succession de salles grouillant d’ennemis à occire, des phases de plateforme qui, jamais, ne relèvent de la gageure, viennent en effet défier votre dextérité. Quant à votre habileté à jongler entre les boutons X, Y, B ou A afin d’au choix, changer d’arme, recharger, esquiver ou interagir avec certains éléments du décor, le boss se fait fort de l’éprouver au terme de chaque niveau. Libre à vous, toutefois, de redéfinir la configuration des touches dans les paramètres du jeu.
Dans tous les cas, le plaisir d’arroser à tout-va un bestiaire plutôt varié ne se dément pas, malgré le race swaping affleurant ça et là – c’est-à-dire qu’en lieu et place d’adversaires inédits, le développeur se contente de recycler la faune existante par le truchement d’ajustements cosmétiques, de race ou de couleur (color swap). Qu’à cela ne tienne ! Votre jauge de rage pleine, tout ce beau monde valse indistinctement, votre Ork mal léché ponctuant son accès de furie d’un « WAAAAAAAAAGH ! » retentissant, l’expression à n’en pas douter de la frustration accumulée à encaisser et distribuer suffisamment de baffes pour mieux remplir le fameux conteneur – vert à l’écran, en rouge la santé. Vous auriez tort de vous en priver, celui-ci vous conférant non seulement une invincibilité temporaire, mais également des dégâts accrus ainsi qu’une cadence de tir plus soutenue.
À ne pas négliger non plus, 3 types de collectibles à glaner en chemin : les Squigs – à l’origine de cette vendetta, rappelons-le – restaurant la moitié de votre vie une fois consommés, les grenades planquées dans des caisses de dakka, enfin les dents, canines et autres prémolaires, trophées orks à échanger en magasin contre armes et parures de tête – c’est qu’elle est coquette notre brute bien-aimée !
Kolonisons la konsol’
Niveau artistique, la direction cartoonesque en 2D sied étonnamment bien à ces Orks patibulaires, dont la fâcheuse tendance à la violence n’a d’égale que la crasse ignorance qui, néanmoins, n’exclut pas sur un malentendu de brefs éclairs de génie. À chacun des peuples son code couleur, fort à propos, qu’il s’agisse d’un assortiment de teintes primitives, vert et rouille, chez les Orks, du camaïeu de gris forcément impersonnel caractéristique de l’Astra Militarum (la dénomination officielle de l’armée impériale) ou de ces blancs, ces noirs très contrastés propres à la ruche tyrannide.
Effusions de sang, décapitations, torches humaines (ou aliens)… Visuellement, le titre fait preuve d’un certain sadisme auquel les plus réfractaires, ou impressionnables, s’empresseront de remédier dans les options du titre – votre serviteur s’en est au contraire régalé, car c’est un taré. L’exploit dans tout ça ? La lisibilité de l’action, qui demeure exemplaire en dépit du bordel ambiant. Une chatte y retrouverait ses petits !
Quant à la bande-son, saturée de riffs métalleux de circonstance et de grosses caisses qui claquent, cette dernière s’emballe lors des confrontations puis décroît progressivement, à mesure que le calme revient. Chaque niveau dispose d’une piste attitrée avec ses variations, chassant toute redondance. Intégralement doublés dans un anglais bâtard, mâtiné d’ork, les dialogues pour leur part, se révèlent désopilants à la lecture de leur traduction française, truffée de ces termes aux sonorités barbares issus du lexique plutôt limité (Fling’, Dakka, Squig) de notre héros.
Le bât blesse en revanche en matière d’optimisation, le framerate toussotant à partir de la vingtaine d’ennemis affichée simultanément, son inconstance croissant ensuite proportionnellement. Surtout, les temps de chargement exaspèrent ; à titre d’exemple, comptez 2 bonnes minutes d’interlude à l’initialisation du titre et 5 à 10 secondes en cours de partie, sachant qu’ils abondent. Gageons qu’une mise à jour corrige rapidement le tir. Rapidement, puisqu’en 4 à 6h vous aurez bouclé votre run inaugurale, dans la moyenne des productions du genre. À noter qu’à l’heure où nous écrivons ces lignes, nous n’avons pas encore tâté du mode en ligne, faute d’humanoïdes connectés.
Le jeu est disponible en vanilla ici et en Collector’s edition ici.
Conclusion
Warhammer 40K: Shootas, Blood and Teef se distingue du tout-venant des run'n'gun par son style graphique cartoonesque, ses musiques entraînantes et sa maniabilité aux petits oignons. La retranscription fidèle de l'univers de 40k, pétrie d'humour et sauvagerie, rend l'expérience d'autant plus plaisante. À l'image du protagoniste principal, dont on suit avec passion le périple intergalactique, le jeu fourmille d'inventivité sous des abords volontiers crétins. S'il pêche par son manque flagrant d'optimisation, chargements infinis à l'appui, les inconditionnels de la série ou d'escapades bourrines entre potes y trouveront aisément leur compte.
LES PLUS
- L'univers 40K, bien respecté
- La DA façon cartoon, drôle et gore
- La bande-son, bien énervée
- Les dialogues amusants
- La prise en main, très agréable
- La diversité d'armes proposées
LES MOINS
- Les temps de chargement, trop longs et trop fréquents
- Quelques types d'ennemis qui se font écho
- Notre aventure, une insulte à l'Empereur-Dieu : hérétique ! Hérétique !