Nous en parlions récemment avec le test de Scrap Riders, mais le mélange Beat’em All et Point’n Click se marie étonnant bien. Les phases d’enquête et de réflexion alternant avec les phases de combat pour ainsi réussir à satisfaire les joueurs ayant envie à la fois d’une expérience narrative prenante tout en ayant la possibilité de mettre quelques tatanes bien placées dans le pif de ses ennemis. Mais nous regrettions aussi, pour ce même Scrap Riders, que les mécaniques des deux genres étaient en deçà de ce que proposaient les ténors respectifs des deux genres. Alors les Français du studio Cowcat ont-ils réussi à combler ces manques avec leur Brok The InvestiGator, la réponse viendra avec la combinaison d’un bourre-pif et d’une batterie usagée.
Un monde complexe et prenant
Sorti en 2022 sur PC, le titre des développeurs ligériens, donc du département de la Loire, de Cowcat Games arrive sur nos consoles hybrides préférées. Nous commençons par y incarner Brok, un détective privé/homme à tout faire dans un monde ravagé par la pollution et dont la population subit un système de classe qui ferait pâlir d’envie H. G. Wells et son Meilleur des Mondes. Atlasia est une cité autogouvernée qui n’accepte en son sein que les habitants faisant partie de la classe des Drumers. Ceux-ci ont alors le droit de vivre dans un environnement sain et propre.
Les déclassés, ou Slummers, vivent dans des lieux insalubres à l’extérieur des murs de la ville. Ce système n’est pas clos puisqu’un Drummer qui faillit à sa tâche perdra ses privilèges et se verra exclu de la ville tandis que des écoles, extérieures à la cité, permettent à leurs élèves les plus méritants de devenir des Drumers. C’est dans ce monde malsain que nous retrouvons Brok, un ancien Drumer et son fils adoptif, Graff, qui est en train de passer son examen final pour quitter le monde des Slummers.
La profession même de Brok et le monde complexe mis en place par les développeurs de chez Cowcat nous plongent de suite dans cette intrigue. La narration en est exemplaire avec ses flash-back énigmatiques et ses multiples éléments intrigants qui tissent au fur et à mesure de notre avancée une histoire aux influences rappelant les classiques de la science-fiction. Le tout est parfaitement maîtrisé et si un amateur du genre verra vite les ficelles, les néophytes se laisseront facilement guider par cette aventure.
Malgré ces influences, Brok The InvestiGator n’est pas un titre linéaire. Les nombreuses fins disponibles dépendent de nos choix ainsi que de nos actions. Notons d’ailleurs qu’à la fin de notre première partie, le système d’embranchements est présenté au joueur puis disponible en pleine partie, ce qui nous permet, en toute connaissance de cause, de découvrir l’ensemble des dénouements sans avoir à tâtonner à l’aveuglette. Un ajout très bien pensé qui nous motive à aller jusqu’à la fin ultime de ce récit.
La qualité de ce récit vient aussi de son imprévisibilité. Nous ne sommes qu’un grain de sable dans une immense machine faite d’inégalités, de robots et de personnages anthropomorphes. Le tout nous offre une narration parfaitement maîtrisée. La présentation générale utilise aussi bien le moteur du jeu que des petites saynètes sous forme d’écrans fixes qui s’emplissent des onomatopées nécessaires. Le résultat est une histoire très difficile à lâcher une fois celle-ci commencée.
Un nouveau genre : le Punch’n Click
Nous prenons alternativement le contrôle de Brok et de Graff pour avancer dans ce récit. Et, après celui mis par la narration, c’est le système de jeu qui va nous mettre un second bourre-pif. En effet, nous pouvons passer comme nous le voulons du mode détective au mode boxeur. Nous pouvons donc passer, d’un simple appui sur le bouton X, du mode Point’n Click au mode Beat’em All. Pourquoi une telle possibilité est-elle géniale ? Et bien tout simplement parce que la plupart des situations que nous allons devoir affronter vont pouvoir se régler soit par la réflexion soit par la force.
En plus de ces multiples embranchements scénaristiques, Brok The InvestiGator nous laisse le choix de la façon dont nous allons nous dépêtrer de nos problèmes. Devrons-nous chercher les bons objets, les bons dialogues et les bonnes combinaisons ou allons-nous déclencher une bonne grosse bagarre pour venir à bout du collaborateur récalcitrant ? Dans les deux cas, nous pourrons progresser en utilisant notre méthode favorite, mais sans pour autant faire une croix sur l’un ou l’autre genre.
Choisir d’utiliser régulièrement ses poings n’empêchera pas de devoir récolter certains éléments pour débloquer certaines situations et régulièrement des ennemis se mettront en plein milieu de notre chemin et nous n’aurons d’autre alternative que de les affronter. Le public des point’n click et des beat’em all n’étant pas forcément le même, un système d’aide pour chacune de ces mécaniques est présent.
En effet, nous pouvons, en cherchant dans chaque tableau, récupérer des pubs qui nous serviront de monnaie pour acheter des indices, nous aidant si besoin durant les phases d’enquêtes et d’énigmes, tandis qu’il est possible de passer, n’importe quand, en mode histoire, pour ne plus avoir à combattre. Tout est fait pour permettre au joueur d’aller au bout de cette aventure en compagnie de Brok et Graff.
Les phases de point’n click sont globalement maîtrisées. Les éléments se mettent assez logiquement en place et il est rare de ne pas savoir quoi faire. Les énigmes peuvent se montrer un peu plus retorses, mais elles sont chaque fois d’une logique implacable qu’il nous faut comprendre pour réussir à en venir à bout. Le système d’indice est bien pensé puisqu’il ne donne jamais la solution, mais, en plusieurs étapes, nous guide vers la solution.
Les phases de beat’em all ne sont pas en reste. Les mouvements de nos combattants sont fluides et chacun d’entre eux possède une attaque spéciale et des mouvements de bases différents. Chaque ennemi vaincu nous apporte de l’expérience qui nous permettra de monter en niveau. Chaque passage nous permet de choisir d’augmenter une statistique entre la vie, la force ou l’attaque spéciale. À nous de choisir en fonction de notre façon de combattre.
Les mouvements à notre disposition sont classiques, mais efficaces. Nous pouvons ainsi enchaîner les frappes simples pour réaliser un combo, sauter puis frapper en plein vol, réaliser une attaque spéciale et la coupler à une série d’attaques simples, mais aussi dasher pour réaliser une attaque chargée ou glissée et enfin, il est possible de bloquer les attaques simples pour mieux contre-attaquer à la moindre ouverture.
Loin d’être simpliste, il nous faudra utiliser l’ensemble de ces mécaniques pour réussir à vaincre nos ennemis. Ceux-ci sont loin de mourir en deux petits coups, leur barre de vie ne se vide pas facilement et ils n’hésitent pas à nous fuir pour nous attaquer de loin. Les boss, eux aussi, sont loin de se laisser faire, ils ne se laissent jamais enchaîner au sol. Heureusement, de base, ces monstres clignotent au moment de lancer leur attaque spéciale. Option qu’il est possible de supprimer à tout moment pour les puristes de Final Fight.
Punch’n click en harmonie
La narration est prenante, les mécaniques de jeu sont variées et s’harmonisent efficacement, il ne reste qu’à la technique de suivre pour nous offrir LA référence du Punch’n Click sur Switch. Et nous ne sommes jamais déçus. Les graphismes, tout d’abord, nous donnent constamment l’impression d’évoluer dans un dessin animé. Les personnages sont dignes de figurer dans Zootopia et leur animation ne souffre d’aucun défaut.
Le passage du mode détective au mode bagarre, à la volée, ne change rien à ce qui s’affiche à l’écran et la fluidité est exemplaire à tout moment. Les décors sont variés et les détails qui les composent nous permettent de mettre en place agréablement nos capacités de détective. L’interface n’est pas en reste puisqu’il est possible d’afficher les objets avec lesquels interagir d’un simple appui sur Y. La croix directionnelle nous permet de passer de l’un à l’autre sans avoir besoin de déplacer le curseur avec le stick droit. Globalement, le passage du combo clavier/souris aux Joy-Con pour les phases de point’n click est très bien pensé et nous permet d’enchaîner facilement avec les phases de beat’em all.
Celles-ci ne souffrent d’aucun défaut de prise en main. Nous réalisons aisément les différentes actions nécessaires à notre survie en combat. La fluidité n’est jamais un problème, seule la hit box de tous ces protagonistes est un peu large et nous permet de frapper un grand nombre d’ennemis, peu importe que ceux-ci se trouvent devant ou derrière nous. Nos adversaires peuvent d’ailleurs faire de même et il nous faut toujours être prudent.
Concernant la bande-son, la composition des titres a été confiée au compositeur américain Python Blue. Les titres aux sonorités synth-pop se renouvellent sans cesse et savent se montrer tantôt angoissants, apaisants ou nerveux, accompagnant toujours ce qui se passe à l’écran. Il est possible de se faire une idée de ce travail sur les plateformes de streaming légales.
PS : Terminons en abordant ce que nous aimerions être la suite du travail de Cowcat, si ce Brok The InvestiGator nous a enchantés, les possibilités que laisse envisager ce mélange Beat’em all/Point’n click semble encore à peine effleurées. Le Beat’em all est un plaisir coupable qui se partage, à quand un mode deux joueurs sur un Punch’n click ? Et surtout, parce que nous aussi avons le droit de rêver, à quand une collaboration entre le studio français et Ron Gilbert ?
Conclusion
Si Scrap Riders nous avait surtout enthousiasmés par son concept, ce Brok The InvestiGator va bien plus loin. Le mélange Point’n click/Beat’em All est encore plus homogène, car chacune des phases a une influence sur sa comparse grâce au passage d’un mode à l’autre à la volée. De plus, le titre de Cowcat Game nous emmène dans un monde où la narration est prenante et dont les mécaniques des deux genres sont parfaitement maîtrisées. Son système d’aide est intelligent tout comme son contenu EndGame qui nous permet de voir bien plus facilement les multiples fins sans avoir à recommencer toujours la même chose. Un titre qui pose les bases d’un nouveau genre, le Punch’n Click et qui nous l’espérons, amènera Cowcat à de nouveaux projets encore plus prestigieux.
LES PLUS
- Les graphismes sont soignés, colorés et parfaitement détaillés
- Les animations de chaque personnage sont impeccables
- Les mécaniques de Point’n click sont maîtrisées et satisfaisantes
- Les phases de Beat’em All sont efficaces
- Les deux protagonistes ont des attaques distinctes
- La bande-son est agréable à écouter et elle accompagne toujours nos actions à l’écran
- Le doublage en anglais est de qualité tout comme la traduction en français
- La narration est à la fois prenante et énigmatique
- Les multiples fins sont intéressantes à découvrir
- Le système postgame nous guide très intelligemment
- L’univers mis en place joue avec les classiques de la SF
- La prise en main est efficace dans les deux modes de jeu
- La traduction en français est impeccable
LES MOINS
- Nous aurions aimé que les décors possèdent plus de vie
- Nous aurions aimé encore plus de combos et un mode deux joueurs dans la partie beat’em all
- Mais pourquoi pas de doublage en français ?
- Les hits box sont un peu larges