H.P. Lovecraft a le vent en poupe en ce moment ! Après les excellents Elderand et The Excavation of Hob’s Barrow, c’est au tour de Dredge de s’inspirer de l’univers de l’auteur américain. Développé par Black Salt Games, un petit studio indépendant néo-zélandais, il est édité par Team17, qui a déjà publié énormément de jeux réussis sur la Nintendo Switch comme Overcooked ou My Time at Portia. Dredge se présente comme un jeu de pêche RPG qui nous plonge dans un univers sinistre. Arrivera-t-il à être aussi bon que les jeux susmentionnés ? C’est ce que nous allons voir.
Dredge sera disponible sur toutes les consoles le 30 mars au prix de vingt-cinq euros sur l’eShop.
Bridge Over Troubled Water
Dredge est un donc une œuvre typiquement lovecraftienne. Cet auteur plaçait ses romans dans des univers mêlant l’horreur et la science-fiction, avec notamment Cthulu comme figure de proue. Nous sommes donc un pêcheur qui vient tout juste arriver sur l’île de la Grande Moelle. Bien que les événements de notre arrivée soient un peu flous, que nous avons visiblement perdu notre bateau lors d’un naufrage, nous devons nous mettre au travail et ramener du poisson.
Heureusement le maire de la ville, en bon Tom Nook, nous prête un nouveau navire que nous rembourserons en récupérant un pourcentage de nos ventes de poisson. Nous voilà donc prêt à partir en mer pour découvrir le gameplay de Dredge.
Notre objectif dans ce jeu de pêche et d’exploration n’est pas de réussir à ramener le plus gros poisson ou d’être le plus rentable, mais de réussir à ramener à un habitant de la ville un peu étrange toutes les reliques cachées dans cet archipel.
Côté gameplay, nous contrôlons notre bateau à l’aide du joystick gauche. Les déplacements sont fluides et agréables. Pour pêcher, il nous suffit d’aller sur un banc de poisson pour lancer la capture.
Globalement, nous capturons automatiquement les poissons sans rien faire, mais nous pouvons accélérer la pêche. Pour ce faire, rien de plus simple, il faut réussir à appuyer sur « Y » au moment précis où le trait passe sur la case verte. Avec le bon timing, vous accélérerez votre pêche, mais en cas d’échec, la prise sera plus lente à pêcher. Chaque espèce de poisson possède son propre pattern qui s’assimile très rapidement.
Lorsque nous réussissons à pêcher un poisson, il faudra mettre ce dernier dans la cale de notre navire. Cette cale possède une place limitée et nous allons devoir ranger astucieusement celle-ci pour qu’elle puisse contenir nos poissons, mais aussi nos moteurs, nos lumières, nos filets et nos cannes à pêche.
Étant donné qu’il y a plusieurs types de poisson, du requin au vivaneau en passant par le crabe et que ces derniers possèdent tous une taille différente, la gestion de son inventaire ressemble parfois à un Tetris dans lequel nous cherchons à optimiser la place en imbriquant notre pêche comme dans un puzzle. Une fois arrivés sur terre, nous pouvons aussi ranger notre équipement en trop dans la réserve.
En plus d’une taille et d’un pattern différents, il faut savoir que chaque poisson ne se pêche pas avec le même équipement. Certains poissons nécessiteront une canne à pêche adaptée pour les océans, alors que d’autres préféreront les eaux troubles. Nous allons devoir adapter notre équipement en permanence pour être capable de pêcher en toute situation.
Nous vendons nos poissons en ville, et l’argent obtenu nous permet d’améliorer notre navire et d’acheter de l’équipement. Nous pouvons aussi pêcher des bagues et d’autres équipements précieux que nous pouvons revendre. Nous allons pouvoir augmenter la taille de notre cale, la résistance du navire, le nombre d’emplacements disponible pour les moteurs, les lumières, etc.
Pour avoir du meilleur équipement, nous devrons trouver des points de recherche qui s’obtiennent en fin de quête, dans l’eau ou bien parfois sur certains points de vente.
Un jeu au gameplay vraiment complet
Un autre critère à prendre en compte dans Dredge est la gestion de la fatigue, et intrinsèquement, celui de la panique. Notre personnage, lorsqu’il n’aura pas assez dormi ou qu’il se retrouve dans des situations stressantes, comme lorsqu’il est au milieu de l’océan en pleine nuit sans aucune lumière, se mettra à avoir peur.
Cette peur nous amène à avoir des hallucinations qui nous amèneront indubitablement à foncer sur des rochers ou à abîmer notre navire. Comment naviguer paisiblement quand une nuée de corbeaux hitchcockienne nous poursuit pour voler nos poissons ?
C’est pourquoi la gestion du temps devient très rapidement un aspect clé du gameplay de Dredge. Certes, la pêche est automatique, mais une journée passe si vite que nous nous sentirons obligés d’accélérer en permanence nos manœuvres afin de ne pas se retrouver fanny à la fin de la journée. Nous ne voulons pas non plus que notre personnage hallucine et nous amène à faire des erreurs qui coûteront chères en réparation.
Pour se reposer, rien de plus simple, il suffit d’amarrer sur un des nombreux pontons de l’archipel pour aller dormir. Le seul problème, c’est que notre poisson pourrit s’il reste trop longtemps dans la cale. Il passera du statut d’avarié à celui de pourri avant de devenir totalement invendable. Il ne faudra donc pas traîner si nous voulons vendre nos poissons aux marchands disponibles sur les cinq îles de l’archipel.
C’est cette même gestion du temps qui va finalement nous pousser à améliorer notre navire, afin d’avoir plus de moteurs, une lumière accrue, et bien sûr, des filets de pêche plus efficaces et capable de pêcher dans le plus de zones possibles.
Nous pouvons aussi récupérer des livres qui nous permettront d’obtenir des améliorations permanentes.
Dans Dredge, chaque avancée est gratifiante, chaque amélioration est appréciable et intelligente. Nous ressentons clairement la différence entre notre petit navire au moteur miteux du début et celui de la fin, capable de tout pêcher et de se déplacer à la vitesse de l’éclair.
Ce gameplay sert parfaitement la quête principale qui nous amène à récupérer les reliques dissimulées dans chacune des îles de l’archipel. Cet objectif, complété par des quêtes secondaires, nous permet d’avoir un gameplay intelligent et très bien pensé, qui nous pousse à avancer dans le récit.
Et avec une durée de vie conséquente
À chaque fois que nous ramenons une relique à bon port, l’étrange monsieur nous gratifie d’un pouvoir surpuissant qui nous aidera énormément mais qui renforcera notre sentiment de panique. Nous débloquerons par exemple la possibilité d’avoir un « turbo » à notre navire ou bien la capacité permettant de vider un banc de poissons en une seule touche.
Au fur et à mesure de notre avancée, nous en découvrons un peu plus sur l’univers étrange dans lequel nous évoluons. Entre les immenses poissons qui nous attaquent en pleine nuit, les fanatiques étranges que nous croisons et les avertissements de la gardienne du phare, nous sentons que notre quête de reliques va nous mener à quelque chose d’effrayant et de bien plus grand que nous.
Par ailleurs, nous pêchons très régulièrement des poissons difformes, appelées « abominations » qui apparaissent majoritairement la nuit.
Même si le gameplay de Dredge est à terme répétitif, il est aussi très complet et addictif. Le jeu fait partie de ces jeux qui nous frustrent par sa répétition mais qui nous donne envie de repartir pêcher pour découvrir les mystères qui entourent son univers. Vous risquez très fortement de vous perdre dans les récifs à découvrir les décors, le bestiaire, et à apprécier le gameplay au lieu de vous concentrer sur la quête principale.
Même après la fin de la partie, il reste quelques secrets que nous n’avons pas réussis à élucider qui nous donnent envie de retourner sur le jeu juste pour comprendre le pourquoi du comment.
Finalement, l’univers est très mystérieux, très bien développé, mais le récit souffre de défauts qui nous empêchent d’être pleinement investis dans l’histoire qui se développe en filigrane. Le gameplay, aussi intéressant qu’il est, prend une place si grande qu’il emporte le récit avec lui dans les abysses.
Dredge est un jeu qui propose plusieurs fins, mais comme le joueur n’est pas investi par son récit et qu’il suit linéairement les quêtes qu’on lui propose, il y a fort à parier qu’il fera comme nous et ne prendra pas conscience qu’il a la possibilité de changer les événements qu’il subit toute la partie.
La fin de Dredge est elle aussi décevante. Alors que nous nous attendions à une fin en apothéose, avec une quête des plus épiques pour sceller notre aventure, nous terminons quelque peu désappointés devant le générique de fin.
Ces défauts, qui en gêneront plus d’un, ne remettent cependant pas en question l’excellent travail de Black Salt Games qui a réussi avec Dredge à faire un jeu au gameplay complet, à l’univers mystérieux et intriguant. Nous avons passé globalement un très bon moment sur ce jeu qui ressemble au pendant sombre d’Animal Crossing et de Stardew Valley.
La durée de vie, pour ses vingt-cinq euros, est intéressante. Nous avons passé une dizaine d’heures sur ce jeu, et vous pourrez en passer plus si vous souhaitez découvrir les autres mystères qui entourent cet archipel.
Les graphismes en 3D possèdent un vrai charme et les décors sont très réussis. Chaque île possède ses propres caractéristiques et son supplément d’âme. Nous sommes vraiment conquis par cet archipel et son bestiaire étrange et effrayant.
La bande-son est aussi une des véritables forces de Dredge, alternant les moments de répit et insistant bien quand il faut lors des passages un peu plus stressant.
La traduction est aussi parfaite, ne souffrant d’aucun défaut. Que ce soit en docké ou en portable, les deux versions sont agréables, même si nous avons préféré la précision de la manette pro aux Joy-Con.
Conclusion
Dredge est une très belle réussite. Avec son gameplay conséquent et complet, il réussit à proposer un jeu qui surfe entre le RPG, le jeu de pêche et le jeu d’exploration. Nous avons parfois eu la sensation de jouer au pendant sombre d’Animal Crossing, avec son univers lovecraftien et ses monstres qui rôdent aux alentours. Le jeu est très beau, la bande-son est réussie. Malheureusement, malgré toutes ses qualités, la narration, le storytelling et l’univers de Dredge sont aspirés par un gameplay trop linéaire et dirigiste qui nous empêche de nous imprégner du récit. Dredge reste cependant une très bonne expérience que nous vous recommandons les yeux fermés.
LES PLUS
- Un gameplay complet et accessible
- Un mélange efficace entre le RPG, le jeu de pêche et l’exploration
- Améliorer son bateau, quel plaisir !
- Un concept de « panique » très intelligent
- Un univers lovecraftien intriguant et efficace
- Une durée de vie conséquente pour un prix intéressant
- Un bestiaire varié
- Des graphismes réussis
- Une bande-son irréprochable
- De belles frayeurs en perspective
- Agréable en docké comme en portable
- Une traduction irréprochable
LES MOINS
- Un gameplay qui dévore la narration
- Un jeu parfois trop dirigiste malgré son open-world
- Plusieurs fins mais dont les choix ne sont pas clairement perceptibles
- Indubitablement répétitif