Alors oui, nous sommes les premiers à nous extasier devant le travail d’un développeur fou et solitaire qui réussit à rendre réel la vision qu’il avait d’un jeu vidéo. Ainsi récemment, Chained Echoes de Mathias Linda nous avait impressionnés, tout comme avait su le faire en son temps le toujours excellent Axiom Verge de Thomas Happ. Mais si la dépense en temps et en énergie pour réaliser un tel projet ne nous laisse pas indifférents, ce n’est pas une raison pour ne pas nous montrer autant critiques que sur les autres productions que nous avons entre les mains. Alors Sword of Glory réussira-t-il à passer l’épreuve du feu ? C’est ce que nous allons voir de suite.
Trop seul sur le carreau
Sorti en janvier 2022 sur les appareils Android, Sword of Glory est un titre qui porte déjà très mal son nom. En effet à aucun moment durant nos déambulations nous n’avons mis la main ou débloqué une quelconque épée de gloire. Mais revenons plutôt à nos moutons, ou plutôt à nos avatars, car ceux-ci vont être très nombreux, que ce soit justifié ou non. Et cela nous l’apprenons dès la fin du tutoriel. Après avoir appris les mouvements de bases, notre réceptacle corporel est annihilé par une présence cosmique.
Qui est-elle et pourquoi cherchons-nous à en venir à bout, nonobstant le fait que celle-ci vienne de nous tuer bien sûr ? Beaucoup de questions dont les réponses viendront au fur et à mesure de notre avancée dans les différentes contrées qui verront nos aventures se dérouler. Chaque chapitre fonctionne de la même manière. Nous arrivons dans une ville, puis nous devons devenir le champion des trois ligues de l’arène locale avant de pouvoir affronter le champion local. Celui-ci est aux ordres de notre Némésis et elle en profite pour terroriser la populace.
Du coup lorsque nous en venons à bout que se passe-t-il : une déité nous tue, nous nous incarnons dans un nouveau corps, et les villageois en ont profité pour nous tirer notre équipement. Et ils en sont parfaitement conscients puisque même sous notre nouvelle apparence, ils s’adressent à nous comme si nous n’avions jamais changé, étrange… Mais baste de la crédibilité et parcourons ensemble ces joyeux paysages qui nous enverront aussi bien voir des samouraïs que des vikings ou des chevaliers du Moyen Âge.
L’arène qui pique
Sword of Glory est donc un jeu de combat en arène. Nous allons devoir affronter l’une après l’autre une multitude d’opposants dans des lieux fermés et loin d’être vastes. Pour remporter une ligue, il nous faut sortir vainqueur des trois manches, chacune d’entre-elles étant composée de plusieurs rounds contre de nouveaux ennemis avec pour dénominateur commun une arène disposant des mêmes pièges.
Pour combattre, nous disposons d’une attaque légère, qui comme son nom l’indique, attaque légèrement et donc plus rapidement qu’une attaque lourde, qui a toutefois l’avantage de briser la garde d’un adversaire, ou la nôtre si nous la subissons. Pour parer cette attaque lourde, nous pouvons alors réaliser une esquive qui remplit une jauge d’adrénaline à chaque tentative réussie, jauge qui nous permet à terme de lancer une attaque spéciale normalement dévastatrice.
Si sur le papier ce système semble plutôt équilibré, une fois manette en main le constat est plus sévère. Globalement, en un ou deux contre un, que ce soit contre les boss ou le tout-venant, nous arrivons facilement à nous en sortir. Par contre une fois face à trois ennemis, la courbe de difficulté connaît une asymptote verticale, les amateurs de mathématiques se régalent, rendant ces affrontements bien plus délicats.
Pour nous en sortir, nous sommes alors obligés de redescendre d’un niveau d’arène pour farmer de quoi améliorer notre physique ainsi que notre équipement. Commence alors une seconde boucle de gameplay avec la possibilité d’upgrader l’ensemble des équipements disponibles en ville. Que ce soit de quoi nous entraîner ou le matériel disponible. Nous pouvons aussi, une fois mort et de retour au choix du personnage, perfectionner les bonus d’armes et d’armures que nous allons ensuite pouvoir acheter.
Là encore l’idée est intéressante, mais dans les faits, le résultat est un peu bancal. Lorsque nous combattons un ennemi qui possède notre attirail d’avant notre mort, nous faisons face à un ennemi dont les améliorations précédemment achetées semblent actives, ce qui rend ces combats quasi infaisables vu notre niveau de départ, et ce qui oblige le jeu à nous donner une vie infinie pour nous entraîner dans un combat extrêmement long et pénible durant lequel nous avons le temps de recevoir une volée de coups sans rien pouvoir faire.
Les mécaniques du cœur
Durant nos combats, nous récupérons aussi, à chaque montée de niveau, un pouvoir ou une capacité supplémentaire. Celles-ci vont de l’explosion de nos ennemis une fois morts à la libération d’une potion, toujours une fois morts, en passant par l’apparition d’un avatar supplémentaire qui vient nous prêter main forte de temps à autre. L’idée fonctionne très bien et le sentiment de montée en puissance est palpable. Toutefois notre mort programmée en fin de chapitre en devient encore plus frustrante et l’obligation de tout reprendre à zéro oblitère rapidement toute envie de prolonger l’aventure.
D’autres problèmes s’ajoutent petit à petit à ce qui ressemble à force davantage à une liste de changements à faire suite à des retours de joueur en mode bêta-test. Il y a d’abord l’impossibilité de choisir l’arme ou l’armure que nous souhaitons équiper. Seule la dernière achetée est automatiquement équipée. Sauf que lorsque celle-ci possède des propriétés magiques, nous sommes dans l’impossibilité de les tester à moins de les acheter puis de repasser à la caisse dans le cas où nous souhaiterions revenir à notre set de départ.
Pire, il est possible d’acheter plusieurs fois le même équipement d’affilée en cas d’appuis successifs sur le bouton Valider pour esquiver le baratin du vendeur, ce qui fait alors fondre notre pécule longuement acquis et augmente encore un peu plus notre frustration et notre envie de tout balancer à travers la vitre ouverte du rez-de-chaussée avec des coussins juste derrière pour pas se faire engueuler par sa femme et devoir payer encore un nouveau double vitrage. Hein ? Ça sent le vécu ? Nous ne parlerons qu’en présence de notre avocat !
Pas de trèfles, pas de chance
Enfin la technique même est bien trop balbutiante. Nous passerons sur les graphismes en low poly. Ceux-ci sont un choix esthétique plutôt bien mené et qui nous offre une variété de décors et de combattants assez sympathique. Mais dépenser de la menue monnaie dans des améliorations pour les arènes et en voir le résultat, alors que la même chose pour la ville n’apporte strictement rien à celle-ci a de quoi nous laisser désappointés. Que ces améliorations ne concernent que les échoppes des commerçants et qu’elles touchent toutes les villes en même temps rajoute bien sûr de la difficulté de mise en place, mais n’importe quel subterfuge aurait été suffisant pour ne pas nous donner l’impression d’investir pour rien.
Plus gênant, la prise en main est loin d’être optimale. Le portage de la version tablette transpire sur nos écrans. Il y a d’abord ces cinq boutons qui prennent une place folle sur le côté droit de notre Switch et qui ne font que nous rappeler, entre autres, que le bouton A sert à frapper. Voilà ce qui se passe lorsque l’on appuie sur la touche « portage facile vers la Switch » de n’importe quel moteur de jeu. Mais les problèmes ne s’arrêtent pas là. L’esquive peut déclencher, si faite au bon moment, un bullet time. Sauf que notre personnage est soumis au même ralentissement et que lorsque celui-ci se termine, nous n’avons jamais pu profiter de ce mouvement parfaitement réalisé pour asséner des coups à nos nombreux ennemis.
Ce petit manque a une importance radicale dès que nous rencontrons trois ennemis qui ne vont pas se limiter à nous attendre bien sagement, mais dont l’un va nous envoyer une attaque rapide, l’autre une attaque forte et le troisième un blocage. Du coup, il en devient presque impossible de les toucher sans prendre une raclée derrière et l’absence d’une esquive utile rend alors le tout bien trop difficile.
Notre dernier reproche concernera les pièges mis en place dans les arènes. Ceux-ci se déclenchent très, très lentement et ils ne servent alors quasiment à rien. Si dans un premier temps nous espérons nous déplacer tout en esquivant pour attirer nos ennemis vers ces destructeurs de points de vie, nous observons vite que même s’ils sont en plein dedans, le temps que le piège se déclenche, nos ennemis ont largement le temps d’en sortir pour revenir vers nous.
Conclusion
Alors oui, à ce niveau, le travail d’un programmeur solitaire est toujours impressionnant, surtout que pour Sword of Glory, le nombre de mécaniques mises en place en dehors des combats d’arène est à saluer. Toutefois, le revers de la médaille de cette solitude est bien aigre pour le joueur qui se retrouve confronté à une courbe de difficulté ridicule et à un farming récurent pour avoir la possibilité de s’en sortir. Enfin les trop nombreuses absences de finitions sont vite criantes et gâchent encore un peu plus notre expérience de ce qui aurait pu être un sympathique titre passe-temps.
LES PLUS
- Les graphismes en low poly se renouvellent régulièrement
- La bande-son se laisse écouter et ne vient jamais nous gêner
- L’ensemble des mécaniques mises en place sont intéressantes
LES MOINS
- L’esquive qui déclenche un bullet time, mais qui ne sert à rien
- Les pièges sont trop lents à se déclencher
- La mort après avoir vaincu un boss, c’est juste pour tester notre self-control ?
- Tout est fait pour nous faire recommencer depuis le début
- Le farming comme modèle de jeu, c’est non
- Il est impossible de choisir une arme ou une armure déjà acquise
- La courbe de difficulté est ridicule
- Un portage de la version Android maladroit dans sa charte graphique
- Boy ça prend un Y et pas un I
- Les trois mini-jeux du centre d’entraînement n’en sont en fait qu’un seul
- La ville qui ne s’améliore pas malgré nos dépenses, c’est encore frustrant
- Le tarif de base de 15 € juste pour passer dans les meilleures réductions sur l’eShop, ça devient visible et ridicule