Cyber Citizen Shockman, ou Kaizõ Choujin Shubibinman de son petit nom connu au pays du soleil levant, est le jeu ayant lancé la série des Shubibinman dès 1989 sur PC-ENGINE. Et c’est l’éditeur Ratalaika, qui nous a déjà fourni les portages de titres rétros tels l’intemporel Gynoug ou le plus oubliable Avenging Spirit, qui continue son travail d’agrandissement de catalogue à peu de frais en nous proposant aujourd’hui ce premier épisode de la série, depuis largement tombé dans l’oubli. L’occasion pour nous de voir que si ce travail de mémoire est nécessaire, il permet surtout de constater que le jeu vidéo, c’était pas forcément mieux avant.
À la recherche du scénario perdu
Mais commençons plutôt par planter le décor et pour cela quoi de mieux que de profiter du livret entièrement scanné. Car oui, nous faisons partie de ces vieux messieurs qui ont connu les livrets de 20 pages ou plus inclus dans les boîtes de jeu et sans lesquels nous n’aurions jamais su contre qui nous nous battîmes et quelles étaient les mouvements possibles de nos personnages. Un livret fourni devrait donc suffire à notre bonheur, ERREUR ! Comment profiter d’un livret quand, malgré notre choix de la version anglaise, celui-ci est entièrement en japonais et donc illisible.
Car oui, désolé, le testeur maîtrise l’anglais, le français, avec en plus des rudiments d’allemand et d’espagnol, una cerveza por favor en étant la preuve ultime, mais il n’entrave rien aux caractères japonais. Pourquoi proposer une telle option si celle-ci est inutile ? La question est entière et c’est déjà avec un handicap que commence ce test de Cyber Citizen Shockman. Mais baste, nous sommes un testeur de ressource et un tour sur le ternet nous apprend que nous incarnons Tasuke et Kyapiko, deux androïdes construits par le Doc. (pas celui de Fun Radio dans les années 90, rassurez-vous).
Nos deux androïdes, étudiants le jour, se transforment en superhéros robotique le jour où les armées de Dark Skull tentent d’envahir leur ville tout en prenant en otage quelques citoyens, on n’est jamais trop prudent. Si les robots, les missiles et les dragons ne suffisent pas, mieux vaut avoir un plan de repli. C’est juste le B.A. BA du conquérant de monde tel qu’expliqué dans le livre salué par la critique : Conquérir le monde par Cortex aux éditions du Minus. Bon okay, je brode un peu sur la fin.
Deux boutons sur une patinoire
Nous démarrons donc nos aventures en ville. Nous pouvons choisir notre quartier de départ parmi quatre avant de progresser vers la forteresse du mal situé cinq lopins plus loin. Nous pouvons, après chaque niveau, réparer notre robot, acheter une amélioration pour enfin décider du prochain lieu que nous allons visiter, ajoutant ainsi, pour les abonnés de longue date à « fais-moi mal magazine » quelques minutes de souffrance supplémentaires. Car oui, une fois Joy-Con en main, le constat est accablant et explique sans doute pourquoi cet épisode n’a jamais franchi les frontières de l’archipel nippon. La prise en main de nos avatars est catastrophique.
La PC-ENGINE possédait une manette relativement proche de ce que proposait en son temps la NES, à savoir deux boutons et une croix directionnelle auxquels s’ajoutent un bouton Start et un bouton Select. Nous allons donc pouvoir sauter et attaquer avec ces boutons, c’est classique et des monuments de l’action-plateforme sur l’aîné de Nintendo, tel Megaman 2, ont su montrer à quel point il n’était pas nécessaire d’en proposer davantage pour créer un titre intemporel. Sauf qu’il faut se montrer implacable avec la prise en main, ce que ne propose pas absolument pas Cyber Citizen Shockman. Notre avatar donne constamment l’impression d’avancer sur une patinoire.
Chaque sollicitation de notre part entraîne un déplacement durant une seconde supplémentaire une fois que notre appui sur la croix est terminé. Et nous ne parlons pas du temps d’arrêt d’un Mario lorsque nous le faisons courir. Il est impossible de courir et nos déplacements sont toujours très lents, malgré tout, ils se révèlent imprécis au possible, et cela dès les premières secondes de jeu. Ajoutez à cela des pièges classiques demandant de la précision et vous obtiendrez un nombre de morts dus à ces déplacements vraiment frustrants.
La seconde catastrophe concerne les hitbox. Celles-ci sont tellement réalisées à la va-vite que nous touchons nos adversaires alors que notre arme ne les touche pas et a contrario, ceux-ci, et notamment les boss, aux formes plus travaillées, nous mettent des dégâts sans que les couleurs de notre sprite soient en contact avec les leurs. Nous comprenons vite que ces hitbox ne sont que des rectangles correspondants à celui du sprite sans aucune considération pour les pixels inactifs de ceux-ci. Le résultat est encore une fois frustrant et pénible.
Le CRT en RTT
Ajoutons à cette litanie un level design d’une platitude lassante dans des niveaux finalement très courts qui ne nous demandent de prendre du temps que pour ne pas subir inutilement des dégâts et réussir à avancer finalement assez facilement pour un jeu de cette époque. L’occasion de nous rendre compte du manque d’imagination des développeurs de l’époque. Les monstres sont toujours les mêmes et apparaissent toujours dans les mêmes configurations. Les boss sont encore plus symptomatiques de ce problème puisque, à la couleur près, ils sont tous identiques hormis le boss de fin.
Les graphismes de l’époque n’ont rien de transcendant, les décors de second plan sont assez chargés et ont une fâcheuse tendance à cacher les éléments actifs du premier plan nous induisant régulièrement en erreur lors des phases de plateforme. Frustration quand tu nous tiens… La bande-son est dans la même veine, si elle ne gêne en rien notre progression, elle est très loin d’atteindre les sommets chiptune du genre, #Willy’s Castle. Et finalement le seul point positif du jeu d’origine concerne la possibilité de se déplacer librement dans la carte pour ainsi revenir sur nos pas et terminer l’ensemble des douze niveaux avant de confronter le boss final.
Ce portage du jeu d’origine est loin d’apporter quoi que ce soit d’intéressant. Nous passerons sur le filtre CRT qui ne sert toujours strictement à rien et dont nous ne comprenons toujours pas l’omniprésence dans les titres de Ratalaika tandis qu’aucune option de lissage n’est encore présente. Seules les illustrations apportent un peu de joie aux amateurs de retrogaming tandis que les options de Rewind et accélérations du framerate ont l’avantage d’être facilement utilisables, nous permettant de corriger facilement nos petites erreurs.
Conclusion
Le genre de l’action-plateforme a connu beaucoup de hauts et de bas, peu importe l’époque que nous considérons. Ce Cyber Citizen Shockman, sorti un an après le hit intemporel qu’est Megaman 2, est un amalgame de ce qu’il ne faut pas faire pour être réussi. Ses contrôles sont dignes d’une patinoire olympique, son level design est bien trop plat et sa diversité de monstre et de boss nous renvoie à l’aube des jeux vidéo. De plus ce portage n’apporte qu’un livret non-traduit du japonais ainsi qu’un filtre CRT nous laissant toujours aussi dubitatifs. Bref, un jeu qu’il vaut mieux éviter, peu importe son amour pour le retrogaming.
LES PLUS
- La carte des niveaux que nous pouvons parcourir librement
- Un titre qui nous laisse du temps pour profiter des deux Zelda de la Game Boy Color
LES MOINS
- Les graphismes sont trop chargés et gênent la visibilité
- Les ennemis sont trop peu nombreux
- Les boss ne font que changer de couleur
- La bande-son n’a rien de mémorable
- La prise en main est catastrophique
- Le gameplay est assez pauvre
- Le level design manque cruellement d’idée
- Les ajouts de cette version ne sont disponibles qu’en japonais
- Le filtre CRT… non vraiment il va falloir l’oublier