Comme Demons Of Asteborg dont il est la préquelle, Astebros est sorti initialement en cartouche sur cette bonne vieille console Sega, j’ai nommé la Megadrive. Non pas en 1992 comme nous avons pu le croire à la vue des images, mais en 2023. Oui, oui, pincez-vous si vous voulez, il y a eu un tout nouveau jeu Megadrive qui est sorti en 2023 !
Pour ceux qui n’ont pas le matériel d’origine, nous retrouvons à peine quelques mois plus tard le jeu sur Nintendo Switch via l’eShop, sans retouche en dehors de quelques filtres, histoire de ne pas altérer l’expérience de ce revival néo délicieusement rétro.
Astebros réunit en un seul bouquet toutes les fragrances de la nostalgie. Rappelez-vous de ce temps ancien, béni des dieux, où l’on pouvait se ruiner sur les jeux d’arcade Sword and Sorcery de la grande époque des bornes estampillées CPS de Capcom. C’était le début des années 90, le pixel art était doré à point, croustillant sous la dent et les musiques tintinnabulaient alors que nous progressions fiévreusement dans les couloirs d’une campagne malfaisante ou d’un sombre château gothique.
Mais le développeur français Neofid Studio s’est montré plus audacieux que jamais en apportant une touche toute nouvelle, et peu casse-gueule en y repensant : ils ont mêlé au genre action/plates-formes une formule roguelite des plus modernes. Nous attendent donc niveaux générés aléatoirement, mort qui nous renvoie vertement à notre campement, craft et farming intensif pour, nous l’espérions avant d’y jouer, une addiction totale…
Sword, and sorcery, and roguelite !
Pour le pitch d’Astebros, nous incarnons au choix l’un des trois héros, que l’on peut sélectionner entre chaque donjon pour, mission royale oblige, sauver une poignée de soldats et libérer le royaume d’Asteborg du joug des monstres et autres démons particulièrement hirsutes, vociférants et vilains.
Trois héros, trois manières de jouer bien sûr ! Le ranger peut user de mousquets, d’arcs et autres arbalètes, tout en convoquant un petit familier pour combattre à ses côtés. Le chevalier en armure, nettement plus lourd, privilégie le corps à corps -évidemment- tout en pouvant parer les coups. Ensuite, nous avons le mage qui ressemble, trait pour trait, à Orko (avec des jambes en plus), le merlin maladroit et pote de Musclor dans les Maîtres de l’Univers ! Il dispose d’une faible résistance, mais a quelques attaques puissantes et variées dans son escarcelle.
Alors, mettons tout de suite nos gros pieds poilus d’hobbit joufflus dans le plat de tartiflette gratinée au feu de bois : bon ou mauvais roguelite ? Le côté généré aléatoirement aurait pu être rédhibitoire pour les réfractaires au genre, mais il faut avouer que les niveaux (au nombre de 8), quel que soit leur agencement, sont particulièrement agréables à parcourir. Déjà, ils ne sont pas interminables en se composant d’une poignée de salles, incluant celle du sacro-saint boss et des salles octroyant des bonus (avec une contrepartie).
Pour ces dernières, elles s’ouvrent à l’aide de clés (qui se font parfois désirés) et ce sont des points d’intérêts capitaux si le désir de survivre un minimum dans le donjon et au-delà se fait sentir. Nous avons droit à la gentille fée qui refile des cœurs permanents (clairement indispensable), la prison qui permet de libérer les futurs camelots qui animeront votre campement ou bien un caveau (c’est à la bombe qu’on l’ouvrira et non avec une clé) nous proposant un gros mob à abattre pour up-grader son arme.
Le forgeron, qui sera bien au chaud, près du feu, une fois libéré, pourra nous procurer des armes de plus en plus puissantes contre des plans et des matériaux divers, propres aux niveaux. Ce qui nous oblige à fureter partout. Du moderne, et de l’efficace.
Il faut bosser les boss !
Devant la difficulté des débuts d’Astebros, avec seulement trois cœurs et une arme asthmatique (et/ou rouillé), farmer ne sera pas un gros mot. Ce sera même fortement conseillé pour parcourir les niveaux les plus durs sans trop de casse avant de se mesurer aux boss.
Pour parler uniquement de ces fameux boss, il y en a deux par niveau. Il faudra donc au minimum parcourir les donjons deux fois pour obtenir les orbes que ces affreux jojos libèrent, ces orbes étant une condition sine qua non pour débloquer les niveaux suivants.
Autant le crier sur tous les toits, les « patrons » d’Astebros sont certainement un des gros points forts du jeu : ils sont superbes, incarnent particulièrement les niveaux qu’ils défendent coûte que coûte : la sorcière et son chaudron bouillonnant, le clown maléfique monté sur ressort dans sa boîte ou encore l’énorme crapaud samouraï. Ils sont assurément, chacun à leur manière, bien marquants.
Les combattre n’est pas de tout repos, le jeu exige d’étudier un minimum leurs patterns et leurs attaques, nous incitant au passage à maîtriser à la perfection le double saut et le dash (qui nous rend invincible une fraction de seconde). Heureusement, l’aléatoire chez les patrons n’est pas de mise, ou très peu et l’apprentissage finit toujours par payer.
L’autre excellent point, qui permet d’espérer un minimum face à un roguelite qui nous renvoie au campement de base à chaque mort : les téléporteurs devant les portes des boss.
Contre une belle somme de pièces d’or pour les activer, ces téléporteurs nous permettent par la suite de revenir affronter le boss sans devoir refaire pour la énième fois le niveau. Même si pour le puriste, c’est une forme d’entorse au genre, c’est parfait, idéal même pour jouer en mode die-and-retry décomplexé ces phases de boss souvent ardues.
Pour parler des contrôles, ils sont bons et précis, surtout à la croix (les touches en bas du stick). Au stick analogique, c’est plus souple, mais nous avons pu perdre parfois en précision. Dans tous les cas, double saut et dash sont particulièrement réactifs. Nous tenions toutefois à signaler que l’attaque sautée nous a posé parfois quelques difficultés et quelques sueurs froides : alors que nous appuyions comme des sauvages sur les deux boutons de saut et d’attaque, l’un des deux ne répondaient tout simplement pas. Question de timing ? Certainement.
Globalement, l’expérience d’Astebros est exigeante et demande un brin d’abnégation pour progresser, le jeu se montrant parfois vache avec certains malus bien désagréables (coucou le diable !) ou un choix d’armes imposé en début de niveau pas forcément à notre goût (le libre choix de l’arme aura lieu bien plus tard) mais le plaisir est au rendez-vous. Le mieux est de faire profiter, si possible les copains, pour une bonne coop des familles. À plusieurs ou en solo, l’aventure se parcourt sans lassitude aucune, entre 5 et 10 heures selon votre skill. Cela peut paraître court, mais chaque seconde, chaque minute, sera intensément vécu.
C’est dans les vieux pots rouillés qu’on fait les meilleures soupes aux champignons de la région
Pour terminer ce tour de table, intéressons-nous aux atours que prend le jeu pour nos sens, et plus précisément, nous allons nous concentrer sur la partie graphique d’Astebros. Le pixel art respecte à la lettre les limitations techniques de la Megadrive et se retrouve tel quel sur Switch, dans son jus. Le jeu de 2023 semble d’époque, vraiment comme s’il n’avait été découvert que récemment après un long oubli.
C’est référencé pour sûr. Le bestiaire en pixels convoque le grand imagier de l’Heroic Fantasy. Nous les avons déjà croisés quelque part (dans Super Castlevania IV peut-être ou bien sûr Super Ghouls’n Ghosts), mais non, ils ont bien une petite personnalité propre à l’univers rond d’Asteborg, royaume créé pour la série par le studio. Et les décors font dans le classique 16-bit avec un thème bien tranché par niveau : manoir hanté, cirque démoniaque, forêt magique, forges infernales, château gothique…
Sur Nintendo Switch, la qualité graphique est inégale selon si on y joue en mode portable ou sur grand écran. En mode portable, c’est charmeur, rétro tout en étant détaillé et soigné. C’est un véritable régal pour les yeux et les amoureux du rétro seront aux anges, mais aussi pour les autres, s’il n’ y a aucune allergie aux pixels.
Mais en mode docké, le constat est nettement plus décevant. Clairement, le jeu n’est pas adapté aux grands écrans modernes, la basse résolution et le peu de couleurs affichées rendant parfois indistincts les décors de fonds et légèrement informe certaines bestioles. La présence de filtres pour reproduire l’effet des téléviseurs cathodiques ou lisser les pixels n’améliore, hélas, pas l’image en produisant une sorte de flou ou des lignes grossières. Nous avons même décelé quelques glitchs graphiques, sous forme de brisures, pas très agréables à l’œil, avec le filtre mal nommé « smooth ». C’est dommage.
Musicalement, les thèmes 16-bit d’Astebros sont excellents, bien travaillés d’un niveau à l’autre et ajoutent beaucoup d’entrain à l’aventure. Ça reste bien entendu du format « midi » un poil plus élaboré que ce que nous avons l’habitude d’entendre sur Megadrive, mais les thèmes et l’effet rétro marchent du tonnerre avec ce que nous voyons à l’écran.
Conclusion
Jeu d'action/plates-formes destiné à la Megadrive (et sorti sur cette honorable machine il y a quelques mois), Astebros convoque tous les fantasmes inavouables des amoureux de l'Heroïc Fantasy à l'ancienne, en les mêlant de manière subtile au genre en vogue d'aujourd'hui : le roguelite. C'est réussi, prenant, intelligent et addictif à souhait. Mentions spéciales aux boss. Dommage qu'en mode grand écran sur Switch, le jeu perd un peu de sa superbe. Nous vous conseillons d'y jouer en mode portable pour profiter un maximum du pixel art.
LES PLUS
- Un pixel art, charmeur, tout droit venu des années 90
- En mode portable, c'est joli !
- Un background sword and sorcery à l'ancienne, qui plaira aux vieux de la vieille
- Trois héros, trois manières de jouer
- La formule roguelite maîtrisée à souhait
- Des donjons très sympas, et pas trop longs
- Des boss, pour la grande majorité, réussis et marquants
- Du challenge !!!
LES MOINS
- Une seule partie sauvegardée
- L'attaque sautée, à moins que nous soyons un peu manchot pour la maîtriser
- Basse résolution et limite de couleurs, comme sur Megadrive !
- Les filtres n'améliorent pas la qualité de l'image sur grand écran, bien au contraire
- Le jeu se montre volontiers vachard (coucou le diable, coucou la toute fin !), et ça peut vraiment faire mal.