Il y a 6 mois, Capcom annonça l’arrivée d’une seconde trilogie de la série d’aventure textuelle Ace Attorney. Une trilogie regroupant les 4ème, 5ème et 6ème opus de la série sortis initialement sur Nintendo DS et Nintendo 3DS. Une trilogie avec la présence du légendaire avocat de la défense Phoenix Wright mais dont la vedette n’est autre que le jeune avocat de la défense Apollo Justice. Une trilogie plutôt attendue par les fans pour patienter une éventuelle annonce de 7ème opus majeur de la série, annonce qui tarde à venir si elle devait exister. Dans cette attente, après une première trilogie regroupant les 1er, 2ème et 3ème opus de Ace Attorney, Capcom nous propose le reste de la série avec Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy sur Nintendo Switch. Nous avons traversé l’ensemble des jeux de cette seconde trilogie afin de constituer un nouveau dossier solide à présenter maintenant à la cour.
Objection ! Votre honneur, la justice est enfin totalement disponible en français !
Il y a plus de 10 ans, une première compilation HD des 3 premiers opus de Ace Attorney était proposée sur smartphone puis Nintendo 3DS avant d’arriver sur console de salon en 2019. Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy regroupe les 3 opus suivants et il est directement traduit dans toutes les langues. Certains opus sont même pour la première fois traduits dans d’autres langues que le japonais et l’anglais. Nous parlons notamment de Ace Attorney: Dual Destinies, 5ème opus de la série, puis de Ace Attorney: Spirit of Justice, le 6ème et dernier opus numéroté en date. Deux opus exclusifs à la Nintendo 3DS qui avaient soulevé une partie des fans occidentaux pour ne pas avoir été traduits autrement qu’en anglais et proposé uniquement en dématérialisé. Tout est désormais traduit de base sur la cartouche. Une traduction parfois étrange faisant penser à l’utilisation de quelques technologies modernes mais aussi d’autres nuances et subtilités bien propres à une traduction plus traditionnelle. Notamment à travers l’excellente traduction des jeux de mots habituels de la série et leur adaptation à chaque langue et culture du monde.
Deux jeux qui remettaient en avant le légendaire Phoenix Wright et également la mention “Phoenix Wright” dans leur titre en occident comme un aveu d’échec de proposer une succession avec Apollo Justice lors du 4ème opus simplement nommé Apollo Justice: Ace Attorney à l’époque sur DS. Tandis qu’au Japon, le titre de la série ne mentionnant aucun héros mais indiquant une simple numérotation permet de mieux comprendre la continuité puis ce qui est un opus principal ou un spin-off. Malgré tout, c’est en assumant désormais légèrement mieux cette succession que cette seconde trilogie revient sous le nom Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy, bien que le nom de Phoenix Wright reste présent sur les écrans titres des autres jeux. En sachant ceci et en considérant la numérotation, il est évident que jouer à la précédente trilogie est recommandé pour avoir toutes les références en tête, sans pour autant être une obligation. Cela grâce à de nouvelles affaires et plusieurs personnages inédits permettant à chacun de démarrer de zéro.
Dès le lancement du jeu nous avons la possibilité de choisir de lancer un des 3 derniers jeux de la série séparé par trois fenêtres d’écran titre différent. Une présentation des écrans titres et de chaque fenêtre est bien plus réussie que la première trilogie et même légèrement customisable. Chaque fenêtre nous accueille avec le thème musical principal de chaque opus et même un thème inédit pour le musée. Pas d’écran statique mais une vidéo présentant chaque jeu se joue. Nous pouvons changer chaque écran avec des illustrations spéciales de chaque jeu ainsi que la musique de fond. Il est possible de lancer une nouvelle partie d’emblée mais contrairement à son prédécesseur, il n’est pas nécessaire de jouer toutes les affaires. En fait, 90% voire 95% du jeu est disponible au lancement, incluant même directement les affaires et contenus DLC des jeux 3DS. Les éléments à débloquer sont de l’ordre du bonus inédit dont nous vous laissons la découverte.
Sur chaque écran titre, nous pouvons sélectionner la catégorie “épisode” pour jouer l’affaire qui nous intéresse. Chaque affaire est divisée en chapitres et en nombreuses sous-parties permettant une reprise de jeu très confortable si jamais nous avions un bug de sauvegarde quelconque. En plus des 3 écrans titres dédiés aux jeux, une 4ème fenêtre est également disponible et représente le “Musée”. C’est dans ce musée que nous avons accès à de nombreux bonus très typiques de ce genre de compilation et faisant plaisir aux fans. Une partie de ces bonus sont habilement répartis sur l’écran titre des différents jeux permettant de ne pas nécessairement avoir besoin d’aller spécifiquement sur le Musée, notamment pour écouter les OST de chaque jeu. La navigation est d’ailleurs facilitée au point de ne même pas être obligé d’être sur l’écran titre d’un jeu précis pour visionner ses bonus. Quelques éléments du musée nécessitent toutefois d’y être pour être consultés. La majeure partie des illustrations et artworks sont notamment présents dans le musée.
Il y a aussi les distinctions, sortes d’objectifs annexes nous permettant d’obtenir des trophées afin de donner un autre sens à cette nouvelle trilogie. Un élément qui plaira surtout aux fameux chasseurs de trophées. Puis nous avons un studio dans lequel nous pouvons nous rendre pour utiliser les différentes animations de tous les personnages des jeux, les différents décors des opus, prendre des poses puis mettre des voix dessus. Un genre de studio pour créer nos propres “mèmes” avec l’interjection “Objection !” par exemple. Ceci étant dit, modérons cette idée de “création” puisqu’il n’y a pas d’option de partage. Il s’agit surtout de rigoler en jouant tout seul avec nos personnages favoris, bien que les malins trouveront certainement une manière de partager leurs mèmes. Pour un connaisseur de la série, le musée est bien fourni et son contenu équivaut à plusieurs artbooks et OST de jeu avec même les musiques provenant des représentations orchestrales dont les sessions ne se sont jamais produites en occident. Un contenu peu cher payé finalement à travers cette seconde trilogie.
J’te tiens ! Du début à la fin de l’arc Apollo Justice
L’entrée en la matière est ainsi très réussie et nous avons presque envie de pardonner les erreurs de l’éditeur en occident. Nous disons bien presque, l’amertume de la localisation uniquement anglaise de The Great Ace Attorney Chronicles reste encore en travers de la gorge. Mais quittons le Londres du XIXème siècle pour revenir au présent. Commençons par parler de Apollo Justice: Ace Attorney, le 4ème opus de la série. Celui-ci démarre 7 ans après les événements de Phoenix Wright: Ace Attorney – Trials and Tribulations, le 3ème opus de la série. Nous incarnons le jeune avocat Apollo Justice expressément demandé par le légendaire Phoenix Wright pour représenter sa défense. Notre ancien avocat de légende, devenu pianiste d’un bar et joueur de poker invaincu, est désormais accusé de meurtre. Un premier mystère faisant partie d’une série d’affaires plongeant Apollo Justice dans ce qui est un des éléments du début de l’ère sombre de la justice.
Dans Phoenix Wright: Ace Attorney – Dual Destinies, notre légendaire avocat de la défense récupère son badge d’avocat et reprend du service. La première affaire fait exploser une salle d’audience et nous présente une nouvelle cliente accusée à tort de cet attentat à la bombe. Cette affaire nous présente aussi le retour de Phoenix mais il introduit également un nouveau membre au cabinet d’avocat. Un autre membre en plus de Apollo Justice déjà présent dans le précédent opus, il s’agit même d’une nouvelle collègue pour Apollo et une nouvelle apprentie pour Phoenix Wright. Notre nouvelle protagoniste se nomme Athena Cykes, elle entend bien bouleverser les affaires grâce à ses études en analyse psychologique qu’elle compte bien utiliser devant la cour. Cette dernière se trouve être une proche amie de notre cliente de la première affaire. Cette affaire n’est que l’intro et le début d’un autre élément lié à la nouvelle ère sombre de la justice présenté dans Apollo Justice: Ace Attorney. Un élément lié au nouveau procureur et détenu, Jack Lamenoire et justifiant le retour de Phoenix Wright.
Dans Phoenix Wright: Ace Attorney – Spirit of Justice, la première affaire tente de nous faire voyager dans une contrée éloignée : le royaume de Khura’in, un pays dans lequel les visions de la prêtresse via les séances de divination priment sur les lois. Des séances permettant de présenter à tous les derniers instants d’un défunt et qui permet toujours à l’accusation de désigner le véritable coupable d’une affaire. Du moins selon les croyances de Khura’in. Malgré l’opinion publique, Phoenix Wright décide de prendre la défense de son jeune guide à Khura’in, accusé de meurtre. Il fera face à ces séances de spiritisme afin de faire éclater la seule vérité. Notre avocat prend également le risque d’être condamné à mort avec son client en vertu de la Loi de Complicité de la Défense en vigueur au royaume de Khura’in. Une première affaire qui est également la première d’une autre série de mystères faisant la conclusion de cette trilogie centrée sur Apollo Justice, et cela malgré le nom de Phoenix présent sur le titre des 5ème et 6ème opus de la série.
Cela ne signifie pas nécessairement que notre avocat légendaire ne joue aucun rôle dedans, nous sentons d’ailleurs l’évolution et la maturité acquise par ce dernier. Nous sentons aussi une volonté des auteurs du scénario à vouloir centrer les propos sur Apollo Justice, quitte à presque forcer parfois son apparition. Puis la tentative maladroite de ramener Phoenix Wright, lui amener des pseudo-points de développement alors que c’est désormais un vétéran et que son récit est désormais conclu dans la première trilogie. Une écriture qui se rate un peu dans l’exécution puisque Phoenix reste trop présent alors même que l’arc narratif et les projecteurs doivent être sur Apollo Justice. Comme si les auteurs voulaient aller de l’avant sans totalement rompre avec le héros de la précédente trilogie, en ajoutant à cela la conscience de la popularité de la licence en occident grâce au personnage de Phoenix Wright faisant que la licence se retrouve scénaristiquement entre 2 chaises.
Quid d’Athena Cykes ainsi que de Jack Lamenoire qui sont très bien amenés dans le 5ème opus et proposés comme une autre relève à Phoenix Wright, pour finalement être quasi-transparents dans le 6ème jeu ? Nous avons une réelle impression d’avoir un arc écrit pour Apollo Justice à travers ces 3 jeux mais la réalisation est moins bonne que la première trilogie dans cette dispersion de l’intrigue et des affaires sur 3 protagonistes. Faisant que Apollo semble avoir ironiquement moins de présence dans sa trilogie que Phoenix Wright dans la sienne. Ainsi, nous sentons l’absence de Shu Takumi à l’écriture des 3 premiers jeux, qui semblait avoir une vision plutôt claire du récit de Phoenix Wright et son entourage sur les 3 premiers titres de la série Ace Attorney. Celui-ci était superviseur sur Apollo Justice et avait maintes fois exprimé le fait que l’histoire de Phoenix Wright était bien venue à terme.
À titre de comparaison, les nouveaux auteurs en charge de cette seconde trilogie semblent suivre une direction moins précise, il est même possible que Apollo Justice: Ace Attorney n’ait pas été pensé comme une trilogie et que le tout fut brodé au fur et à mesure à travers les 5ème et 6ème jeux. Ceci étant dit, le début et la fin de l’arc narratif autour de Apollo Justice est excellent, celui-ci a potentiellement été mûrement réfléchi depuis plusieurs années. Pour dire les choses autrement, une partie de Apollo Justice: Ace Attorney puis de Phoenix Wright: Ace Attorney – Spirit of Justice semble avoir bénéficié d’un soin particulier, tandis que le milieu est assez inégal sans pour autant être totalement inintéressant. Il s’agit ensuite d’un ressenti que nous avons eu mais il est probable que les opinions divergent à ce propos. Ceci étant dit, nous recommandons à tous de faire la série Ace Attorney qui reste un très bon exemple de proposition originale dans le genre du roman visuel avec un récit de très bonne qualité qui vous tiendra en haleine sur plus d’une vingtaine d’heures par jeu soit bien plus de 60h de jeu, notamment pour les chercheurs de trophées.
Silence ! Retour sur les mécanismes, votre Alopécie
Similaire à la première trilogie, nous pouvons confirmer une prise en main TV suffisamment ergonomique à la manette pour être appréciée sur grand écran. Toutefois, sur Nintendo Switch, nous avons aussi la possibilité de jouer en portable avec l’écran tactile pour un gameplay bien plus adapté à quelques points près. Notamment des boutons trop petits à toucher avec nos gros doigts. Ceci étant dit, il est possible de combiner le gameplay des Joy-Con et du tactile pour une ergonomie maximale. Un gameplay plutôt bien adapté en toute circonstance en TV comme en portable, nous laissant penser que la version Switch de Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy est la meilleure à faire, au-delà du visuel pour ceux qui aiment les ultra hautes définitions, qui ont la capacité de discerner tous les pixels d’un écran et qui ne jurent que sur des chiffres techniques.
Nous retrouvons ainsi les bases solides de gameplay de la série alternant phases de procès puis phase d’investigation. Le retour des contre-interrogatoires épiques des témoins face à la cour. Une phase dans laquelle nous attaquons chaque bout de témoignage pour faire apparaître une contradiction et présenter une pièce à conviction de notre dossier afin de démolir le témoignage et s’approcher de la vérité d’une affaire. Une base de gameplay à laquelle s’ajoute la phase d’investigation dans laquelle nous prenons le temps de se déplacer entre différents lieux pour enquêter, recueillir des pièces à conviction et des informations provenant de témoins directs ou non d’une affaire. La nouveauté et les possibilités de la DS avaient suffisamment inspiré les développeurs pour proposer toutes sortes d’expériences d’enquête inédites à la série et au genre dans Ace Attorney: Apollo Justice. Nous retrouvons ainsi de nombreux mini-jeux autour de la thématique de la science médico-légale dans le 4ème opus de la série.
Mini-jeux qui sont toujours présents mais moins proposés par la suite, une absence surtout notable dans le 5ème jeu. Ces éléments sont introduits par l’inspecteur Ema Skye, personnage introduit pour une affaire bonus dans la version DS du premier Ace Attorney afin de présenter les nouvelles possibilités offertes par la console à l’époque. Le personnage revient comme inspecteur principal de Apollo Justice: Ace Attorney et justifiant ainsi une présence plus importante de ces “examens médico-légaux”. La possibilité d’utiliser de la poudre en tapotant l’écran pour relever des empreintes digitales, relever des empreintes de chaussure ou passer la zone de crime au luminol. Des éléments qui s’intègrent très bien dans l’univers du jeu, qui permettent de sentir l’évolution scientifique des investigations puis d’apporter de la variété de gameplay lors des phases d’investigation.
Des éléments qui s’éclipsent dans Dual Destinies avec l’absence de Ema Skye, remplacée par le nouvel inspecteur Justin Brillant. Puis Spirit of Justice remet cela sur le tapis en faisant un peu évoluer la formule avec le retour de Ema Skye non plus inspecteur mais finalement diplômée et membre de la police scientifique. Une base de gameplay lors des investigations à laquelle s’ajoutent des mécaniques propres à l’avocat que nous incarnons à chaque affaire et définies par le scénario. Ces mécanismes enrichissent les possibilités sur les différentes phases de gameplay du jeu. Apollo Justice est sensible aux mensonges des personnes autour de lui et possède un bracelet renforçant cette sensibilité. Il nous arrive ainsi d’avoir une phase de gameplay dans laquelle la concentration de Apollo est maximale au point que les témoignages ralentissent et qu’il peut déceler chaque fait et geste d’un témoin.
Nous devons ainsi scruter chaque témoin au millimètre alors que le témoignage défile afin de mettre en évidence un tic nerveux du témoin embourbé dans son mensonge. Cela permet de changer le témoignage, attaquer les nouvelles contradictions et parvenir à la vérité. Dans le 4ème jeu, la mécanique se jouait surtout en procès et pouvait devenir relativement cruelle avec des tics très difficiles à voir et apparaissant sur une légère frame d’animation des témoins lors d’une déclaration très précise. Les opus qui suivent simplifient la chose. Tout d’abord le procureur Jack Lamenoire ne permet que de rares interventions du pouvoir d’Apollo Justice lors des procès. Du coup, la mécanique apparaît de temps à autre lors des investigations et les développeurs ont fait en sorte de directement limiter l’analyse à la ligne de témoignage faisant apparaître le tic nerveux en question. Une dimension trop facile et moins gratifiante mais aussi moins frustrante pour une expérience plus équilibrée et mieux rythmée.
Par ailleurs, Phoenix Wright revient avec son Magatama de la famille de médium Fey, lui permettant de percevoir lorsqu’une personne cache un secret au fond de son âme. Lorsque cela arrive, il voit apparaître des cadenas autour du témoin. Plus le secret est lourd, plus le nombre de cadenas est important. Dans les termes du jeu, ce sont des verrous-psyché. Cette phase de gameplay intervient en investigation et Phoenix Wright peut briser ces verrous en interrogeant les témoins. En présentant des pièces à conviction, il peut briser les contradictions et faire éclater la vérité dans les propos d’un personnage. Ce sont des petites phases de contre-interrogatoire intelligentes hors des procès pour briser la monotonie des phases d’investigation. Nous avons fait le tour des bases de la série sur Nintendo DS du 1er au 4ème jeu. Toutefois, Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy regroupe le 4ème, 5ème et 6ème opus. Il est temps de s’attarder également sur les subtilités des opus 3DS.
Assez ! Il est temps de procéder à une analyse psychologique et spirituelle de la trilogie
Athenas Cykes, nouvelle recrue de l’agence à tout faire Wright & Co., a également sa spécificité. Notre nouvelle n’est pas seulement une avocate mais une étudiante en psychologie. Ainsi, Athena fait évoluer la formule Ace Attorney sur un domaine très actuel après la médecine légale amenée par Ema Skye. Si Apollo est capable de percevoir les mensonges, Athena est capable de percevoir les émotions des gens à leur voix. Elle possède le Lunatix : une machine qu’elle peut démarrer pour analyser les émotions et les informations que notre héroïne enregistre. À partir de ces informations, la machine nous montre également des images provenant de la mémoire des témoins. Il arrive que des témoignages semblent n’avoir aucune contradiction en apparence mais des dissensions émotionnelles. C’est dans ces moments qu’Athena intervient et active le Lunatix pour une séance de thérapie.
En activant le Lunatix, même sans être dans la tête d’Athéna, nous pouvons voir les émotions des témoins ainsi que les interférences que ceux-ci ont sur le témoignage. Ces interférences sont calculées en pourcentage et le but final des séances de thérapie est d’obtenir un témoignage sans interférence émotionnelle incohérente. La machine nous répartit tout ça grossièrement en 4 émotions : la joie, la colère, la peur et la surprise. Ainsi commencent les séances de thérapie psychologique avec le Lunatix. Il y a plusieurs subtilités de gameplay liées au Lunatix. La première étant de mettre en contradiction les émotions d’un témoin avec ses propos. Imaginons qu’un témoin déclare avoir ressenti de la tristesse en voyant le corps sans vie de la victime mais que le Lunatix nous montre en réalité de la joie. Il s’agit ainsi de pointer les propos du témoin et de mettre en avant cette joie ressentie afin d’avoir une modification du témoignage.
À chaque contradiction, le témoin modifie son témoignage et apporte même plus de précision. De nouvelles informations que notre héroïne enregistre dans le Lunatix pour également mettre à jour les données. Il arrive qu’une émotion en particulier (ou alors toutes les émotions) submerge soudainement un témoin et le fait tomber dans une détresse émotionnelle telle que les interférences en deviennent chaotiques. À ces occasions, nous devons potentiellement présenter un élément de leur témoignage illustré par le Lunatix mal interprété par les témoins à cause de leur détresse émotionnelle. Puis lors de potentiels dénouements, il s’agit de présenter des pièces à conviction pour faire la lumière entre les faits réels et les interprétations émotionnelles des témoins. Les thérapies menées par Athena apportent une brise de nouveauté pour les mécaniques lors des procès tout en restant terre à terre dans leur approche en explorant simplement le domaine psychologique.
Une mécanique opposée au côté spirituel des verrous-psyché de Phoenix Wright mais surtout aux séances de divinations interprétées par la prêtresse et princesse du royaume de Khura’in : Rayfa Padma Khura’in. Nouvelle mécanique du 6ème jeu de la série, les séances de divination permettent de voir les derniers instants d’un individu dans le bassin de la cour de justice du royaume de Khura’in. Ceux-ci sont visibles aux yeux de tous et les interprétations de ces derniers instants par la princesse Rayfa font office de vérité absolue pour la population ainsi que la cour de justice du royaume. Politiquement et judiciairement parlant, cela fait que les avocats de la défense sont traités comme des parias en remettant en cause les interprétations divines de la princesse. Sans aller plus profondément dans le lore que nous vous laissons découvrir, parlons plus profondément de cela en termes de cette mécanique de gameplay.
Une fois le rituel et la danse effectués par la princesse terminés, nous posons nos yeux sur le bassin au milieu de la cour pour observer la scène des derniers instants d’une victime provenant des yeux même de celle-ci. Le pouvoir de divination de la princesse étant incroyable, nous voyons même des mots apparaître à divers moments de la scène. Les mots représentent ce que ressent la victime par ses 4 autres sens. En touchant les mots en question, nous voyons les sens concernés. Prenons l’exemple du mot “douleur” apparaissant durant une scène : en mettant notre curseur dessus, nous constaterons que la victime ressent cela par le toucher. Ainsi, sur le bassin nous voyons une scène des derniers instants visibles de la victime accompagnés de divers mots représentant ce que la victime a pu entendre, sentir, goûter ou sentir. En plus de cette scène, nous avons la princesse Rayfa faisant une interprétation orale des derniers instants de la victime.
Durant cette mécanique de gameplay se déroulant dans les cours de justice du royaume de Khura’in, nous devons mettre en évidence les micro-incohérences entre les interprétations de la princesse Rayfa et la scène du bassin. Nous parlons de micro-incohérences puisque plus que jamais avec les derniers instants de la victime visibles sous nos yeux, le sauvetage de nos clients est plus que désespéré. Sachant en plus que nous jouons désormais notre vie face à la cour de justice de Khura’in, la tension est plus que palpable. Malgré la difficulté de la tâche, avec des contradictions qui demandent parfois une observation très fine de chaque scène et ligne d’interprétation, nous passons de micro-incohérences en micro-incohérences modifiant toujours plus les interprétations. Notre but est de prouver qu’un autre scénario devient probable derrière l’ultime expérience vécue par une victime, amenant les procédures à reprendre un déroulement plus normal avec de nouveaux témoins.
Un instant ! Il est temps de tout revisualiser !
Les nouvelles mécaniques de Dual Destinies et Spirit of Justice semblent se présenter comme de nouvelles gimmicks en procès pour enrichir toujours plus le gameplay de la série. Une richesse telle que pareillement au développement maladroit de l’histoire, nous finissons par avoir des mécaniques dont la pertinence varie d’un jeu à l’autre et d’une affaire à l’autre. Contrairement à la première trilogie où les verrous-psyché apparaissent au cours de l’aventure et dont la pertinence ainsi que les révélations qu’elles amènent gagnent toujours plus en intensité. Autre chose qui donne plus d’impact aux verrous-psyché, c’est la perte de “points de vie” comme en procès. Ainsi, un game over peut nous guetter en échouant, contrairement à la recherche de tics, l’analyse psychologique des témoins ou les sessions de divination.
Il y a un ultime élément de gameplay inédit, inspiré de la série Danganronpa, introduit à partir de Dual Destinies, qui intervient à chaque affaire et permet d’avoir des climax gagnant un côté épique jamais vu dans la série : la revisualisation. Encore une fois, nous parlons de simple inspiration sur Danganronpa sur le concept, celui d’avoir un genre de récapitulatif épique de l’affaire vers la fin d’une affaire. Ainsi, en arrivant vers la conclusion d’un procès lorsque nous tenons le coupable mais qu’un ultime élément ne nous permet pas de le coincer, c’est à ce moment qu’il faut appliquer les termes du titre japonais de la série Ace Attorney. C’est à ce moment-là que nos héros affichent leur plus grand sourire et renversent leur réflexion pour parvenir à la conclusion. Dans la phase de “revisualisation” nous participons littéralement à cette réflexion dans un genre de question/réponse impactant et présenté de manière épique pour une conclusion parfois farfelue mais tellement plaisante à voir.
Pareillement aux autres mécaniques inédites de cette trilogie, il est dommage que la “revisualisation” ne sanctionne pas les éventuelles erreurs de raisonnement. Après Apollo Justice, les développeurs se sont sentis obligés de simplifier la progression en proposant une expérience qui sanctionne beaucoup moins nos erreurs, faisant que nous avons infiniment moins de risque de parvenir à un game over. Par ailleurs, contrairement aux premier jeux sur Nintendo DS, nous avons la possibilité de sauvegarder n’importe quand. Ainsi, il est possible très facilement de revenir sur une erreur d’un simple chargement de partie. Nous comprenons que ça contribue à une expérience plus facile mais il est difficile de critiquer cet ajout puisque cela contribue indéniablement à un meilleur confort de jeu et à une expérience bien plus dans l’ère de son temps.
Dans cet élan de modernité et d’expérience plus accessible, nous avons également le mode “Histoire” qui fait carrément le jeu à votre place, permettant une progression plus fluide et aisée. Une option qui change totalement l’expérience pour en faire un genre de simple Visual Novel où l’on appuie sur A puisque le jeu fait toute la réflexion à votre place. Toutefois, difficile de critiquer ce qui est juste une option dont le joueur à la liberté d’activer ou non, c’est une option qui permettra indéniablement à un public de découvrir bien plus facilement la série. Il est vrai que la série avait pour habitude d’être linéaire au point de devenir cruelle en imposant des présentations de pièces à conviction sur des lignes de témoignage précises alors que nous possédions le bon raisonnement.
Nous avons aussi le cas de progression bloquée en ayant manqué une étape ou un dialogue précis de l’investigation. Au final, le seul reproche légitime à faire à ce niveau réside dans la sanction de nos erreurs, moins prononcée pour une expérience bien plus facile que par le passé. Potentiellement aussi des contradictions plus faciles à relever, cela permet une progression plus fluide mais rend aussi la jauge de vie inutile. Cette expérience bien plus facile peut frustrer ceux qui aimaient être un minimum sous pression avec le risque de perdre un procès sans pouvoir prouver l’innocence de son client.
Prends ça ! La vérité de la DS à la Switch
Par ailleurs, sur un autre plan, les jeux originaux étant de base disponibles sur DS et 3DS, au-delà du tactile plus ou moins bien adapté en mode portable sur Nintendo Switch, d’autres fonctionnalités n’existent plus ici bien qu’elles fussent très gadget. Notamment l’utilisation du micro pour crier les répliques clés de nos avocats : “Objection”, “Un instant” ou encore “Prends ça”. Puis l’absence de la 3D stéréoscopique pour une réalisation bien plus volumineuse du jeu et nous immergeant différemment dans l’expérience Ace Attorney. La réalisation désormais en 3D cel-shading sans stéréoscopie de Dual Destinies et Spirit of Justice enlève un certain charme graphique aux jeux. Nous n’avons plus cette même impression de pouvoir toucher les décors si proches de nos yeux ou le côté épique de voir les lettres “Objection” ressortir de l’écran et renforçant les moments où nous retournons les arguments de l’accusation.
De manière similaire à The Great Ace Attorney finalement, nous perdons cela au profit d’un travail HD de grande qualité pour que la trilogie s’affiche joliment sur des écrans de haute résolution, de même pour les nombreuses cinématiques en animation, à partir de Dual Destinies, permettant une mise en scène bien plus réussie des différentes affaires. Au-delà des cinématiques, les modèles 3D et les animations des personnages permettent une mise en scène plus fluide et crédible, comparés à nos bonnes vieilles sprites en 2D. Les couleurs des jeux, les détails des décors et les contours des personnages ressortent mieux, notamment avec un écran OLED pour une réalisation sublime et bien plus digne de notre époque. Malgré une résolution certainement plus basse en portable, le style de la série Attorney camoufle très bien cela et fait que le jeu ne semble souffrir d’aucune différence avec le rendu TV, du moins pour nous qui ne possédons pas de yeux suffisamment aiguisés pour ce genre d’analyse détaillée de pixels. Ceci étant dit, aussi joli soit le travail réalisé, nous comprenons les nostalgiques et amoureux des sprites illustrées en 2D de la série. Les vestiges de cet ancien style sont encore visibles en HD sur le 4ème jeu de la série et 1er jeu de cette trilogie, Apollo Justice: Ace Attorney.
Pour accompagner ce travail visuel HD, rappelons que Ace Attorney c’est une série avec une OST mémorable et de qualité à chaque jeu. Nous avons ainsi 3 jeux et 3 OST à écouter en faisant les jeux, tranquillement sur l’écran titre ou dans le mode musée. Mettez un casque ou des écouteurs pour une qualité optimale de son sur des heures de musiques mémorables avec pratiquement rien à jeter. Dommage qu’il n’y ait pas d’arrangement de thème majeur à écouter dans nos sessions de jeu. Il y a des pistes inédites mais elles relèvent plus de pistes bonus à écouter dans le musée. Ceci étant dit, les capacités sonores de la 3DS étant bien développées, à l’instar de The Great Ace Attorney, l’instrumentalisation moderne des musiques de Dual Destinies et Spirit of Justice n’ont pas nécessairement besoin de retouche ou d’arrangement afin d’être un délice pour les oreilles.
Pour ce qui est de Apollo Justice: Ace Attorney, celui-ci étant le premier et seul jeu développé de base pour la Nintendo DS, nous pouvons percevoir la différence en qualité sonore en comparant aux jeux de la première trilogie parus à l’origine au Japon sur GBA. En comparaison à Dual Destinies et Spirit of Justice, Apollo Justice était l’opus qui avait potentiellement besoin d’une nouvelle orchestration afin de s’aligner sur la qualité sonore du 5ème et 6ème jeu. Rien de grave pour autant, bien qu’ayant quelques sonorités d’une autre époque, l’OST reste de grande qualité. Enfin, mentionnons le courage de proposer un nouveau doublage en français et d’autres langues pour les quelques interjections célèbres de la série ainsi que les quelques cinématiques du jeu. Une certaine chanson est même interprétée dans les différentes langues !
Certains auraient préféré un doublage intégral mais c’est cela aussi le charme de la série Ace Attorney, avoir juste quelques interjections pour bien marquer les esprits. En ce qui nous concerne, nous avons trouvé les voix françaises bien moins bonnes dans leur présence et intonation que les voix françaises de la première trilogie. Bien que Dual Destinies et Spirit of Justice n’aient pas nécessairement de point de comparaison puisque c’est la première fois que les jeux sont traduits en FR, et pourtant c’est l’impression que nous avons en entendant les voix. La comparaison sur la VF de Apollo Justice sur DS et la nouvelle voix ici en revanche est sans appel avec un bel avantage sur les voix originales françaises sur DS.
Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy est disponible sur l’eShop de la Nintendo Switch dès le 25 janvier 2024.
Conclusion
Longtemps au cœur de nombreuses spéculations, la seconde trilogie centrée sur Apollo Justice est finalement une réalité. Alors que Capcom aurait pu se contenter d’un simple travail de relissage comme la précédente trilogie, nous sentons cette fois-ci une volonté de faire plaisir et de se faire pardonner des erreurs du passé. La perfection n’existe pas, la trilogie aurait pu être encore meilleure avec quelques subtilités en plus mais la plupart des défauts sont des choses présentes sur l’expérience d’origine et difficilement retouchables. Malgré tout, l’écran titre de cette nouvelle trilogie nous fait oublier tout ça instantanément et fait office de splendide invitation à se lancer dans les différents jeux pour enquêter et défendre nos clients à travers les différentes affaires qui nous attendent. Puis quoi de mieux qu’un passage par le musée pour souffler un peu entre les affaires. Enfin, la localisation complète du jeu en FR et dans de nouvelles langues invite de nouveaux joueurs, mais aussi tous les fans n’ayant pas pu profiter convenablement de Dual Destinies et de Spirit of Justice dans leur langue d’origine, à les refaire dans les meilleures conditions possibles sur Nintendo Switch. Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy est le jeu d’aventure de ce début d’année 2024 à faire ou refaire absolument !
LES PLUS
- Ace Attorney 4, 5 et 6 avec tous les DLC en un titre
- Dual Destinies et Spirit of Justice traduits pour la 1ère fois !
- Une traduction de bonne facture, référence culturelle et jeux de mots
- Le musée très garni en bonus
- L’écran titre très séduisant
- Un travail HD et 3D haut en couleurs, de très belles cinématiques
- Un gameplay d’une richesse rare dans le genre
- Le tactile disponible en mode portable
- Durée de vie gigantesque, quelques bonus à débloquer
- L’arc Apollo Justice de bonne facture, un final intense !
- Athena Cykes et Jack Lamenoire, nouveau duo charismatique
- 3 OST de très haute qualité
- Doublé en français
- Une nouvelle trilogie Ace Attorney accessible à tous !
LES MOINS
- Y en aura toujours pour défendre le charme de la 2D illustrée
- La 3D stéréoscopique manque quand même…
- Les subtilités de gameplay inégalement mises en avant
- Les tout petits boutons à toucher en mode portable pour le tactile
- Moins de sanction, plus de facilité, moins de game over
- Un arc avec une écriture inégale, moins maîtrisé que le 1-2-3
- Quelques affaires inutiles
- Des nouveaux personnages qui deviennent vite transparents
- On aurait aimé des arrangements sur l’OST d’Apollo Justice
- Un nouveau doublage français avec un casting pas très convaincant