Aujourd’hui, nous allons vous conter une histoire proposée par le studio indépendant américain Wadjet Eye Game en 2018. Une histoire assez récompensée sur la scène indépendante et qui est finalement arrivée sur Nintendo Switch en 2021. Une histoire paranormale sur un monde inspiré de notre réalité. Un récit que nous avons pu parcourir de nos joy-cons afin de pouvoir longuement vous en parler ici. Il s’agit ainsi de savoir si la notoriété de ce Unavowed est méritée.
Avouons que ça manque de traduction
C’est le premier constat que nous ferons dès le début sans développer au sujet de l’histoire. Notre test étant à destination d’un public francophone, il va sans dire qu’il est difficile dans ce contexte d’accorder une très bonne note à une histoire si la traduction française est absente. Ainsi, par défaut et par souci de compréhension pour le public français, il va sans dire que nous devons retirer des points, notamment pour un jeu misant sur son histoire et ses textes. C’est une norme que nous avons appliquée sur d’autres productions, même celles ne centrant pas nécessairement leur expérience sur le récit.
Une fois cette parenthèse de début de test clôturée, allons légèrement plus en détail sur cette histoire qui semble avoir été au cœur de nombreux éloges. Nous incarnons notre propre personnage, un individu se trouvant mêlé à une affaire faisant intervenir du surnaturel. De fil en aiguille, nous devenons membre de l’organisation Unavowed, une association d’individus de notre monde interagissant avec le surnaturel et enquêtant sur ce genre d’affaires. Avec des membres n’ayant même pas d’apparence humaine, d’autres qui manipulent des flammes ou encore d’autres qui interagissent avec les esprits. Unavowed n’est pas nécessairement une organisation très grande, mais chacun de ses membres a sa spécialité lié au surnaturel.
L’histoire commence après que nous ayons défini le passif de notre protagoniste. Ce passé a une influence sur la progression de l’histoire à venir, et les subtilités d’écriture liées à ce genre de choix sont nombreuses dans le jeu. Chose qui motivera les plus curieux à jouer et refaire l’histoire pour avoir quelques subtils changements à découvrir ainsi que de multiples fins. Revenons à notre début de jeu : nous constatons que notre personnage est possédé par un démon, et que c’est un sorcier du nom de Eli qui se charge de notre exorcisme. Un sorcier à l’allure de gentleman américain avec une tenue classique de salarié et un chapeau qui va avec. La trame se déroule d’ailleurs sur différentes localisations de New York dans une vibe très années 90, un voyage très sympathique dans la ville américaine de cette époque.
Eli est le fameux individu manipulant le feu que nous évoquions. C’est après le sauvetage par Eli que nous rejoignons Unavowed. Au cours de nos enquêtes à New York, impliquant toujours plus le surnaturel, nous serons rejoints par d’autres individus ou entités. Notamment Logan, un médium qui interagit avec les esprits et qui est accompagné de Kaykay, le fantôme d’un enfant d’une dizaine d’années l’aidant dans ses pratiques. Il y a également d’autres membres qui nous rejoignent ensuite, et dont nous vous laissons la surprise de la découverte ainsi que leur développement dans cette trame complexe : un récit surnaturel dans notre monde contemporain, tissant sa toile à travers nos différents protagonistes mais également dans la temporalité et les époques développées dans le jeu.
Dès le début, et jusqu’à la fin, Unavowed joue la carte de l’écriture mature, crue et violente. Peu importent les choix ainsi que la fin vers laquelle vous vous dirigez, la qualité d’écriture est constante et il est encore plus dommage de ne pas avoir de traduction pour que chacun puisse en profiter. Les rebondissements sont ainsi nombreux selon les choix que vous avez fait et de nombreuses révélations poignantes vous attendent au tournant. Tout n’est pas nécessairement surprenant et selon votre culture littéraire ou cinématographique, il est possible de prédire certains dénouements. Toutefois, le classicisme n’est pas synonyme de mauvaise qualité quand il est bien fait. Unavowed saura certainement embarquer les amateurs d’occulte et de surnaturel dans sa trame d’une dizaine d’heure en ligne droite ou plus selon la motivation et le plan de jeu de chacun. Le rythme du récit est bon, mais nous comprendrons que les moins motivés après un premier run puissent trouver le jeu trop court pour le prix proposé.
Avouons que c’est un genre qui peut endormir
Nous l’avons évoqué mais Unavowed mise sur son récit, c’est d’ailleurs un Point’n click, vous comprendrez ainsi les raisons de ce point fort. Encore une fois, son récit est de qualité malgré quelques déséquilibres de développement ou la présence de quelques personnages très secondaires. Ceci étant dit, si vous êtes amateur de surnaturel et que vous n’êtes pas trop sensible, l’expérience vaut le détour. Cette sensibilité que nous évoquons va au-delà des mots durs à lire ou à entendre. Mais puisque nous en sommes à ce point, parlons de l’ambiance sonore du jeu qui accompagne très bien la trame surnaturelle du jeu, ses événements, son contexte temporel et géographique. Il y a des thèmes que nous oublierons, qui tournent en rond ou qui nous font moins vibrer mais globalement la qualité est là.
Le doublage et le jeu d’acteur vocal anglais permet de mieux s’immerger dans le jeu et de mieux s’imprégner de la personnalité de chacun des personnages. Certains passages peuvent être violents à entendre verbalement, justifiant le pegi du jeu. Ainsi, Unavowed n’est pas forcément un Point’n click à donner à tout le monde. Le doublage contribue à nous tenir en haleine malgré quelques lignes de dialogue vides et moins inspirantes que les moments clé du jeu. En plus de l’ambiance sonore plutôt bonne, c’est le travail visuel sur Unavowed qui peut percuter les esprits. Le style se situe dans un genre de pixel art 2D allant de pair avec la vibe très années 90 du contexte du jeu.
Dans ce style, Unavowed propose un rendu plus que convenable, avec comme dans le genre ou comme dans un Visual Novel des passages avec illustrations clés pour donner un semblant de mise en scène et bien marquer les esprits. Des images pas toujours agréables à voir et qui peuvent heurter la sensibilité d’un certain public. Au-delà de ça, c’est le style très terne, aux couleurs sombres avec des design de créatures plutôt détaillé qui peut heurter un public non mature. Ceci couplé à la bande sonore, Unavowed réussit à dépeindre une ambiance surnaturelle, à nous immerger dans un univers fictif proche du nôtre (ou du moins à une certaine époque) et potentiellement à nous faire ressentir un certain malaise.
Pourtant, dans son style en pixel art 2D inspiré des années 90, il faut en même temps relever le fait que malgré tous les efforts faits dans le travail ambiant, le style ne permet pas une mise en scène plus percutante que les illustrations clés. Unavowed échoue ainsi à rendre encore plus impactant certains passages par une mise en scène en 2D statique datée et propre à son style graphique finalement. Il faudra faire travailler son imagination pour y trouver un certain impact émotionnel. Mais encore une fois le travail de pixel art est bon et va de pair avec la trame même si nous comprenons que certains joueurs peuvent ne pas apprécier cette ambiance trop lourde et auraient potentiellement préféré la même trame avec plus de légèreté et de couleur. Aussi, en restant subjectif, nous n’avons trouvé aucun personnage particulièrement charismatique dans leur design. Par ailleurs, en restant sur ce style et en comparant à d’autres point’n click sur Nintendo Switch, il y a plus propre et plus joli. Ceci étant dit, Unavowed reste propre, unique et agréable à l’œil, cela en portable comme en TV.
Avant d’évoquer le gameplay, il faut comprendre que cette mise en scène rétro et pauvre peut contribuer à une certaine fatigue pour suivre la progression du jeu. Notamment lors de certains passages à vide à juste bouger son personnage d’un point à un autre en suivant quelques pauvres dialogues. Les voix que nous entendons devenant alors le seul facteur nous gardant éveillé malgré nous. Une fatigue qui n’est pas atténuée par le gameplay ni par la progression classique d’un Point’n Click. Nous passons la plupart du temps à passer des dialogues puis à cliquer sur chaque élément des décors pour récolter des informations et des indices en rapport avec la marche à suivre. Il faut pourtant rester éveillé pour faire les choix changeant subtilement le scénario et sa progression à certains moments.
Par ailleurs, comme dans la plupart des jeux du genre, la progression est linéaire malgré les choix possibles et les multiples fins. Linéaire puisque traditionnellement dans le genre, certains passages ne peuvent être passés si vous n’avez pas déclenché un certain évènement dans un certain ordre, chose qui peut même potentiellement bloquer la progression. Cela malgré l’habile manière de subtilement changer des événements selon les choix que nous avons effectués. Il y a aussi des passages où nous jouons avec un allié et dans lequel nous devons interagir avec sa spécialité. Ainsi, prendre le mauvais allié peut bloquer la progression ou obliger à des aller-retours inutiles que les amateurs du genre connaissent. Pareillement, avec les interactions entre les éléments du décors et notre inventaire, il y a des moments où il faudra forcément trouver un certain objet à obtenir à un certain moment si nous voulons progresser et résoudre certains puzzles pas toujours évidents à comprendre.
Puis, malgré la possibilité de jouer en tactile, les interactions entre l’inventaire et le décor restent fastidieuses et bizarres. Le genre du Visual Novel comme celui du Point’n click reste assez particulier, linéaire et de niche, dont nous comprenons que le manque d’interaction gameplay peut endormir certaines catégories de joueurs. Et ce n’est pas toute cette linéarité et ses allers-retours qui aideront au réveil des nouveaux venus dans le genre. C’est là qu’un bon récit, ses rebondissements, son doublage, son ambiance sonore et sa mise en scène peuvent donner du rythme puis faire en sorte que nous gardions un œil attentif sur tout ça. Dommage que la mise en scène très vieillotte et sa non traduction favorisent potentiellement l’ennui du public francophone et n’aidera pas à motiver celui-ci à parcourir le jeu plus d’une fois.
Unavowed est disponible sur l’eShop au prix de quinze euros.
Conclusion
Si vous êtes en recherche d’un bon Point’n click au récit mature et surnaturel, Unavowed a sa place dans votre ludothèque. Du moins, si la langue anglaise ne vous pose pas de problèmes dans sa compréhension textuelle, orale, voire les deux. Unavowed est une expérience très solide du genre qui mérite les éloges qui lui sont adressés, mais qui peinera potentiellement à trouver la même sympathie que dans les pays anglophones par la barrière de la langue. Malgré tous les éloges qu’on peut lui faire, Unavowed souffre également des défauts propres au genre malgré ses tentatives subtiles de briser cette routine. A réserver donc aux amateurs du genre pouvant passer au-delà de la barrière de la langue, aux courageux qui sont prêts à s’armer d’un dictionnaire bilingue à portée de main ou encore à un public averti.
LES PLUS
- Une réalisation en pixel art 2D propre et réussie
- Des illustrations marquant les moments clés
- Un point’n click efficace et solide
- Fonctionnalité tactile en portable
- Une durée de vie convenable pour ceux qui feront tout
- Plusieurs fins et choix possibles
- Un scénario mature et bien écrit dans le genre
- A réservé à un public averti
- Une progression bien rythmée
- Une ambiance sonore allant bien avec l’ensemble
- Un bon doublage anglais donnant de la personnalité
LES MOINS
- Un peu moche par moment et des personnages peu charismatiques
- Très terne, un peu de couleur fait pas de mal
- Mise en scène datée dans le genre
- Formule très linéaire avec de nombreux allers-retours
- Des moments frustrants où l’on bute pour une broutille
- L’interaction avec l’inventaire pas très confortable
- Durée de vie courte pour ceux qui se contenteront du minimum
- Quelques dénouements convenus pour les amateurs du genre
- Quelques personnages osef
- Certains thèmes se font oublier très vite
- EN ANGLAIS !