En 1987, Dungeon Master, un jeu développé par le studio américain FTL Games, sortait sur Atari ST. Parmi les innovations qu’a apporté ce RPG, on peut noter la gestion de la faim et de la soif, de son équipement et du poids que chaque personnage peut porter, puis enfin un système de compétences qui n’augmentaient que lorsqu’on les utilisait, ou lorsqu’on s’entraînait à créer des potions ou lancer des sorts. Ce jeu n’était pas d’une beauté folle, mais toutes ces petites choses ont tant apporté à l’immersion des joueurs qu’il a cartonné à sa sortie. Quel rapport avec Outward Definitive Edition me direz-vous ? Il propose tout cela, ce qui nous fait plonger dans son univers jusqu’à ne plus vouloir en sortir.
Outward Definitive Edition est disponible sur l’eShop au prix de quarante euros.
L’aventure c’est l’aventure
Outward est sorti sur PC en mars 2019, il a été développé par un studio québécois, Nine Dots Studio. Aujourd’hui, il sort sur Switch dans une Definitive Edition qui inclut deux DLC et se déroule toujours dans le monde d’Aurai. Il s’agit d’un jeu de rôle dans un monde ouvert avec une trame scénaristique très succincte et des possibilités d’exploration et de survie très développées.
Au début du jeu, notre personnage se réveille sur une plage après que le bateau sur lequel il naviguait ait fait naufrage. Il se débrouille pour rejoindre la ville de Cierzo où il apprend qu’il a cinq jours pour payer une dette sous peine de se voir confisquer la maison de ses ancêtres. Nous apprenons incidemment que cette dette est issue des fautes de notre lignée. Si nos ancêtres ont mal agi, cela retombe sur nous. Soit ! Nous tentons de partir à l’aventure pour récolter l’argent nécessaire au plus vite.
Hélas, le gardien de la porte du village ne nous autorise à sortir que si nous sommes correctement équipés en matériel de survie. En effet, Outward Definitive Edition n’est pas un RPG classique car il intègre aussi beaucoup de survie. On apprend à crafter de la nourriture, des vêtements, des armes. Si la survie n’est pas une préoccupation de tous les instants, elle reste quand même très présente tout au long de l’aventure.
Survie au fil du rasoir
La survie commence par la gestion de la santé de notre personnage. Il peut avoir trop chaud ou trop froid selon les endroits où il se déplace, et il est donc nécessaire de prévoir des vêtements adaptés au climat. S’il est habillé trop léger dans la neige, il va attraper un rhume, ou pire encore, et il va falloir qu’il se soigne. Récolte de baies et autres produits naturels, préparation de tisanes et potions dans un chaudron pourront combattre la maladie. Nous avons aussi la possibilité de nous procurer des remèdes auprès d’un marchand quand on en croisera un.
Il faut donc acheter un chaudron, ramasser du bois pour faire du feu et avoir un moyen de l’allumer. Les contraintes ne s’arrêtent pas là. Notre personnage ne peut pas porter autant de matériel qu’il le voudrait. Entre ses poches et son sac à dos, il peut emporter une trentaine de kilos d’objets, d’armes et de nourriture. Petite astuce, lorsqu’un combat survient, il est possible de poser son sac à dos car il empêche les esquives et les mouvements rapides. On pose son sac, on se bat puis on le reprend. Il faut aussi gérer la faim et la soif de notre avatar. En tuant des animaux, on récupère de la viande et de la peau qui pourront nous servir plus tard. Le craft est vraiment un élément important du jeu.
La mort n’existe pas en tant que telle dans Outward Definitive Edition. Si par malheur notre personnage perd tous ses points de vie, un écran de chargement va s’afficher et nous indiquer qu’un individu nous a secouru et déposé en lieu sûr. On va se réveiller avec des statistiques faibles mais vivant, et avec ou non notre sac à dos contenant nos précieux outils et objets. Si ce n’est pas le cas, deux choix vont s’offrir à nous, soit retourner le chercher là où on l’a perdu, soit en trouver un autre et reprendre différemment notre aventure. Parfois, une chasseuse nous ramènera dans le village le plus proche. D’autres fois, si l’on est assommé dans une grotte, on se réveillera sur place, abandonné par nos ennemis qui ont eu un imprévu à gérer. Ce système est très malin car il n’oblige pas à repartir de zéro et il nous permet d’apprendre de nos erreurs, de tenter de faire mieux la fois suivante.
Un héros très discret
Notre personnage n’est pas un héros, il n’a pas un destin à accomplir, il n’y a pas de grands espoirs ou de grandes attentes qui reposent sur ses épaules, et c’est là que Outward diffère de beaucoup de RPG. C’est un personnage quelconque qui va écrire lui-même son histoire et sa destinée. Bien sûr, des personnages rencontrés au cours de l’aventure vont nous proposer du travail ou des quêtes à accomplir en échange d’argent, mais le plus souvent, nous sommes libres d’aller où bon nous semble et de faire ce qui nous chante.
C’est vraiment ce qui fait le charme d’Outward Definitive Edition. A chaque fois qu’on le redémarre, on a le choix entre continuer ce que l’on était en train de faire ou prendre un chemin complètement différent. Cette façon de jouer nous est aussi dictée par le fait que le jeu se sauvegarde automatiquement et qu’il n’y a aucun retour en arrière possible. Ainsi au début, nous avons cinq jours pour réunir une certaine somme et conserver notre maison. Si nous n’y arrivons pas, elle sera annexée par des soldats et il n’y aura aucune possibilité de reprendre une ancienne sauvegarde pour changer cet état de fait.
Il faut quand même parler de ce qui fâche car deux points noirs pointent à l’horizon : d’une part les graphismes. Déjà à sa sortie il y a cinq ans, le jeu piquait les yeux des joueurs et leur simplicité et le manque de polissage étaient flagrants. D’autre part, le vide qui entoure les lieux intéressants dans le jeu. On peut passer plusieurs minutes à parcourir des plaines sans croiser âme qui vive. Cela peut renforcer le sentiment de survie et d’immersion dans un monde hostile, mais ce n’est quand même pas très vivant.
Seul contre tous
Un autre point pose des problèmes, et il concerne l’interface du jeu. L’accès au sac à dos, aux différents menus, à tout ce qui concerne le craft n’est pas très simple, et on passe beaucoup de temps pour réussir à faire ce que l’on veut à certains moments. Ce n’est absolument pas rédhibitoire et ça ne gâche pas l’expérience de jeu, mais ça la freine un peu quand même. Dans la série des choses embêtantes mais pas terribles non plus, il y a les écrans de chargement entre les zones, ceux en cas de “mort” qui sont trop longs mais nous sommes bien obligés de faire avec. En revanche, les sigles qui apparaissent en bas à gauche de l’écran nous donnent des indications sur l’état général de notre personnage. Une très bonne idée car on sait en un coup d’œil s’il a faim, soif, s’il est malade ou fatigué. Autant de petites infos toujours utiles avant d’aller attaquer quelqu’un ou pour décider du lieu où établir notre campement pour se reposer.
Il faut quand même souligner les points positifs avec la musique du jeu qui est épique et correspond parfaitement à l’ambiance du titre. Un certain nombre de dialogues sont doublés en français et c’est toujours sympa d’entendre les personnages que l’on croise nous parler. Le fait que l’aventure ne soit pas linéaire donne au jeu une vraie rejouabilité et une possibilité d’y revenir sans avoir à se remémorer l’histoire et les quêtes que l’on devait poursuivre.
Conclusion
Si Outward Definitive Edition n’est pas un jeu parfait, il propose une expérience qui va au-delà de ce qui se fait dans les RPG habituels. Tout le côté survie et craft rajoute un petit plus qui fait que chaque partie apporte son lot de surprises et de nouveautés. Si l’on est prêt à passer outre des graphismes datés et une interface un peu lourde, le jeu va proposer des heures de jeu et des aventures palpitantes dans lesquelles chaque joueur pourra avoir une expérience unique. Si vous aimez l'aventure, la survie et que vous vous sentez l’âme d’un vagabond prêt à parcourir les terres d’Aurai pour saisir les opportunités qui se présenteront, foncez ! Si vous aimez les beaux graphismes et les jeux dirigistes avec une histoire à dérouler, alors passez votre chemin…
LES PLUS
- Un monde ouvert et vaste
- Une survie très développée
- Une aventure non linéaire
- Un héros ordinaire
- La liberté d’exploration
LES MOINS
- Des graphismes d’un autre temps
- Une interface lourde
- Apprentissage difficile
- Jeu punitif