SaGa Frontier 2 Remastered vient compléter la liste des remasters du studio Square Enix sur les plateformes modernes. Initialement sorti en 1999 sur la première PlayStation au Japon, et en 2000 en France, le titre avait connu, à l’époque, un petit succès chez les amateurs de J-RPG, même s’il était légèrement éclipsé par d’autres titres plus flamboyants du même studio. Car oui, au moment de sa sortie, il venait se glisser juste entre Final Fantasy VIII et Final Fantasy IX — autant dire des mastodontes sur le marché. Cette nouvelle édition est donc l’occasion de redécouvrir le jeu, d’autant qu’il propose des améliorations graphiques, une interface repensée et du contenu inédit. Alors découvrons si cette version connaîtra un succès aussi discret qu’à l’époque, ou non.
Octopath Traveler avant l’heure
Pour faire un léger rappel sur l’histoire, SaGa Frontier 2 Remastered se déroule dans le monde fictif de Sandail, un univers médiéval très inspiré de l’Europe. L’histoire suit deux personnages principaux dont les parcours s’entremêlent au fil de l’aventure : Gustave XIII — ou Gus —, l’héritier d’une grande lignée royale exilé du trône après avoir échoué à son épreuve d’intronisation, et qui devra lutter pour reconquérir le pouvoir ; et William Knights — dit Will —, un jeune chasseur de trésors qui enquête sur la mort de ses parents tout en recherchant le légendaire et mystérieux « Œuf ».
La façon dont SaGa Frontier 2 Remastered suit ces deux histoires était tout à fait unique à l’époque de sa sortie, mais peut être vue aujourd’hui comme les prémices de ce que proposent les jeux Octopath Traveler 1 et 2 — toujours du studio Square Enix. Le jeu offre une narration non linéaire, permettant aux joueurs d’explorer librement les histoires de ces deux personnages, qui finissent par s’entrelacer dans une quête épique. Les missions peuvent être choisies dans l’ordre de votre choix, ce qui permet d’emprunter des chemins légèrement différents pour obtenir le même résultat final. Cela peut être déroutant au début, d’autant qu’il est facile de sauter accidentellement des pans d’histoire, mais une fois la logique du menu de sélection comprise, cela donne presque une impression de livre de contes.
Pour vous aider, vous pouvez toujours vous référer à la chronologie. Cela permet de mieux comprendre le déroulement des événements et de suivre les personnages dans leur évolution, ainsi que celle du monde de Sandail, un peu comme une frise chronologique.
Cela étant dit, l’expérience n’est pas toujours aussi fluide qu’on pourrait le souhaiter. Qui dit remaster ne dit pas remake : les problématiques d’antan restent donc d’actualité. Certains événements surviennent de manière assez brutale, sans véritable introduction ni justification. Il n’est pas rare de voir un personnage quitter soudainement votre groupe ou une scène changer de perspective sans avertissement. Vous pouvez aussi parfois vous retrouver livré à vous-même, sans la moindre indication — inutile d’espérer une mini-carte ou des repères visuels. Cela peut vite devenir frustrant si vous êtes habitué aux J-RPG modernes, qui mâchent un peu plus le travail, ou si vous comptez sur une direction claire et des indicateurs brillants à l’écran.
Au début de l’aventure, SaGa Frontier 2 Remastered vous propose de choisir entre la version classique et un mode mis à jour, qui inclut de nouveaux événements ainsi que des membres supplémentaires dans l’équipe. Ces scènes additionnelles apportent du contexte à certains arcs narratifs et permettent même d’incarner de nouveaux personnages dans des scénarios totalement inédits. Ces ajouts ne nuisent pas au rythme du jeu, et les nouveaux venus s’intègrent de manière naturelle. Les fans de la première heure remarqueront la différence, mais aucune lourdeur n’est à déplorer. Mieux encore, tout semble avoir toujours été là, comme si cela faisait partie du jeu depuis le début : une vraie réussite de ce côté-là.
Shakespeare in Love
Gros point noir toutefois : alors que la version sortie en France en 2000 contenait une traduction française intégrale, vous devrez cette fois vous contenter de la langue de Shakespeare, car le jeu est intégralement en anglais. Aucune trace de la traduction d’il y a 25 ans, et il semblerait que Square Enix n’ait pas réussi à remettre la main dessus — ou n’ait pas jugé bon de faire beaucoup d’efforts de ce côté-là. C’est très dommage.
Encore quelques grains de sable dans la mécanique
Le titre possédait à l’époque un système de combat en avance sur son temps, avec des mécaniques plutôt originales. Cependant, tout n’était pas très bien expliqué, et cela reste un défaut aujourd’hui. Si vous ne fouillez pas dans les menus, il sera difficile de bien appréhender le gameplay des combats, qui peuvent être assez retors !
SaGa Frontier 2 Remastered est un J-RPG au tour par tour, où les personnages agissent chacun à leur tour en fonction de leur vitesse. Jusque-là, rien de nouveau, mais la particularité, c’est que les personnages ne gagnent pas de niveaux via l’expérience. Ici, tout repose sur l’équipement, les arts et les compétences. Bien sûr, après certains combats, vous gagnez un peu de santé maximale, mais l’essentiel du système repose sur l’amélioration des armes (destructibles), permettant de débloquer de nouvelles compétences.
Chaque membre de l’équipe a quatre statistiques principales :
HP (Hit Points) : les points de vie classiques, récupérables entre les combats ou via des sorts ou des LP.
LP (Life Points) : les points de vie « réels ». Tomber à zéro signifie la mort du personnage et la fin de partie.
WP (Weapon Points) : les points servant à utiliser des compétences liées aux armes.
SP (Spell Points) : les points servant à utiliser les arts ou sorts.
Tout le sel du jeu se trouve là. Mal gérer ces statistiques, c’est risquer d’être bloqué et de devoir recommencer depuis le début. Chaque compétence consomme des WP, SP ou LP. Certaines armes ou armures permettent d’en restaurer un peu après chaque tour. Par exemple, si un sort coûte 3 SP et que votre arme en restaure 4 par tour, vous récupérez 1 SP à chaque tour. Problème : en dehors de certains chapitres où l’on peut se reposer, il est très difficile de restaurer ces points.
Pire : chaque personnage doit utiliser ses LP pour guérir ses HP. Et une fois les LP épuisés, c’est la mort. Il faut donc jouer avec prudence, économiser ses SP pour les soins, et n’utiliser les LP qu’en dernier recours.
Heureusement, le remaster ajoute une fonction de transfert d’armes et de statistiques magiques entre personnages via un système d’héritage appelé “Parameter Inheritance”. Cela rend le jeu plus souple, notamment face à un équilibrage parfois rude. Par exemple, si vous avancez trop dans l’histoire de Gustav avant de jouer celle de Will, les ennemis seront calibrés sur Gustav, rendant le début de Will très difficile. Faire avancer les deux scénarios en parallèle est donc conseillé, et l’héritage permet de lisser la difficulté.
L’interface des menus a été revue pour être plus intuitive, mais le jeu reste avare en explications. Par exemple, le système de Duel pour débloquer de nouveaux arts est mal expliqué. Vous choisissez une série de commandes, et le jeu indique une icône combo si une nouvelle attaque peut être apprise. Après avoir sélectionné jusqu’à quatre commandes, le duel se déroule… sans aucune explication préalable.
Les améliorations de cette version
SaGa Frontier 2 Remastered bénéficie d’améliorations appréciables : possibilité d’accélérer les combats (vitesse x2), menus plus fluides, et fonction de sauvegarde rapide accessible d’une seule pression.
Et évidemment, le plus marquant : le style visuel. Le jeu utilise des arrière-plans en aquarelle absolument somptueux, avec des personnages en pixel art. Déjà superbe à l’époque, le style explose en HD. Le contraste entre les sprites pixélisés et les décors chatoyants permet de bien repérer ses personnages, mais peut légèrement casser l’immersion artistique.
Côté bande-son, c’est toujours du grand art. La musique n’a pas été réorchestrée, mais remasterisée, pour un son plus pur. Le travail de Masashi Hamauzu est respecté et continue de sublimer l’expérience. Petit bonus : il est désormais possible d’écouter la bande-son depuis le menu principal.
Enfin, un New Game+ est disponible et permet de conserver objets et compétences, et un mini-jeu exclusif à la version japonaise sur PocketStation — Dig Dig Digger — est inclus : vous y recruterez des mineurs pour les envoyer chercher des objets, très pratique !
SaGa Frontier 2 Remastered est disponible depuis le 27 mars 2025 sur l’eShop au prix de 29,99 euros, en anglais.
Conclusion
SaGa Frontier 2 Remastered parvient à réconcilier héritage et modernité en offrant une version embellie, mais non sans défauts, d’un J-RPG atypique et audacieux. La narration non linéaire fonctionne toujours et semble un peu plus claire qu’avant, durant la trentaine d’heures nécessaire pour finir l’aventure. Le gameplay et la difficulté globale du titre restent toutefois inchangés, malgré quelques options de confort bienvenues. L’amélioration visuelle permet de mettre en valeur l’esthétique aquarellée, toujours aussi somptueuse, et la bande-son envoûtante reste d’une grande efficacité pour accompagner les deux récits entrelacés. Une remasterisation qui se veut fidèle, mais un brin fainéante, puisque la perte de la localisation française dans cette version viendra certainement fermer des portes auprès d’une partie des joueurs.
LES PLUS
- Une direction artistique qui en met plein les yeux…
- Les histoires entrelacées et non linéaires…
- Les musiques de Masashi Hamauzu sont respectées et intactes
- Du contenu supplémentaire inédit et qui a toute sa place dans l’aventure
- Des options de confort pour améliorer l’expérience des joueurs
- Une trentaine d’heure pour l’aventure, c’est très honnête
LES MOINS
- … Mais dommage que les personnages tranchent autant avec les décors
- … Mais qui peuvent parfois perdre le joueur
- Le jeu manque parfois de clarté dans ses mécaniques
- Sans maîtrise des mécaniques, le jeu peut se montrer impitoyable
Pas de français bordel alors que la version originale avait une super traduction sur ps1, franchement …