Sorti à l’origine sur PS4/Vita en 2007, The Lost Child est un Visual Novel/Dungeon/JRPG adapté, une fois n’est pas coutume, près d’un an plus tard sur Switch. Mélange des genres de niche peu représentés sur l’hybride de Nintendo, le jeu va puiser également dans les références bibliques et dans le folklore japonais. Qu’en est-il de ce titre atypique, voici l’heure de notre jugement (dernier ?).
Pour les plus connaisseurs, le jeu est un spin-off d’El Shaddai : ascension of the Metatron et on y retrouvera des personnages de ce dernier mais pas de panique si vous ne l’avez pas fait, l’histoire se focalise sur d’autres protagonistes. De plus, vous vous sentirez plus proche de votre héros qui, lui aussi, ignore tout du combat que se livre le bien et le mal au cœur du Japon moderne, notamment à Tokyo.
Lost in Shinjuku
C’est là qu’on retrouve Hayato, journaliste de seconde zone au magazine occulte Lost. On y incarne donc ce jeune homme aux cheveux bleus, enquêtant sur une série de suicides dans le métro du quartier de Shinjuku. Les investigations ne donnant rien, vous vous apprêtez à partir lorsqu’une force vous pousse sur les rails. C’est alors que vous êtes sauvé par une belle inconnue qui semble en savoir plus qu’elle ne le prétend et qui vous confie une étrange mallette avant de s’enfuir. Perplexe, vous retournez au siège du journal, c’est alors qu’apparaît Lua, cheveux rouges, attributs féminins disproportionnés, tenue de magicienne (pas de doute, le J du JRPG est bien présent), qui prétend être un ange et qui vous annonce que vous êtes l’Élu. Elle mentionne également l’importance de la valise et décide de vous suivre dans vos recherches. Au détour d’une rue, vous êtes attaqué par un monstre qui vous blesse et, suivant les indications de votre charmante compagnonne d’infortune, vous ouvrez la valise grâce à votre sang et vous en sortez le Gangour, un pistolet servant à capturer les démons (nommés Astrals). Vous ne vous faites pas prier pour vous en servir. C’est alors que l’aventure commence. Enfin tout doucement, car le scénario sera long à se mettre en place et on ne peut pas dire qu’il soit des plus palpitants.
Visuellement, ça raconte quoi ?
Autant le dire tout de suite, le jeu ne brille pas par son aspect graphique, c’est sans doute le genre qui veut ça. En effet, toute la narration du titre se présente sous forme de Visual Novel : décor fixe, personnage au centre de l’écran lors des dialogues (avec une petite animation au niveau de la bouche). De rares petites séquences animées feront leur apparition lors de moments clés. Le character design n’aura rien de surprenant pour les habitués de la Japanimation (une mention spéciale pour Cyber Priest tout droit sorti de Ghost in The Shell). On se déplace sur une carte holographique avec un curseur en choisissant un des lieux disponibles dont le nom apparaît dans une liste à gauche de l’écran, rien de très sexy non plus, et plutôt fastidieux à la longue. Pour découvrir de nouveaux endroits, il faut faudra « mener des enquêtes » et interroger les PNJ. Cette étape obligatoire ne présente aucun réel intérêt. Lors de ces séquences, vous aurez parfois la possibilité entre trois réponses (notamment lors des dialogues avec Lua). Ces choix vous récompenseront de plus ou moins de Karma, élément essentiel du jeu puisqu’il va vous permettre d’utiliser les monstres que vous avez capturés.
Personna non grata ?
Grâce à votre Gangour, vous pourrez donc piéger les monstres, pour peu qu’ils soient suffisamment affaiblis et, dans la mesure où le procédé inflige des dégâts, cela ne vous posera jamais de problème. L’inspiration de la série Shin Megami Tensei est évidente, surtout lorsqu’on y ajoute le principe de faiblesses élémentaires. Avec ses nombreuses inspirations de Yokai, on est loin du design mignon des pokémons et le bestiaire est très réussi dans son ensemble. Bref, une fois en votre possession, il faudra purifier les Astrals afin de les faire intégrer votre équipe à l’aide du Karma obtenu lors des dialogues ou après les combats. Mais ce n’est pas son seul intérêt. Vos démons ne gagnant pas d’expérience à l’issue des combats, il faudra leur en attribuer afin de les faire progresser. Il en existe 3 types (bon, démoniaque et double), chacun étant plus efficace selon le type de créatures (démons, anges déchus et anges). En revanche, l’expérience au combat leur permettra de débloquer de nouvelles capacités, système aléatoire un peu frustrant même s’il sera possible de procéder à des échanges de capacité pour une meilleure optimisation. On pourra évidemment les faire monter de rang (de 1 à 3 étoiles) une fois le niveau maximum atteint. Les créatures sont répertoriées par classe allant de 1 à 9, mais une fois le rang 3 atteint, plus d’évolution possible. Si par malheur, leurs points de vie devaient tomber à zéro, il faudra à nouveau les purifier en utilisant le Karma. Ce système est clairement le principal et le seul intérêt du jeu et il peut devenir addictif pour les amateurs du genre. Cependant, ce petit plaisir a ses limites car faire monter de niveaux tous vos Astrals préférés et les faire évoluer sera particulièrement coûteux en karmas, en particulier pour les classes avancées.
Au bout du couloir, il y a… un autre couloir
Une fois la phase d’investigation terminée, place à l’exploration des Layers, une sorte d’espace parallèle démoniaque, invisible aux yeux des humains. Comme dans tout Dungeon-Crowler, on avance de case en case (vue à la première personne) et n’y allons pas par quatre chemins : c’est, moche, répétitif et interminable. Si le fait de parcourir des dédales sombres sans fin, flous (rarement vu depuis la N64), vides et aux textures d’une pauvreté abyssale, vous serez servis. Lorsque que vous ne tomberez pas sur des impasses, il s’agira de coffres piégés dont l’ouverture nécessitera l’utilisation des capacités spécifiques de votre équipe. Le concept n’est pas mauvais en soi sauf que son côté systématique le rend fastidieux, si bien qu’on en arrive à forcer l’ouverture en ne se préoccupant aucunement des risques. Vous aurez également droit à des interrupteurs, énigmes ou autres mécanismes qui vont forceront à multiplier les aller-retours, ce qui est la dernière chose dont vous aurez envie. Non, vraiment, les longues sessions sont lassantes et difficilement supportables, malgré la possibilité d’accélérer la vitesse de déplacement ou le recours à l’autopilote. La seule bouffée d’oxygène que vous trouverez sera l’apparition des combats aléatoires, mais là encore, le risque d’asphyxie est grand.
Chacun son tour par tour
Dans une interface digne d’un jeu smartphone, vos ennemis apparaissent fixes au centre de l’écran, et vos personnages, représentés en images, occupent le bas. Dans une fenêtre disgracieuse en haut à gauche, toutes les actions seront décrites textuellement. Le combat se déroule au tour par tour passif, dans le sens où vous sélectionnerez toutes vos actions dans un premier temps et leurs exécutions s’effectueront pendant le tour des ennemis. Vous disposerez d’Hayato, pouvant se servir du Gangour pour la capture (qui utilise la force et le tour des Astrals de votre équipe) et de Lua, magicienne/guérisseuse de service et de trois Astrals. Vos créatures pourront être interchangées avec celles mises en réserve (au nombre de six) à chaque début de tour, ce qui offre une dimension tactique surtout utile contre les boss. Le système de faiblesse élémentaire est classique mais n’est pas renseigné sur les monstres (son élément est précisé et le curseur de sélection des ennemis devient plus gros en cas de faiblesse). Il faudra avoir en tête le schéma des 5 éléments sans pour autant vous mettre la pression : cela n’aura pas la même importance que dans un Personna, vous expédierez les combats plus rapidement et plus facilement en le maîtrisant, ce qui n’est pas du luxe. Enfin, l’indicateur d’Hostilité ennemie, matérialisé par un œil à côté de vos personnages (plus il est ouvert, plus le membre de l’équipe sera susceptible d’être attaqué), n’est qu’anecdotique. En effet, il ne faudra, encore une fois, y prêter attention que lors des combats de boss. Systèmes intéressants mais sous exploités, répétition : ils deviendront à leur tour rébarbatifs et sources de lassitude. Il n’y a guère que lorsqu’un nouvel ennemi non capturé fera son apparition que vous serez parcouru d’un léger frétillement d’excitation.
RPG, es-tu là ?
A côté de ça, on retrouve évidemment d’autres éléments inhérents au genre : gain d’expérience, attribution des bonus de statistiques à chaque montée de niveau, équipements, gestion d’inventaire. Les menus sont clairs et détaillés mais la navigation aurait pu y être plus ergonomique. Prenez garde également, la rapidité avec laquelle les didacticiels sont expédiés (et l’impossibilité de les revoir) ainsi que l’absence de traduction française peuvent rendre le début du jeu un peu confus. Il faudra compter un peu plus d’une trentaine d’heures pour venir (enfin) à bout du jeu. Si le cœur vous en dit, des quêtes annexes vous permettant d’obtenir des Astrals spéciaux sont disponibles, et celles-ci présentent très légèrement plus d’intérêt au niveau des enquêtes que celles de la trame principale. Mais il faudra, pour les mener à terme, retourner dans les Layers…
Enfin, un petit mot sur la musique qui a le mérite de ne pas devenir insupportable après des heures et des heures d’errance labyrinthique. Il y a un ou deux thèmes plutôt sympathiques dans le lot, mais rien d’épique. Bien que non traduit, le jeu propose les doublages en Japonais, ce qui est toujours agréable. Par contre un petit conseil, baissez immédiatement le son des bruitages lors des combats, il est tout bonnement insupportable !
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Conclusion
The Lost Child était un jeu Vita à l'origine, et ça se voit. De plus, aucune des propositions de jeu ne vous encouragera à poursuivre l'aventure : les enquêtes sont sans intérêt, les phases d'exploration de donjon semblent ne jamais finir et les combats, loin d'être mauvais et plutôt plaisants, deviendront trop vite répétitifs. Et malheureusement, il ne faut pas compter sur le scénario pour vous donner envie d'en savoir plus. Il n'y a vraiment que la capture de monstres et tout son système de gestion qui sauvent le titre. Peut-être que les fans du genre ou les joueurs de Shin Megami, n'en pouvant plus d'attendre le nouvel opus Switch, se laisseront tenter en connaissance de cause. Les autres devraient passer leur chemin.
LES PLUS
- le bestiaire
- la capture de monstre, le système d'évolution
- la gestion de son équipe
- les combats de boss
LES MOINS
- vraiment très moche
- donjon vraiment, vraiment, vraiment interminable
- phases d'enquête sans intérêt
- combats répétitifs
- scénario décevant