Qubytes Interactives est un éditeur de jeu indépendant qui accumule les tout-petits titres divers et variés. Ceux-ci ont en commun d’être, au mieux, passables. C’est pourquoi la nécessité de devoir tester ce Red Ronin, avec son artwork de présentation fleurant bon les jaquettes des années 80, avait de quoi faire peur. Erreur ! Fous que nous sommes, nous avons failli passer à côté de la première pépite indé de cet éditeur. Il faut absolument que ce titre ait le succès qu’il mérite pour que Qubytes continue son travail de mise en avant de productions qui, sans eux, ne sortiraient jamais de l’ombre, quitte à devoir continuer de s’user les mains sur des titres de moindre qualité.
Le Katana de la vengeance
Red Ronin est un jeu de réflexion, mais pas que. Une bonne dose d’action pointera aussi à l’occasion le bout de son nez. Pour expliquer pourquoi ce mélange, il nous faut aborder la trame scénaristique du titre développé par Wired Games Studio. Dans celui-ci nous incarnons Red, une mercenaire maniant le katana. Sa première mission a tourné au fiasco et le reste de son équipe l’a alors abandonné à son sort. Mais elle est sortie des geôles qui la maintenaient captive et toute son âme n’expire qu’un long et lugubre cri : vengeance !
Nous découvrons l’histoire de Red à travers une construction scénaristique rappelant fortement le Kill Bill de Tarentino. Notre aventure s’articule autour de plusieurs temporalités et de plusieurs personnages. Entre les phases de vengeance se passant dans le présent et les réminiscences passées nous détaillant les tenants et les aboutissants de ce récit, force est de reconnaître que Red Ronin sait se montrer accrocheur dès les premières minutes.
Si les premiers chapitres s’enchaînent rapidement avec, de surcroît, la magie de la découverte et les rebondissements qui rythment notre parcourt, la seconde partie a tendance à légèrement se tasser du fait de la difficulté grandissante du titre et du temps mis à finir les niveaux avant d’affronter le boss pour connaître sa révélation. Nous souhaitons tellement découvrir la conclusion de l’histoire de Red que mourir et recommencer s’apparente à une séance de torture. Mais la motivation n’en est que plus forte pour nous débarrasser de tous les obstacles se dressant sur notre quête sanguinaire de vengeance.
Quand réflexion rencontre action
Là où Wired Games Studio réussit un vrai tour de force, c’est dans son appropriation d’un gameplay déjà vu et revu pour en faire quelque chose de prenant et addictif. Red Ronin nous propose de déplacer Red en ligne droite, seuls les obstacles présents sur son chemin lui permettent de s’arrêter pour changer de direction. Un gameplay qui sert souvent de mini-jeu à énigme, à base de caisse à faire glisser sur de la glace le plus souvent. Les développeurs de Red Ronin ont pourtant réussi à donner à ce système de jeu, toujours basé sur la réflexion, un côté intense exclusif.
Pour y arriver, ils ont commencé par placer des ennemis sur nos routes. Première épreuve : réussir à les découper en rondelles. Pour cela, il suffit qu’ils se trouvent sur notre chemin. Facile ! Sauf que pas tant que ça en fait. Très vite, ils se déplaceront, mais toujours après notre dash. Il faudra alors anticiper leur mouvement, car s’ils sont à moins d’un carreau de distance, ce sont eux qui mettront un terme à notre vendetta. De plus, de nouveaux ennemis feront rapidement leur apparition. Les premiers d’entre eux, les brutasses, seront invulnérables lorsque placés au bout de notre chemin. Surtout, ils demanderont deux coups pour être éliminés. Cela complexifie très vite l’équation.
Pour nous en sortir, nous pourrons récupérer deux types de pouvoir dans les tableaux : le gel de nos adversaires pour un tour et la modification de trajectoire. Cela augmente drastiquement nos possibilités et le côté non linéaire des puzzles lors de la première moitié du jeu offre un vrai sentiment de liberté. Nous retrouvons les sensations d’un Katana Zéro, bien que dans un style très différent, qui permettait de terminer un niveau de multiples façons.
La seconde partie du jeu est plus difficile et les séquences de déplacement sont bien moins libres tant la moindre erreur par rapport au plan prévu par les développeurs amène notre mort. Cette mort n’est d’ailleurs pas due au seul fait de nos ennemis. Nous pouvons aussi déclencher des pièges qui s’activeront au tour suivant. Ils s’activeront pour nous… ou pour nos ennemis. Là encore, c’est un coup de génie. Faire tomber un adversaire dans une fosse à piques procure un intense moment de satisfaction.
La technique bien affûtée
Si les premiers niveaux nous laissent le temps de réfléchir à nos mouvements, nous aurons aussi à affronter des ennemis armés de fusils ou de grenade. Rester trop longtemps sans bouger est alors synonyme d’une mort assurée. Le côté intense induit par un tel ajout est une vraie réussite. Il nous faut alors sans arrêt nous adapter pour nous sortir vivants de tel niveau. Poser ses Joy-Con après de tels tableaux pour profiter calmement de la suite de l’histoire en devient presque indescriptible.
La partie technique de Red Ronin ne souffre d’aucun défaut. Les graphismes, tout d’abord, sont réalisés dans un pixel art de grande qualité. Les décors des niveaux se renouvellent régulièrement durant les six heures, sans doute moins pour les joueurs talentueux, qu’il nous a fallu pour découvrir le fin mot de l’histoire. Les animations sont soignées et les différents effets, apparaissant lors du découpage de plusieurs ennemis lors d’un même dash, ajoutent aux plaisirs de tout mettre en œuvre pour aider Red.
Les contrôles répondent parfaitement. Nous ne sommes jamais pris en défaut par une sensibilité du stick mal gérée. Le passage en mode tactique pour utiliser nos changements de direction se fait tout naturellement tandis que l’utilisation du gel est elle aussi très naturelle. Le changement de personnage à certains moments ajoute un peu de diversité dans les situations rencontrées. La bande-son colle bien au thème. Elle se laisse toutefois vite oublier, car moins marquante que celle d’un titre comme Katana Zéro, la référence du jeu de découpage indé. Il est difficile de reprocher quoi que ce soit au titre de Wired Games Studio tant ils ont soigné leur production.
Conclusion
Dans un style complètement différent, Red Ronin rappelle évidemment Katana Zéro par son thème. S’il n’en possède pas le feu ni le scénario cryptique, il n’en reste pas moins un titre à la narration très soignée flirtant avec le Kill Bill de Tarantino. Malgré une filiation qui pourrait sembler très lourde à porter, il offre une expérience addictive. Mélangeant jeu de réflexion et découpage d’ennemi, le gameplay est ultra addictif. S’il est dommage que notre liberté de mouvement s’épuise avec la difficulté grandissante, le plaisir pris à mener à bien la vengeance de Red est intense de bout en bout. Qubytes Interactives tient enfin sa pépite grâce aux développeurs de Wired Games Studio et nous avons hâte de voir ce qu’ils nous réservent pour la suite.
LES PLUS
- Les graphismes en pixel art sont très détaillés et de qualités
- La bande-son se laisse écouter facilement
- Le gameplay mélange d’action et de réflexion est addictif
- Les pouvoirs à récolter amènent de la diversité
- Les pièges à déclencher pour y emmener nos ennemis, quelle satisfaction !
- La narration à la Tarantino est réussie
- L’histoire est prenante de bout en bout
- La difficulté est bien dosée et progressive
- Le prix de 8 € est très raisonnable
LES MOINS
- La difficulté croissante diminue notre liberté au fur et à mesure et ralentit le rythme de l’histoire
- Non, mais cette jaquette sérieusement
- Sans parler du robot à tête de slip
- Tout en anglais