Dans le cadre de la sortie du jeu sur Nintendo Switch dès demain, en version cloud, voir par ici, nous avons eu la chance d’avoir une interview avec Guillaume Veer, Scénariste & Producer du jeu.
- Pouvons-nous nous présenter le projet Edge Of Eternity ?
Edge of Eternity, c’est le projet un peu fou de sortir un JRPG tel que nous les avions connus pendant les années 90’s. Le gameplay axé « action » n’avait pas encore les coudées franches qu’il a aujourd’hui, et on pouvait encore très souvent tomber sur des jeux avec un système de combat au tour-par-tour, et avec un ATB (Active Time Battle).
Nous voulions renouer avec cet esprit-là, tout en apportant des nouveautés et innovations à ce système qu’on aime beaucoup. C’est un hommage plein de gratitude à un genre qui nous a apporté beaucoup de joie.
- Combien de temps le jeu a été en développement ?
A peu près sept ans. On était quatre au début, pour devenir treize aujourd’hui. C’est un projet ambitieux qui nous a fait beaucoup grandir. Quand y repense aujourd’hui, on réalise difficilement que nous sommes arrivés au bout du projet. Un grand open-world, avec un scénario épique, d’une durée de jeu de 50 heures… on ne pensait pas que ce serait à la portée d’une petite équipe d’indépendants. Mais on y est arrivés.
- Dans une époque où les sorties de JRPG sont plus nombreuses qu’avant, comment exister ? Surtout en tant que Français ?
Avec une proposition un peu différente des autres. Déjà, être un studio Français et partir sur l’idée de développer un *J*-rpg, c’est déjà audacieux. Mais on peut citer d’autres exemples intéressants du même genre : « Last Man » par exemple (la BD de Balak, Vives, Sanlaville) reprend plein de code du manga pour créer ce qui au final est sa propre recette, avec une identité propre. Il y a d’autres exemples, bien sûr, mais le tout est de savoir quel cliché du genre respecter, et lesquels on peut réinterpréter.
C’est ce qu’on a fait avec Edge of Eternity, on a voulu respecter les clichés du genre – presqu’à la lettre. Regardez les deux héros : Daryon et Sélène. Un héros guerrier, avec une grande épée à deux mains – et Sélène, la prêtresse habillée de blanc et de bleu, maniant les sorts et soignant l’équipe : il faut bien sûr faire le jeu pour se rendre compte que ces deux clichés ont été revisités avec beaucoup de twists, mais c’est aussi là la force de ce qu’on propose : « La même chose, mais complètement différent. »
C’est pareil pour les combats d’ailleurs : nous avons réutilisé la barre d’ATB, mais sur une grille tactique où l’on peut déplacer les personnages.
- Quelles sont vos influences côté design et combat ?
Final Fantasy pour la narration, et le type de ressenti que nous voulions que les joueurs et les joueuses éprouvent. La série Xéno pour les grands environnements en monde ouvert. Pour le reste nous avons tout de même voulu qu’Edge soit « son propre jeu. » On a quand même voulu faire des allusions assez légères à des séries moins connues (Breath of Fire, Shadow Hearts,…)
- Comment gérer une attente de la part du public de plus en plus forte ?
Difficilement. Nous voulons toujours être clairs avec celles et ceux qui attendent le jeu : « c’est un JRPG développé par un studio indépendant » mais de l’autre côté nous avions voulu nous doter de tous les critères de qualité d’une grosse production du genre (open-world, 50 heures de jeu, etc.)
C’est difficile de dire : « on a tous les critères principaux d’un blockbuster du genre ! » et en même temps de temporiser « mais mollo, hein, ça reste un jeu fait par 13 personnes. » Nous avons toujours voulu être cash sur ce qu’était le jeu, mais on n’a pas pu empêcher non plus des comparaisons un peu trop flatteuses. De façon générale, notre communauté nous a fait une très bonne réception, s’est montrée bienveillante, curieuse, et compréhensive sur la question nos limites intrinsèques d’indés – donc à la question je répondrais : le public se gère très bien tout seul, en fait.
- Est-ce qu’une sortie Switch était prévue à la base ? Ou c’est venu via une opportunité ?
Pas prévue de base. C’est une opportunité qui nous est venue d’un de nos partenaires… et nous l’avons saisie.
- Pourquoi le cloud gaming, sachant le jeu tourne sur Unreal Engine ?
Sur Unity ? Parce qu’Edge of Eternity est très gourmand en ressources. Nous avons tablé sur des grands environnements très détaillés, avec une flore omniprésente, des éléments de géographie très présents. Tout ça exerce un poids trop grand sur la mémoire de la Switch qui ne peut suivre qu’avec une version Cloud.
- Pour le cloud gaming, c’est vous qui faite tout, ou un prestataire vient vous voir et propose de le monter en cloud gaming pour la Switch ?
Tout s’est passé via notre partenaire Dear Villagers, et c’est Ubitus qui s’est occupé de la version Cloud pour la Switch.
- Avant cette sortie sur consoles, le jeu sur Pc semble avoir trouvé son public avec une sortie « épisodique », est-ce finalement l’une des forces du lancement de Edge Of Eternity ?
Le caractère épisodique nous a un peu été dicté par l’Early Access d’Edge of Eternity sur PC. Nous ne pouvions pas demander à nos joueurs d’acheter une version Early Access, de n’y jouer que les premières heures et d’attendre la sortie 2 ans après. Nous avons tout de suite pensé à développer le jeu par chapitre pour faire vivre notre communauté et nos échanges avec eux. Nous avions besoin de parler avec eux, de recueillir leur ressenti, ce qu’ils pensaient du jeu, des combats et du monde, et ça tout au long du développement. Ca nous a énormément aidés, à vrai dire.
A une époque, nous avions même mis en ligne un formulaire en ligne pour recueillir les avis du jeu. Je crois qu’on en a reçu 11.000. Et je crois qu’on les a tous lus, aussi – je crois qu’on est un peu maboule.
- Quel projet pour la suite ?
Ah, oui. Maintenant qu’on a collecté une certaine expérience du développement avec le mastodonte qu’a été Edge of Eternity, nous sommes assez impatients de montrer les progrès que nous avons faits sur un prochain projet.
Questions de nos lecteurs :
- Zniko : Chocolatine ou pain au chocolat ?
Alors désolé mais c’est couque au chocolat.
- Sora : Si le jeu fonctionne bien, je pense pareil de Kingdom Hearts d’ailleurs, une version boîte serait à l’étude courant 2022 ?
Vu que le jeu est en cloud, malheureusement cela n’arrivera pas.
- Anonyme : Est-ce que la sortie du jeu en cloud a un coût important ? Est-ce viable dans le temps ? En gros, est-ce qu’on aura toujours l’occasion d’y jouer dans 5/10 ans ?
Ah, bonne question ! Je suppose que ça dépend plutôt d’Ubitus & de Nintendo. C’est eux qui ont les outils techniques en main.
Nous remercions Guillaume Veer, Scénariste & Producer d’Edge of Eternity, d’avoir pris le temps de nous répondre et Charlène HERAULT de Dear Villagers.