Mine de rien, nous en sommes déjà à la troisième itération de la série des WRC sur nos Nintendo Switch. Et si le dernier en date nous avait franchement refroidis avec des graphismes frisant l’obsolescence programmée, nous espérons toujours voir arriver un digne successeur au très bon épisode 8 sorti un an plus tôt. Profitant du 50e anniversaire du championnat du monde des rallyes WRC, les développeurs français de Kylotonn nous offrent aujourd’hui la toute dernière version de leur titre. L’occasion pour nous de voir s’ils ont su se relever de la débâcle de l’épisode précédent pour nous offrir une expérience digne de nos consoles hybrides préférées.
Ça commence en tête à queue
Avant de parler des nombreuses qualités de WRC 10, nous allons commencer par les sujets qui fâchent, à savoir les graphismes et les contrôles, en gardant toujours dans un coin de notre tête cette question : à qui s’adresse ce titre ? Les jeux de rallyes intéressent une catégorie de joueurs, connaisseurs des joies de la glisse à 150 km/h, cherchant un challenge élevé. Ces jeux ont beaucoup évolué depuis l’aube de nos loisirs vidéoludiques et la recherche d’une fidélité aussi bien physique que graphique a toujours été le moteur de cette évolution.
Ainsi, les connaisseurs ont pu profiter, avec les premières consoles HD des années 2000, de décors de plus en plus fouillés qui ont, petit à petit, troqué leur limitation visuelle par une profondeur de champ de plus en plus grande. Eh bien, avec WRC 10, nous en arrivons à regretter ces tubes de végétations qui nous cachaient des espaces non modélisés. Car le dernier titre de Kylotonn possède certes une grande profondeur de champ, mais elle est désespérément vide.
Aucune végétation basse ne jonchera nos courses, les quelques arbres qui pointeront le bout de leur nez seront tristement flous et pauvres en polygone, les habitations qui parsèment nos courses ne donnent aucune envie d’y habiter et les voitures que nous avons à conduire souffrent d’un aliasing d’un autre âge. Bien sûr, il est difficile de comparer deux jeux si différents, mais lorsque nous voyons de quoi est capable un titre gratuit tel Asphalt 9, alors qu’il nous faut débourser 50 € à plein tarif pour cette pauvreté graphique, la pastille est dure à avaler.
Les leçons de WRC 9 n’ont pas étaient retenu. L’épisode 8, loin d’être un modèle pour autant, reste encore une fois la production la plus léchée de Kylotonn sur nos Switch et la comparaison avec un autre titre orienté simulation, à savoir Grid Autosport en vente à 35 €, est nettement à l’avantage de ce dernier. WRC 10 nous laisse malheureusement l’impression que cette version Switch a été faite en appuyant sur le réglage low de la monture des autres consoles sans jamais chercher à être optimisée.
À fond, à fond, à fond… gravier
Alors oui, notre version à l’avantage d’être jouable en mode nomade où nous le voulons. Et jouer le nez devant un écran d’un maximum de 6 pouces sur nos Switch Oled adoucit clairement le constat fait sur un écran de 100 cm. Cette version se destinerait-elle donc à un usage uniquement transportable ? Nous aurions aimé le croire, mais c’est là que le deuxième problème apparaît : les problèmes de sensibilité du joy-con.
Nous l’avons déjà énoncé, mais les jeux de rallye sont des jeux exigeants dans lesquels la position de notre véhicule doit toujours être au centre de notre attention pour éviter les pertes de contrôles. De ce fait, la meilleure façon de jouer à un tel jeu, contrairement à de nombreux autres jeux de courses, c’est d’y jouer avec un volant. Si le stick de nos manettes est suffisant pour éclater son grand frère sur Gran Turismo, réussir à contrôler les dérapages de nos bolides sur des chemins si étroits réclame bien plus de précision. Alors quand nous avons affaire, en version nomade donc, à nos petits joy-cons à la portée si faible, sans parler de l’absence de gâchette progressive pour l’accélérateur et le frein, le résultat est juste pénible.
Il nous est clairement impossible de faire preuve d’une précision suffisante pour apprécier réellement le titre de Kylotonn et nous en venons donc à chercher une réponse à cette question : à qui est dédié ce titre ? Jouer dans de bonnes conditions de maniabilité demande, à minima, une manette pro, mais le résultat en docké est tellement indigne graphiquement que le fan se tournera vers une autre version tandis que le jeu en nomade frustrera les débutants qui passeront leur temps à sortir de piste ou à rater leurs chronos.
Oui, la physique, ça compte
Et c’est vraiment dommage, car pour le reste, WRC 10 rend un réel et bel hommage à l’histoire du championnat du monde des rallyes et à tous ces pilotes qui ont risqué leur vie dans des courses aux tracés si accidentés. Le moteur physique du titre de Kylotonn est toujours aussi performant. Chaque voiture possède un comportement qui lui est propre. Changer de véhicule demande toujours un temps d’adaptation. Et ce n’est que la face visible de l’iceberg.
Chaque revêtement de route différent entraînera un changement drastique de notre façon d’aborder les virages. Rouler sur l’asphalte nous rassurera tandis que les chemins de terre nous demanderont bien plus d’attention, sans parler des routes enneigées de la Suède. Mais là encore, nous ne faisons qu’effleurer les possibilités. Modifier son train de pneus aura de grosses répercussions sur la course, surtout lorsque les conditions météo viendront rendre la piste encore plus glissante.
Chaque freinage, chaque accélération et, plus globalement, chaque changement du centre d’inertie de notre véhicule se ressent dans le pilotage. Les bruitages viennent accroître encore un peu plus notre plaisir. Là encore, chaque véhicule dispose de son propre son et les emballements de nos turbos sont toujours un plaisir pour les oreilles. Notre copilote ajoutera sa pierre à l’édifice avec ses indications si précieuses. Nous regrettons juste que seule la version masculine de celui-ci ait droit à une version française et espérons une mise à jour pour que la gente féminine ait droit, elle aussi, à ses gauches 3e dans la langue de Molière.
Des aides à la conduite sont disponibles pour nous aider à prendre nos repères dans un premier temps et elles sont désactivables très facilement. Petit plus sympathique, nous pouvons, lors des courses de nuit, allumer nos phares, ou les éteindre pour les joueurs… joueurs. Le rendu est alors très bon, la zone éclairée est très réaliste et nous parcourons à grande vitesse, dans un état de stress intense ces pistes plongées dans le noir. De la même façon, nos essuie-glaces nous permettront de chasser la pluie qui viendra gâcher notre visibilité en vue cockpit lors des sessions effectuées par temps bretons.
Le cadeau d’anniversaire
La physique de ce WRC 10 est donc irréprochable et son contenu est quant à lui digne d’éloges. S’ouvrant par un classique mode carrière, nous commençons notre aventure soit en junior WRC pour les débutants souhaitant apprendre les bases du pilotage, soit directement en WRC 3 pour les plus confirmés des pilotes. Nous gérons tous les aspects de notre équipe, à commencer par le calendrier qui nous demandera de choisir les événements auxquels nous allons participer.
Nous devrons aussi constituer une équipe performante. Pour cela, nous aurons à en recruter les membres avant de les choyer pour éviter que leurs compétences s’effritent avec le temps. Du mécanicien à notre agent en passant par le responsable des relations publiques, les métiers qui vont graviter autour du pilote sont nombreux et leur gestion, sans devenir prépondérante, est très prenante. L’arbre de compétences à débloquer en fonction de notre expérience est un atout indéniable qui nous met encore plus au cœur de notre écurie.
Avec les licences officielles de la Fia pour les pilotes et voitures de toutes les catégories de WRC, les amateurs de sport mécanique pourront tenter de battre les meilleures écuries du moment avant de réussir à se faire recruter par celles-ci pour décrocher le titre ultime. Pour cela, il faudra maîtriser l’ensemble des rallyes et de leurs spéciales. En comptant les inversions de certains parcours, c’est plus de 110 courses qui nous attendent sur plus de 12 lieux différents. De quoi offrir un vaste terrain de jeu et retrouver les pistes iconiques des forêts suédoises. De plus, toutes ces courses et tous ces véhicules sont accessibles directement en mode course rapide, de quoi s’entraîner très vite sur ces tracés.
Mais la véritable nouveauté, hommage à tous les pilotes de rallye depuis la création du championnat du monde, ce sont les courses anniversaires. Dans ce mode, nous avons pour objectif de réaliser le meilleur temps aux commandes d’un équipage mythique, autant en termes de pilotes que de voitures. Nous retrouvons ainsi l’Alpine A110 de Jean-Luc Therier sur le rallye Acropolis en 1973, sans parler du retour à la compétition de notre héros national, Sébastien Loeb, au rallye de Catalogne en 2018.
Ces courses sont débloquées au fur et à mesure de nos réussites, mais nous pouvons aussi accéder à tout ce contenu en partie rapide. Jamais frustrant, le passionné de sport mécanique pourra toujours lancer une partie sur le pouce sans avoir à passer des heures pour débloquer la voiture des héros de son enfance. L’occasion de voir aussi comme ces belles mécaniques ont su évoluer en 50 ans.
Il est dommage qu’aucun mode club ne vienne parfaire notre expérience de jeu, avoir le plaisir de comparer nos meilleurs temps avec ceux de nos amis ou des meilleurs joueurs en ligne aurait été un plus pour un sport dont les face-à-face se font toujours à distance. De même, aucun mode multi n’est présent sur cette version Nintendo Switch.
Conclusion
Si ce WRC 10 possède un contenu dantesque et une physique irréprochable, son portage sur Switch souffre de défauts rédhibitoires. Ses graphismes sur grand écran nous envoient dans des lieux vides et sans âme, et même si le passage en mode nomade adoucit nettement ce constat, ce sont alors les contrôles aux joy-cons qui sont insuffisamment précis pour être réellement agréable. Le titre de Kylotonn n’en reste pas moins un jeu agréable pour tous ceux qui veulent découvrir le rallye sur Switch dont il est le représentant le plus complet à ce jour. Pour les puristes du genre, il faut malheureusement passer son chemin ou jouer sur un autre support.
LES PLUS
- Les graphismes sont passables en nomades
- Les bruitages des voitures sont très bien rendus et diversifiés
- Le gameplay est toujours aussi exigeant
- La physique est très poussée et nous demande de nous adapter à chaque nouvelle condition
- Le mode 50e anniversaire est un bel hommage au rallye
- Le contenu en termes de courses et de voitures est énorme
LES MOINS
- Les graphismes en docké sont épouvantables de vides
- Les joy-cons ne sont pas adaptés à ce type de jeu
- Les manettes pro ne font pas beaucoup mieux
- L’absence d’un mode club est regrettable
Même si j’admets que les graphismes ne font pas tout, je sais pas trop si la Switch peut faire tourner des jeux de courses de simulation. Grid Autosport (que j’ai acheté) avait l’intelligence de proposer les fameux modes « Qualité » et « Performance » (comme Fire Emblem Warriors). Ici, ça semble plus compliqué.
La Switch peux avoir des bons de courses « fantaisistes » (je parle ici de Mario Kart, de Crash Team Racing et compagnie) ou encore aux graphismes épurés (du genre Art of Rally, et dans une moindre mesure Gear Club Unlimited), mais faire tourner de façon plaisante du WRC, de la F1 ou du Moto GP… Ces jeux restent jouables, bien sûr, mais ça me semble pas l’idéal d’y jouer sur Switch. C’est dommage, d’autant que ces jeux pourraient (et le font peut-être, d’ailleurs) profiter des vibrations HD des manettes pour plus d’immersion.