Furyu est un développeur et éditeur japonais assez présent sur Nintendo Switch, à travers des portages comme à travers de nouvelles productions. Les projets du studio ont une tendance à s’inspirer des meilleurs, tout en ayant quelques éléments uniques qui nous permettent de les identifier autrement. Après The Caligula Effect 2 et Monark, nous revenons sur une autre collaboration Furyu disponible depuis quelques années auparavant sur d’autres plateformes. À l’aide du développeur Gemdrops et de l’éditeur NIS America, l’Action RPG au thème larmoyant Crystar revient en 2022 pour tenter de bouleverser le public Nintendo Switch.
Sauver sa sœur perdue dans le Purgatoire
Après avoir malheureusement constaté la traduction uniquement anglaise du jeu, nous commençons lentement en incarnant un papillon lumineux se posant des questions sur lui-même et en ayant la possibilité d’interagir avec d’autres insectes du genre. Nous sommes dans un décor de vide spatio-temporel avec des fragments de terre ici et là. Une voix nous incite à nous affirmer et à nous souvenir de nous-mêmes. En nous baladant un peu et en enchaînant les dialogues, nous reprenons forme humaine et découvrons incarner la jeune Rei Harada.
Faisons une avance rapide sur les dialogues du jeu pour découvrir que Rei a une sœur du nom de Mirai. Notre exploration de ce lieu singulier nous amène à savoir que nous sommes en fait au Purgatoire à cause d’une entité à l’allure proche d’un genre de fée maléfique, portant le nom de Anamnesis. En recueillant des âmes pour son propre compte, nous avons été entraînés avec celle-ci dans le Purgatoire. Alors que nous continuons à explorer les lieux et retrouver peu à peu notre mémoire tout en éveillant en nous un étrange pouvoir, Anamnesis revient devant nous. Un affrontement a alors lieu, et une tragédie se produit.
Rei s’en prend malencontreusement à Mirai. En proie à la confusion, Anamnesis s’enfuit avant l’arrivée des entités Mephis et Pheles. Ces deux personnages se présentent comme étant des modérateurs du Purgatoire, et nous apprennent qu’il y a un moyen de faire revivre Mirai. Elles nous proposent de signer un pacte afin de s’attribuer nos services, en échange de quoi elles s’attèleront à utiliser le pouvoir d’idéaux cristallisés que nous leur ramènerons afin de faire revivre Mirai. Mephis et Pheles ne cachent pas le fait que notre temps est limité.
Nous avons une quarantaine de jours pour rassembler ces idéaux cristallisés issus d’émotions humaines pures et fortes. Après quoi, l’âme de Mirai rejoindra la roue de la réincarnation, et deviendra autre chose en perdant tout espoir de retrouver quelconque mémoire de son existence en tant que Mirai. Après une légère hésitation, Rei signe ce pacte. Notre aventure à travers le purgatoire débute alors sérieusement. Nous sommes par la suite rejoints par d’autres combattantes avec une histoire tout aussi dramatique que Rei dans la réalité, puis entraînées dans le Purgatoire à cause d’Anamnesis ou à cause d’autres raisons.
Une aventure d’une vingtaine d’heures en ligne droite, dépendamment aussi de votre intérêt pour la lecture des dialogues du jeu. Une histoire avec une boucle scénaristique ignoble sur la dernière partie, ne motivant pas du tout la poursuite du fin mot du récit. Une manière artificielle et maladroite de gonfler la durée de vie. De plus, si les personnages sont plutôt attachants individuellement, les liens entre chaque membre du groupe ne se développent pratiquement pas. Ce qui en fait un groupe assez quelconque, avec l’interrogation de savoir pourquoi ils combattent vraiment sous la même bannière. Une écriture très déséquilibrée du coup, malgré une belle base de récit fourni par Naoki Hisaya, ancien membre de Key à l’époque de Kanon. Heureusement que les annexes ne sont pas trop nombreuses pour ne pas gonfler encore plus la durée pour rien.
Un Action RPG qui manque de punch
Les larmes sont dans le titre et sont la thématique du jeu. Lorsque Rei pleure au début, ce sont ses larmes qui forment les idéaux collectés par Mephis et Pheles. Elles sont au cœur de l’intrigue mais également une part du gameplay du jeu. Crystar est un Action RPG très basique, dans lequel nous traversons des donjons de plusieurs étages composés de couloirs reliés à des salles, avec au bout un téléporteur pour accéder à l’étage suivant. Chaque salle est infestée de spectres ou de revenants que nous pouvons taper et éliminer.
Une touche d’attaque faible, une touche d’attaque puissante, puis une touche à maintenir en combinant avec une autre pour utiliser des techniques consommant des SP. Ajoutons une touche d’esquive, une touche de saut ainsi que la croix directionnelle pour changer de personnage, et nous avons presque tout énoncé. Il ne reste que la touche qui vous donne la possibilité de pleurer, afin de monter une jauge spéciale vous permettant d’invoquer votre gardien en combat pour terminer sur une puissante attaque spéciale. La jauge monte aussi en collectant l’énergie des ennemis.
Ce que nous décrivons est effectivement un gameplay très classique et pas nécessairement mauvais d’un Action RPG. Simplement, l’équipe de Gemdrops montre qu’elle ne maîtrise pas du tout le genre. Le plus gros point faible réside dans les animations des ennemis et de vos personnages qui sont d’une rigidité insupportable. Cela donne l’impression d’avoir un genre de latence et de l’action peu fluide, alors que techniquement tout est stable. Dans un Action RPG type, il est normal d’attaquer puis de voir son personnage annuler ses attaques pour esquiver instantanément lorsque nous appuyons sur l’esquive.
Dans Crystar, il n’y a pas cette logique de base. Ainsi, nous avons cette frame où l’attaque se termine avant que notre personnage entame notre prochaine commande. Du coup, en plus de proposer un gameplay loin d’être révolutionnaire et une expérience répétitive sur la longueur très commune du genre d’Action RPG, le gameplay manquant de dynamisme et d’impact ne nous motive pas non plus à poursuivre très longtemps. D’ailleurs, soulignons en plus que le jeu est très facile, et on roule assez facilement sur les ennemis.
Préparez-vous à pleurer le jeu
Pourtant, classiques ou non, les idées ne manquent pas et le studio avait certainement de nobles intentions sur le papier. Si l’exécution était bonne, en combinant attaques et combos avec la possibilité de switcher de personnage, il y avait moyen d’avoir quelque chose de défoulant. En éliminant des ennemis, nous montons de niveau ce qui renforce les statistiques de nos personnages, et cela permet aussi l’acquisition de nouvelles techniques. En fin de mission, nous tombons toujours dans la chambre de Rei ; celle-ci fait office de HUB.
C’est de sa chambre que nous acceptons les missions pour progresser dans l’histoire. Nous pouvons téléphoner aux autres personnages, ce qui est souvent lié à l’histoire. Si vous ne savez pas comment progresser, téléphonez. Il y a une chance que le scénario n’attende que ça pour avancer. Nous pouvons aussi pleurer les âmes tourmentées et récupérer des sentiments. En fait, en éliminant certains spectres et revenants plus puissants que la normale, nous récupérons leurs tourments. Les sentiments font office de pièces d’équipement pour booster nos stats. Ainsi, en pleurant les tourments nous forgeons des sentiments à équiper.
Nous pouvons fusionner des sentiments pour les renforcer et acquérir de nouveaux passifs. Au-delà de ça, en éliminant les ennemis, nous pouvons également compléter une encyclopédie d’âmes et avoir l’histoire derrière celles-ci. Chose intéressante, si encore leur histoire n’était pas encore plus impassible que le récit principal du jeu. Il est possible de changer de costumes pour nos personnages, la version Switch incluant même des costumes qui étaient des DLC sur d’autres plate-formes. Dommage qu’il ne soit pas possible d’avoir un aperçu de chaque costume avant de le mettre. Une fois votre costume sélectionné, vous pouvez éventuellement jouer avec la chienne de Rei, Thelema. Chose inutile ; d’ailleurs, l’histoire de la bête est aussi touchante que bizarre dans le fond. Nous vous laissons découvrir tout ça par vous-mêmes.
Terminons par un point plutôt bon du jeu, sa présentation. C’est peut être d’ailleurs celle-ci qui vous a attirés vers Crystar. L’illustrateur japonais Riuichi nous régale sur le character design des personnages du jeu, et Ntny nous en fait de jolis modèles 3D in-game. L’équipe tente de belles choses, il y a quelques effets de style rendant la présentation visuelle assez unique du jeu. Comme lorsque nous avons récolté des tourments. En revenant dans la chambre de Rei, nous avons régulièrement en visuel des phrases stylisées issues de ses tourments, comme si les vaincus continuaient de nous hanter. Dommage que l’équipe ne se soit concentrée que sur ce genre de détails uniques.
En effet, au-delà de ces points, nous avons un Cel-shading 3D assez classique de Furyu. Les environnements sont colorés et tout juste convenables, en plus d’être totalement vides. De plus, ils manquent de variété et nous avons l’impression de traverser encore et encore les mêmes dédales de couloirs. Saluons pourtant la participation du studio Shaft sur les quelques cinématiques du jeu, et de l’artiste japonaise Yanagi Nagi sur les thèmes chantés du jeu. L’OST accompagne très bien le jeu avec quelques pistes renforçant les émotions de certains passages. Soulignons la présence du Dual Audio, très bonne chose pour avoir le choix entre le doublage anglais ou japonais selon votre préférence.
Conclusion
Furyu dégaine Crystar sur Nintendo Switch, qui pourrait être le jeu à l’origine de quelques larmes que vous verserez en ce printemps 2022. Des larmes versées pour les qualités du titre, mais également pour les défauts assez nombreux de cette expérience proposée par Gemdrops. En effet, passée la découverte des premières heures et le chara design réussi du titre, Crystar vous fera certainement pleurer pour le reste. Pleurer pour la répétitivité du gameplay, son manque de dynamisme, puis enfin pleurer pour l’écriture ”loopée” et très déséquilibrée de l’histoire. Pourtant, en essuyant vos larmes et en poursuivant, vous ferez alors face à la roue de la réincarnation qui vous invitera à simplement ranger le jeu et passer à autre chose sur Switch.
LES PLUS
- Chara-design fin et réussi par Riuichi
- Les personnages plutôt bien modélisés
- Une présentation visuelle pas si mauvaise
- Les cinématiques de Shaft et les thèmes de Nagi Yanagi
- De bonnes idées de gameplay
- Une durée de vie convenable pour le genre
- Une histoire à la base attirante
- Des protagonistes individuellement attachants
- Une OST accompagnant plutôt bien les situations
- Dual Audio disponible !
- Les DLC accessibles
LES MOINS
- Des environnements vides qui manquent de variété
- Le level-design peu inspiré
- Le gameplay ultra rigide et pas si révolutionnaire
- Ça manque cruellement de punch
- Puis c’est très répétitif, mal exécuté
- Une histoire qui se dénoue n’importe comment
- Les loops du récit, un fléau qui gonfle la durée de vie
- Très linéaire, peu d’annexes
- Des personnages pas si proches et unis que ça
- Des thèmes sonores parfois génériques
- Uniquement en anglais…
Dommage, ce jeu me faisait de l’œil. J’avais remarqué l’aspect un peu « vide » du jeu mais ça ne me dérangeait pas trop, en revanche les autres points négatifs concernant le gameplay me refroidissent méchamment… Merci pour le test.