Il y a des jeux dont le pitch ou la pochette nous intrigue, dont les premières minutes et les premiers éléments de gameplay nous donnent furieusement envie de poser les mains dessus et qui finissent pourtant par nous devenir détestables pour de multiples raisons. Mugen Souls, du studio Compile Heart, fait hélas partie de cette catégorie depuis sa sortie en 2012 sur PS3. Son arrivée sur nos consoles hybrides préférées va-t-elle changer la donne et lui permettre de développer son vrai potentiel ? La réponse est malheureusement toujours non et voici pourquoi.
Y’a-t-il un pilote dans l’avion ?
Commençons par le premier élément qui nous avait donné envie de poser les mains sur le titre de Compile Heart à l’époque et qui n’a pas changé d’un pouce avec ce portage : sa narration. Dans Mugen Souls nous incarnons Chou-Chou, une jeune fille étrange et pleine d’ambition puisqu’elle n’envisage rien d’autre que de conquérir les sept mondes qui composent son univers. Elle part donc en compagnie de ses fidèles et perverses comparses Altis et Ryuto pour mettre en œuvre son plan machiavélique.
Mais si cette introduction nous laisse envisager que nous allons jouer les méchants de l’histoire, tous les stéréotypes des RPG se voient tordre le cou. Ainsi, le premier héros rencontré passe son temps à entrer chez les gens, à briser des vases et à habiller sa camarade de sexe féminin avec des tenues aux statistiques certes élevées, mais laissant une grande place au courant d’air. De même Altis est un démon qui fait le bien malgré elle, Ryuto est un pervers qui ne pense qu’à reluquer de la demoiselle dévêtue, et cerise sur le soutif, Chou-Chou a le pouvoir de transformer quiconque en son esclave. Une bien belle brochette de héros qui laissera de la place à de nombreux autres personnages secondaires pour nous faire rire.
Cet aspect est sans doute celui le plus réussi de Mugen Souls, sa narration avance régulièrement et elle est toujours imprévisible. Alors bien sûr, une intro façon idole spécial nippon qui se fait peloter les seins au bout de trente secondes et qui montre sa culotte au bout de quarante, pourrait laisser craindre le pire, c’est en fait à une parodie en règle de tous les poncifs du genre à laquelle nous avons le droit. Notre seul regret concerne le manque d’ambition du portage qui se contente toujours, hormis pour la scène d’introduction, de nous envoyer ces saynètes sous forme d’écran fixe et de texte.
Les mécaniques du chaos
Pour soumettre chacun des mondes, il faudra commencer par soumettre le héros et le démon lord de chacun des continents de ces mondes et cela en utilisant les pouvoirs de Chou-Chou. Les pouvoirs au pluriel donc. Car si elle peut transformer chaque être vivant en un acolyte à ses ordres, il faut pour cela qu’elle les ensorcelle en utilisant ses charmes. Mais les êtres rencontrés n’ont pas tous les mêmes goûts, qu’à cela ne tienne, Chou-Chou est capable de changer d’apparence pour ainsi devenir, entre autres, timide, énergique, masochiste ou encore bipolaire. Il va alors falloir adapter son apparence en fonction de ce qui nous fait face.
Sauf qu’une fois en combat, nous pouvons très bien avoir affaire à plusieurs monstres ayant des personnalités bien distinctes et en satisfaire un, mais avoir l’effet inverse sur un autre. Celui-ci, mécontent, deviendra ainsi bien plus dangereux. Mais ce n’est pas tout. En effet, un cristal central pourra lui aussi être séduit, et une fois sa jauge remplie, il aura un effet sur l’ensemble des monstres à combattre.
Ces combats nous offrent la possibilité de déplacer nos héros dans l’ordre donné par une barre de déclenchement avant de choisir, parmi les classiques du genre, entre une attaque (combinée ou non), une capacité spéciale, un item ou une position de défense. Chacun de nos héros a alors une zone de déplacement ainsi qu’une zone d’attaque qui dépendra de son arme équipée en cours. Là où Mugen Souls se montre bien plus tactique, c’est qu’il est possible, de déclencher un Blast Off, c’est-à-dire d’envoyer valser l’ennemi que nous attaquons pour qu’il aille rebondir sur les bords ou sur ses congénères pour leur infliger alors des dégâts.
C’est aussi la seule façon, en dehors du charme, de venir à bout des cristaux. Ceux-ci ayant des effets de zone allant de la réduction de dégâts à la diminution de caractéristiques, aussi bien pour les alliés que pour les ennemis. Jouer avec ceux-ci prend donc tout son sens. Malheureusement pour nous, ce système qui semble ultra complet et varié cache deux gros problèmes.
Le premier est que le tutoriel mis en place est complètement anarchique. Il est tout à fait possible de lancer un Fever Mode (quand le cristal est séduit) sans avoir eu aucune explication sur celui-ci, de même nous cherchons à séduire nos ennemis sans savoir que Chou-Chou pouvait changer d’apparence, nous nous contentons alors de défoncer les monstres qui nous font face et prenons cette habitude pour ne plus la perdre et oublier complètement les cristaux. Et nous arrivons alors au second problème : il est tout à fait possible de passer outre ces mécaniques pour juste lancer nos attaques combinées qui font déjà énormément de dégâts et qui suffisent à avancer dans les niveaux en dehors des combats de boss.
La technique d’un autre âge
Déjà que l’ensemble de ces explications nous arrivent dans le désordre, mais en plus, tout comme l’ensemble des dialogues qui vont nous accompagner, celles-ci sont toutes données exclusivement en anglais. Il va donc falloir être capable de comprendre les subtilités des mécaniques tout en comprenant que la moitié des textes affichés sont humoristiques. Les amateurs de la langue du chat qui expire vont se régaler tandis que les autres ne vont absolument rien comprendre.
Mais même les anglophones ne pourront excuser le retard technique du titre de Compile Heart. Nous passons notre temps à déambuler dans des niveaux loin d’être vastes, manquant cruellement de détail et dont le framerate est loin d’être exemplaire. Ce portage a juste gardé les graphismes d’origines, déjà loin d’être à la hauteur de la PS3, mais avec en plus un sentiment de flou à chaque déplacement de caméra. Se promener dans ces décors pour essayer de mettre en place les différents éléments du gameplay pour conquérir ces mondes est loin d’être agréable.
La bande-son rattrape un peu le tout en se montrant entraînante, notamment durant les phases de combat et en se renouvelant de temps en temps. Toutefois, les quelques phrases de nos avatars répétées ad nauseam, viennent gâcher ce sentiment et finalement, bien vite nous en arrivons à baisser très fortement les effets sonores pour ne plus avoir à souffrir de ces interjections. La prise en main est plus sérieuse et ne souffre de quasiment aucun défaut en nous proposant les éléments classiques des RPG à portée de main.
Conclusion
Malgré un pitch ultra accrocheur et un univers complètement barré, Mugen Souls n’arrive jamais à nous faire oublier que ses nombreuses mécaniques de gameplay sont loin d’être utilisées à bon escient et nous laisse finalement avec le sentiment d’un jeu brouillon, certes plein de bonnes intentions, mais qui ne va jamais au bout de ses idées. De plus ses graphismes d’un autre âge sont loin d’être à la hauteur et l’absence d’une localisation française le rend quasiment injouable pour tout joueur ne possédant pas un niveau correct en anglais. Un portage loin d’être essentiel pour nos Switch et vu le potentiel de départ, nous sommes les premiers à le regretter.
LES PLUS
- Les mécaniques de gameplay sont nombreuses et originales…
- La narration est complètement barrée
- Les personnages secondaires sont tous intéressants
LES MOINS
- … mais elles sont largement sous-exploitées ou inutiles
- Les graphismes sont très loin d’être à la hauteur
- L’animation est souffreteuse et floue
- Demande un niveau d’anglais plus que correct