Au fil des ans, la série MotoGP développée par les équipes italiennes de Milestone n’a cessé de se bonifier, ou tout du moins d’évoluer. Aujourd’hui la Nintendo Switch, tout comme les consoles de nouvelle génération, accueille la cuvée 2024 en boutique comme sur l’eShop. Il s’agit là du sixième volet de la série à avoir été porté sur la console de Nintendo. Sur le papier, l’éditeur et le développeur nous promettent une simulation toujours plus affûtée et réaliste, avec des ajouts suffisamment nombreux pour que cette nouvelle édition ne soit pas qu’une simple « mise à jour » de l’opus précédent. Il est donc temps de voir ce que ce MotoGP 24 cache sous son carénage !
Test écrit par ThomasR555, correcteur de l’équipe.
Parce que vous attaquiez, vous ? Moi, j’attaquais pas !
D’emblée, au lancement du jeu, le joueur se retrouve plongé dans le vif du sujet. Pas de didacticiel à passer obligatoirement comme c’était le cas par exemple dans MotoGP 22, on se retrouve directement à choisir le niveau de difficulté globale du jeu, avec quatre modes disponibles : simplifié, où l’on retrouve notamment un freinage géré automatiquement et une prise de virages assistée, intermédiaire, avancé et enfin pro, qui va laisser le joueur gérer lui-même le passage des vitesses et qui le prive de l’aide neuronale, une aide déjà présente dans le précédent volet et qui permet de visualiser là où il faut accélérer, là où il faut décélérer et là où il faut sauter sur les freins. Quel que soit le mode retenu au démarrage du jeu, pas de panique ; d’une part ce choix n’est pas définitif et pourra être modifié en cours de partie, et d’autre part le niveau de l’IA de vos adversaires évoluera en fonction de vos performances en piste, peu importe le niveau de difficulté choisi. Une IA qui est d’ailleurs d’un très bon niveau puisqu’il lui arrive de faire des erreurs de trajectoire, des chutes, et qui se montre plus ou moins agressive selon les adversaires.
Vient ensuite le temps de personnaliser son avatar virtuel. S’agissant du pilote en lui-même, les possibilités sont assez basiques avec un choix quant au sexe, à la coupe de cheveux, la corpulence et à la forme de visage. En revanche, le choix s’avère bien plus varié en matière de casque, de gants, bottes ou encore combinaison avec des marques connues du milieu des motards comme AlpineStars, Arai ou Dainese pour ne citer qu’elles. Ces différents éléments pourront aussi être personnalisés de façon plus approfondie en matière de coloris et de stickers, une personnalisation encore un peu plus poussée étant possible pour les casques.
Si le mode principal de MotoGP 24 est son mode carrière (nous allons y revenir plus loin), le jeu propose également d’autres modes de jeu comme le contre-la-montre, le Grand Prix simple sur une seule course ou encore le Championnat, le tout proposé dans des menus clairs et lisibles. Pour ces deux derniers modes, vous avez la main sur un certain nombre de paramètres, comme les pénalités appliquées en course (plus ou moins réalistes), les conditions météorologiques qui, hélas, ne sont pas évolutives dans ces modes, ou encore les circuits parcourus dans le mode Championnat. Enfin, si un mode multijoueur est toujours présent, il reste à nouveau cantonné au niveau « local ». Toujours pas de possibilité de jouer en écran splitté, de compétitions en ligne ou encore de cross-play, ces éléments étant réservés aux versions PlayStation, Xbox et Steam… Dommage, car d’autres titres multi plate-formes ont pu montrer par le passé qu’il était possible ne serait-ce que de participer à des courses contre-la-montre en cross-play avec les fantômes des meilleurs temps, à l’instar de WRC Generations sur quatre roues.
Enfin, une autre partie du jeu propose quelques didacticiels pour orienter les nouveaux venus dans la série, mais ceux-ci sont très peu nombreux et axés sur certaines spécificités comme la gestion du départ arrêté avec l’embrayage, un tour du circuit italien de Mugello où vous pourrez tester les différents niveaux de difficulté, ou encore la façon d’obtempérer à une pénalité dite de « tour long » (PTL). Car vous le constaterez en course, un comportement trop agressif de votre part ou de celui de vos concurrents déclenchera des pénalités (heureusement désactivables pour vous simplifier la tâche) allant de l’avertissement à la pénalité de tour long en passant par l’annulation pure et simple de votre temps au tour lors des phases d’essais ou de qualifications. Quoiqu’il en soit, les didacticiels disponibles ne sont pas suffisamment nombreux ni assez fouillés pour réellement apprendre les bases du maniement d’une moto de course et s’adressent pour l’essentiel plutôt à des pilotes déjà un minimum aguerris. À côté de ces didacticiels, le joueur peut aussi accéder au MotoGP Academy qui permettra quant à lui de se familiariser avec les différents circuits du jeu. Ceux-ci sont d’abord divisés en plusieurs portions avant de pouvoir s’attaquer à un tour complet. Dans les deux cas, le but sera de tenter de décrocher une médaille dont le matériau différera selon votre chrono. Plutôt simple, ce mode rappellera certaines épreuves des permis de la série Gran Turismo sur PlayStation.
On commence comme ça, et un jour on se retrouve champion du monde…
Le mode carrière, quant à lui, vous fait débuter en bas de l’échelle en catégorie Moto3. Des débuts où l’on ne vous demandera pas forcément de décrocher de suite la pole position ou encore la victoire, mais de remplir des objectifs de difficulté croissante (terminer devant un certain adversaire, terminer avec une certaine avance devant un autre, etc.). Entre chaque course, les autres pilotes interagiront avec vous via un système simplifié de réseau social. Libre à vous de rester gentil, respectueux avec eux ou au contraire de les narguer ou de les énerver, vos interactions ayant sur le papier une incidence sur leur comportement en piste à votre égard. Sur le papier seulement, car nous n’avons pas noté de grandes différences en fonction de nos réponses. Les week-ends de compétition se décomposent entre plusieurs sessions d’essais libres, puis de qualification avant d’aborder la course à proprement parler. Libre encore à vous de déterminer si vous souhaitez participer à toutes les étapes, mais autant en profiter pour tester différents réglages pour obtenir une moto au comportement qui vous convient.
À ce sujet, outre le choix des pneumatiques (gommes dures ou tendres, pour piste sèche ou détrempée), vous aurez également la main sur plusieurs autres paramètres comme les freins dont vous pourrez adapter le diamètre des disques, la suspension, la cartographie moteur permettant de moduler la puissance, les aides au pilotage comme l’intensité du frein moteur ou du contrôle de traction, ou encore la géométrie qui influe sur le comportement de votre machine. Si vous pouvez déterminer ces différents paramètres par vous-même, il vous sera aussi possible de recourir à des réglages conseillés par votre ingénieur de course après que vous lui ayez décrit quel comportement de votre moto ne vous convient pas. Mais attention, dans tous les cas les réglages consomment du temps, or les séances d’essais et de qualification où vous pourrez les modifier sont limitées dans le temps et il vous faudra donc bien choisir ce que vous souhaitez modifier si vous souhaitez ensuite tester ces modifications avant la fin de la séance.
En cours ou en fin de saison et en fonction de vos résultats, il vous sera proposé plus ou moins vite d’évoluer dans les catégories supérieures ou au contraire de poursuivre l’aventure dans la même catégorie au sein de la même équipe ou d’une autre team. Et là se trouve l’une des grandes nouveautés de cette version 2024, le mercato ou transfert des pilotes. Car en effet vous ne serez pas forcément seul à bouger et vos choix auront une incidence sur la place de vos adversaires ; si vous décidez de changer d’écurie ou de catégorie, vous remplacerez un pilote déjà titulaire qui trouvera ou devra trouver une autre place, entraînant potentiellement d’autres changements en chaîne. Mais vous aurez également la possibilité de ne pas utiliser cette option et de conserver les effectifs de la saison 2024 tels quels.
Trajectons, trajectons !
Du point de vue de son contenu, MotoGP 24 possède comme chaque année des bases solides avec l’ensemble des écuries, pilotes et tracés qui composent la saison 2024 de MotoGP. On retrouvera ainsi les catégories Moto3 sur lesquelles nous ferons nos débuts dans le jeu, Moto2 et Moto GP. Dans cette dernière, on retrouvera par exemple Marc Marquez ou le français Fabio Quartararo, ainsi que les équipes Gresini Racing, Repsol Honda, Aprilia ou encore Ducati. Côté tracés, les 21 circuits de la saison sont présents et c’est avec plaisir que vous pourrez exercer vos talents sur le Mugello, Le Mans, Phillip Island ou encore Jerez. Et en bonus, vous pourrez également concourir sur d’anciens circuits bien connus de la discipline comme le tracé californien de Laguna Seca, Brno ou encore Donington qui sont également jouables en mode contre la montre, Grand Prix et Championnat. La démarche est louable, mais peut faire regretter qu’un vrai mode historique complet, dans l’esprit du mode « Nine » proposé dans Moto GP 22 et qui reprendrait plusieurs événements/saisons passées avec d’anciennes gloires du guidon (Valentino Rossi, Mike Hailwood, Giacomo Agostini ou Michael Doohan pour ne citer qu’eux) et leurs montures d’époque n’ait pas été implémenté dans cette édition 2024…
Manette Pro ou Joy-Con en mains, les débuts dans Moto GP24 ne bousculeront pas les habitués de la série. En revanche, pour les nouveaux arrivants, les débuts seront plus compliqués, surtout à partir du deuxième niveau de difficulté. Soyons clairs, on est ici dans une vraie simulation, exigeante et qui ne pardonne pas la moindre fantaisie ou approximation dans le pilotage. Anticipation et concentration de tous les instants sont les maîtres mots du jeu, chose qui n’est pas aisée lorsque l’on n’est pas familier du monde des deux roues et du comportement de ces bestioles à leurs limites. Toutefois, le poids des différentes machines, leur comportement et la gestion du centre de gravité de votre pilote sur sa moto s’apprennent petit à petit et plus on joue, plus le plaisir de soigner ses trajectoires, d’effectuer des dépassements propres et de voir ses temps au tour fondre comme neige au soleil prennent l’ascendant pour au final distiller une grande satisfaction au joueur. La sensation de vitesse est très présente, et heureusement que l’on commence par exemple le mode carrière en catégorie Moto3 car dans les catégories supérieures, ça va de plus en plus vite et on a vite fait de terminer les fesses raclant le bitume si l’on n’a pas apprivoisé sa machine !
Pour rester sur le sujet du gameplay, il vous faudra donc apprendre petit à petit à doser ses freinages, le placement de sa moto en entrée de virage, durant celui-ci et gérer sa sortie de courbe en dosant l’accélérateur pour reprendre de la vitesse le plus vite et le plus efficacement possible. Et là, on se rend compte que les gâchettes ZL et ZR de la Switch et ses sticks ne sont pas vraiment les plus adaptés à ce type d’exercice. Ou aussi que les développeurs n’ont pas pris suffisamment le soin d’adapter le gameplay à notre console favorite. Gérer l’accélération et le freinage avec des gâchettes qui n’ont pas de progressivité sera de prime abord compliqué et il faudra « trifouiller » dans les réglages de sa moto pour améliorer la situation et éviter le guidonnage et les coups de raquette qui vous feront irrémédiablement chuter lourdement, d’autant plus si la piste est détrempée. Quant aux sticks, qui ne bénéficient quant à eux d’aucun réglage particulier, ils devront être déplacés précautionneusement ; en Moto3 par exemple, ils se montrent un peu trop réactifs tandis qu’en MotoGP ils ne le sont pas assez et vous devrez adapter votre pilotage en conséquence. Dommage que ce réglage de la sensibilité des sticks n’ait pas été prévu par les développeurs, cela aurait facilité la prise en main…
Ça passait, c’était beau…
Abordons maintenant un sujet qui fâche un peu plus : l’aspect visuel de MotoGP 24. Soyons clairs dès le départ, il n’y a pas ou très très peu d’évolution depuis le précédent opus. Les circuits sont fidèles à la réalité mais la modélisation des tribunes, des barrières de sécurité, des commissaires de piste ou encore de l’arrière-plan des tracés (collines, bâtiments qui jouxtent la piste par exemple) est loin d’être au niveau d’un jeu de 2024. Çà et là, on remarquera quelques éléments qui réhaussent quelque peu le niveau, comme la grande roue à proximité du raccordement sur le circuit Bugatti du Mans, mais pour le reste c’est pauvre, très pauvre et surtout ça manque cruellement de vie. Pour en revenir aux tribunes, qu’elles soient pleines ou clairsemées et hormis quelques rares drapeaux que l’on voit s’agiter, elles manquent trop d’animations (fumigènes ou banderoles par exemple auraient été les bienvenus) pour que le joueur se sente vraiment au cœur d’une compétition d’envergure. Et cette pauvreté graphique de l’environnement de course se ressent encore plus lors des replays. Les trois vues à la première personne disponibles manquent également de soin au niveau par exemple du combiné d’instruments, ou encore lorsque la pluie vient perturber la course ; les gouttes qui viennent s’écraser sur la visière de votre casque ou sur la bulle de votre engin sont grossières, tout comme celles qui s’abattent sur la piste si vous choisissez l’une des deux vues à la troisième personne. L’ensemble visuel est également gâché par un aliasing très présent, durant le jeu comme durant les phases aux stands entre les sessions. Tous ces défauts, déjà perceptibles lorsqu’on joue en nomade, sautent encore plus aux yeux en mode docké.
Tout n’est cependant pas à jeter : La modélisation des pilotes et de leurs machines est quant à elle d’un très bon niveau, et leurs animations sont fidèles à la réalité : coude et/ou genou du pilote bien sortis dans les virages, déhanché lors des changements de direction, comportement lors des chutes, gestes de satisfaction ou de frustration du pilote ou encore travail des suspensions et des roues de votre monture. Les phases aux stands, elles aussi, mettent le joueur dans l’ambiance de la compétition puisque l’on voit votre pilote débriefer avec les ingénieurs de son équipe, les mécanos s’affairer dans le box ou préparer la moto avant que vous ne (re)preniez la piste. Enfin, mais ce n’est pas surprenant au vu des graphismes globalement datés, le framerate ne souffre d’aucune critique dans aucune circonstance, même avec beaucoup de motos en piste.
Question bande sonore, le son des motos des différentes catégories présentes dans le jeu est très bien reproduit quelle que soit la catégorie, et il en va de même pour les sons annexes comme le léger « clic » lorsque vous montez ou descendez un rapport, ou encore les détonations provenant du pot d’échappement. Lors des chutes, le bruit du carénage qui vient racler le bitume, l’herbe ou encore le gravier est lui aussi réussi sans pour autant être trop marqué, et participe à l’immersion en course. On notera par contre un manque d’animation sonore dans les tribunes durant les compétitions, qui aurait pu venir renforcer un peu plus l’immersion auditive. Le jeu étant localisé, nous avons droit à des commentaires en français, mais les phrases prononcées par le commentateur restent assez basiques et sont surtout lancées sur un ton neutre, sans transmettre la moindre émotion. On aurait aussi pu espérer que les replays des courses soient commentés, mais ce n’est hélas pas le cas. Quant aux musiques présentes dans les différents menus du jeu, disons qu’elles ont le mérite d’exister mais ne resteront certainement pas dans les mémoires…
Conclusion
En tant que pure simulation le jeu n'est clairement pas accessible à tout le monde, et les didacticiels légers n'aideront pas les nouveaux venus à trouver rapidement leurs marques. Et par rapport aux précédents opus de la série, beaucoup de reproches sont hélas toujours d'actualité, notamment en matière de graphismes, de bande-son, de temps de chargement qui semblent interminables (toujours une minute voire plus au chargement d'un circuit...), sans parler de l'absence d'un mode multijoueur digne de ce nom. Mais à côté de cela, le contenu du jeu est toujours aussi exhaustif, la physique des machines une fois celles-ci maîtrisées est excellente et même pour un néophyte, il y a une réelle courbe de progression qui procure beaucoup de satisfaction. Disponible depuis le 2 mai au prix de 49,99 euros sur l'eShop, on pourra donc le conseiller aux nouveaux désireux de s'attaquer à une vraie simulation, du moment qu'ils sont prévenus que les meilleurs temps et les victoires ne seront pas pour eux dès le début du jeu. Pour les vieux briscards de la série MotoGP, en revanche, libre à eux de voir si les quelques ajouts et la mise à jour du contenu valent
LES PLUS
- Contenu actualisé et toujours aussi complet
- IA adaptative en fonction des performances en cours de jeu
- Courbe de progression dans le jeu très intéressante
- Physique des motos excellente
- Framerate impeccable
- Mode carrière long et laissant de la latitude au joueur dans ses choix
LES MOINS
- Jeu difficile à appréhender pour les néophytes de la discipline
- Réalisation graphique datée
- Temps de chargement horripilants
- Multijoueur toujours uniquement local
- Sensibilité des sticks non réglable
- Pas assez de réelles nouveautés pour justifier son prix