D’ores et déjà disponible sur le Nintendo eShop pour Wii U, Axiom Verge est un jeu d’aventure et d’action tendance rétro créé par un seul homme, Thomas Happ. Dans cette interview réalisée lors de la gamescom 2016, son associé, Dan Adelma, évoque les sources d’inspiration du jeu, les mécanismes uniques de jeu et l’histoire incroyable de sa réalisation.
Nintendo of Europe : Tout d’abord, merci beaucoup de nous avoir rejoints. Pour ceux qui ne vous connaissent pas, pourriez-vous vous présenter ?
Dan Adelman : Bonjour ! Je m’appelle Dan Adelman et je suis la moitié administrative d’Axiom Verge. Axiom Verge a été créé par un seul homme, Thomas Happ. Il s’est chargé de tout le code, des graphismes, de l’animation, de la musique, du design… de tout… Je travaille à ses côtés et je m’occupe de tout ce qui a trait à la sortie d’un jeu, comme le marketing ou l’aspect économique. Avant de me consacrer à Axiom Verge, j’ai travaillé pour Nintendo of America pendant 9 ans. Certains aficionados de Nintendo ont peut-être déjà lu mon nom dans des news Nintendo.
NoE : Comment avez-vous rencontré Tom et comment avez-vous travaillé sur Axiom Verge ?
DA : À mon départ de Nintendo of America, j’ai fait circuler le mot que j’aimerais aider les développeurs indépendants en gérant l’aspect business. Je ne savais pas pour autant qui aurait envie de travailler avec moi. Je pense avoir eu beaucoup de chance parce Tom m’a contacté environ un mois après cette annonce, et nous nous sommes retrouvés pour un déjeuner. Nous avons discuté du projet. Il m’avait même envoyé une version du jeu au préalable pour que je puisse y jouer. J’avais trouvé ça génial.
J’espérais vraiment que le courant passerait lors de ce déjeuner et c’est ce qui est arrivé. D’après moi, on fait une bonne équipe parce qu’il connaît sur le bout des doigts tous les aspects du jeu vidéo… sauf la partie business. (rires)
NoE : Avant que nous ne continuions, pourriez-vous nous dire quel type de jeu est Axiom Verge ?
DA : Bien sûr ! Axiom Verge est un jeu d’aventure et d’action-exploration en 2D. Vous incarnez Trace, un savant pris dans l’explosion d’un laboratoire qui se réveille dans un monde extraterrestre et qui doit comprendre comment il est arrivé là et ce qu’il doit faire. Il entend la voix d’une créature qui communique avec lui par télépathie. Ainsi débute l’exploration de ce monde extraterrestre.
Les graphismes du jeu ont un style très rétro. Ils sont très évocateurs et s’inspirent de nombreux jeux classiques. Metroid est sûrement l’une des influences les plus claires, mais il ne faut pas oublier non plus des jeux tels que Commando(1), Rygar(2), Blaster Master et Ninja Gaiden. Les amateurs de retrogaming et les joueurs achetant beaucoup de jeux sur console virtuelle décèleront sûrement une bonne partie de ces inspirations dans Axiom Verge.
1. Commando : un jeu d’action à défilement vertical pour NES commercialisé en Amérique du Nord en 1986.
2. Rygar : un jeu d’action et d’aventure pour NES commercialisé en Europe en 1990.
NoE : Donc, on peut dire qu’Axiom Verge a de nombreuses influences très prestigieuses. Comment le jeu se nourrit-il de toutes ces influences pour créer un jeu old school destiné à un public contemporain ?
DA : Lorsque Tom a commencé à travailler sur Axiom Verge, il essayait de déconstruire un de ces jeux rétro. C’était une sorte de passe-temps, pour voir : « Et si je prenais une partie de ce jeu et une partie de cet autre jeu et que je regardais s’ils fonctionnent ensemble ? Qu’est-ce qui collerait ? Qu’est-ce qui ne collerait pas ? »
C’est ainsi que ça a commencé. Une fois que Tom a posé les bases, une fois qu’il a décidé de réaliser un jeu dans le style de Metroid – un jeu où la carte du monde est invisible et dans lequel vous ne pouvez accéder à de nouvelles zones qu’en obtenant certains pouvoirs – il a voulu y ajouter de nouvelles fonctions qui n’avaient encore jamais été faites. L’aspect le plus unique du gameplay qui en est ressorti est ce concept de « glitch », une anomalie visuelle à l’écran.
L’un des outils que vous obtenez dans le jeu est le disrupteur d’adresses, qui crée ces « glitches », un peu comme autrefois, lorsque de la poussière s’introduisait dans une cartouche de jeu. Il y a d’autres façons d’obtenir ces « glitches ». Par exemple, Tom chargeait un jeu et changeait de cartouche alors que la console était encore en marche pour voir le résultat. Le jeu en mémoire cherchait des informations à un certain endroit de la cartouche. Tom aimait juste voir ce qui se passait si vous « plantiez » les jeux. Il voulait intégrer tout ça dans Axiom Verge.
NoE : Et cela lui donne ce petit côté authentique…
DA : Tout à fait, oui !
NoE : Est-ce que des personnes se sont fait attraper ? Vous a-t-on dit que le jeu avait planté ?!
DA : En fait, ça m’est arrivé une fois ou deux lorsque je testais le jeu. Maintenant, je connais le jeu comme ma poche, donc je sais ce qui est censé se passer et ce qui n’est pas normal, mais j’ai dû demander de l’aider à plusieurs reprises : « Je ne sais pas si c’est un bug ou si c’est censé arriver. » (rires)
NoE : Alors, jusqu’à quel point le jeu fait-il appel à ce mécanisme de « glitch » ?
DA : Eh bien, le jeu présente ce mécanisme. Il vous indique où et comment l’utiliser. Cependant, pour finir le jeu, vous ne devrez absolument l’utiliser que dans quelques endroits précis. Si vous essayez de vous en servir contre les ennemis, ils ne réagissent pas tous de la même manière. Certains joueurs ont tendance à essayer sur tous les types d’ennemis, juste pour voir ce qui se passe.
D’autres jouent normalement et ne font appel au disrupteur d’adresses que dans les rares lieux où c’est indispensable. J’encourage les nouveaux joueurs à essayer sur tout ce qu’ils trouvent et à voir ce qu’il se passe parce qu’ils découvriront des énigmes intéressantes ou des solutions à des énigmes quand ils ne s’y attendent pas.
NoE : Alors, avec le disrupteur d’adresses, vous pouvez changer le comportement d’un ennemi ?
DA : Oui, c’est ça. Tout dépend de l’ennemi. Certains deviennent serviables si vous les « glitchez », alors que d’autres sont bien plus violents et bien plus dangereux.
NoE : C’est comme s’ils vous disaient : « Ne me ‘glitchez’ pas ! »
DA : Oui ! (rires) D’autres ennemis ont des réactions bizarres. C’est intéressant de faire des tests. Certains vous sont même très utiles. C’est super de « glitcher » quelque chose et d’avoir une réaction en retour. Je ne rentre pas dans le détail parce que je ne veux pas vous gâcher le plaisir. Mais en continuant sur votre lancée, vous vous rendez compte que la solution à une énigme était à un endroit précis ou qu’un objet était caché à un autre.
NoE : Avez-vous un « glitch » préféré dans Axiom Verge ? Vous pouvez rester vague. Nous ne voulons pas vous en faire dire trop…
DA : (rires) Voyons voir. Il y a bien ces créatures qui bougent sans arrêt. Elles font vraiment peur ! La première fois que vous les voyez, vous vous dites : « Mais, qu’est-ce qu’il vient de m’arriver ?! » Si vous les « glitchez », elles vous sauteront dessus, mais elles laisseront aussi une traînée que vous pourrez escalader. Si vous les « glitchez » intentionnellement et placez une feinte pour qu’elles vous pourchassent, elles laisseront une traînée que vous pourrez escalader ou emprunter et qui vous mènera à des lieux inaccessibles en temps normal.
NoE : C’est vraiment très malin !
DA : Heureusement, c’est assez vague pour que les gens ne sachent pas vraiment où s’en servir.
NoE : Mais l’idée de départ est : « Glitchez tout ».
DA : Oui. Essayez toujours et encore.
NoE : Compris ! Maintenant, nous aimerions discuter de la façon dont Tom envisageait le développement du jeu. Au début de notre discussion, vous avez dit qu’il avait grosso modo développé le jeu tout seul.
DA : Oui, c’est ça. Il m’a présenté la chose de la manière suivante : il travaillait à plein temps comme développeur pour un studio. Le développement d’Axiom Verge lui a pris 5 ans. Il y consacrait ses soirs et ses week-ends parce qu’il avait son travail en journée.
NoE : C’est incroyable ! C’est la passion qui l’a poussé à faire ce projet ?
DA : Oui, et une grande obstination. De par sa formation, Tom était spécialisé dans l’animation et la programmation. Il maitrisait donc ces deux domaines. Dans son emploi principal, il était avant tout programmeur, alors pour développer son côté créatif, il passa la première année à réaliser des graphismes pour le jeu. C’est ainsi qu’il créa les mosaïques et les ennemis, avant de les animer. Ensuite, il commença à assembler la carte du monde.
Avant même d’écrire la moindre ligne de code, il avait réalisé tous les graphismes, ainsi que l’ensemble des ressources et avait conçu toutes ces créatures. Il a procédé ainsi parce que… eh bien, pour commencer, je crois qu’il a vraiment aimé faire les graphismes.
NoE : « Ce qui est fait n’est plus à faire. »
DA : Oui, tout à fait. L’autre raison, c’est qu’en codant, il lui serait sûrement arrivé de se dire : « Il me faut une créature là. » Il aurait dû s’interrompre, dessiner cette créature, l’animer avant de revenir au codage. Il aurait perdu le rythme.
NoE : C’est un peu comme quand vous jouez. Si vous perdez le fil, vous pouvez tout simplement vous perdre.
DA : Oui, si vous arrêtez de jouer à un jeu pendant un mois et que vous le reprenez, vous vous dites : « J’allais où ? Je faisais quoi ? » C’est un peu pareil dans ce cas. Certaines personnes sont capables de créer des jeux en étant très organisées. Tom a commencé par les graphismes avant de poursuivre par la programmation, afin d’éviter des aller-retour incessants.
NoE : Est-ce que Tom a composé toutes les musiques du jeu ?
DA : Oui, il a fait toutes les compositions lui-même.
NoE : Il est musicien à la base ?
DA : Non, c’est le seul domaine dans lequel il n’avait aucune formation académique. Il aime simplement composer de la musique. C’est quelqu’un de très créatif.
NoE : On dirait bien que Tom avait dès le départ une idée bien précise du résultat qu’il voulait obtenir. Par exemple, l’affichage tête haute(3) du jeu est très minimaliste, à l’instar de Metroid et d’autres jeux classiques. Cette esthétique est-elle une idée maîtresse de la conception du design pour ce jeu ?
DA : Oui, je pense qu’une des grandes idées de Tom en termes de développement consiste à ne pas bombarder le joueur d’informations. Par exemple, au début d’Axiom Verge, vous vous retrouvez au milieu d’une pièce. Vous pouvez aller à droite ou à gauche. C’est directement inspiré de Metroid. Si vous allez à droite, vous êtes bloqué. Vous n’avez donc pas d’autre choix que d’aller à gauche. Ce n’est pas un didacticiel qui vous indique la direction à prendre ou le bouton sur lequel appuyer pour sauter. Vous vous retrouvez à un endroit précis où vous devez sauter et vous essayez tous les boutons pour y parvenir.
Je sais qu’il a fait son maximum pour que le joueur découvre les commandes sans didacticiel ou sans texte superflu. Il y a juste un ou deux endroits où cela n’a pas été évident. Lorsque nous avons présenté le jeu à PAX East(4), nous avons regardé les gens jouer. Dans le jeu, il y a un bouton, le bouton L, que vous pouvez maintenir enfoncé pour vous immobiliser et viser où vous voulez. Dans différents salons, plusieurs personnes ne comprenaient pas le mécanisme. Ils ne parvenaient pas à trouver tout seul. C’est une des rares fois où Tom a dû ajouter une ligne pour expliquer le fonctionnement.
3. Affichage tête haute : dans le jeu vidéo, l’affichage tête haute est une partie de l’écran relayant certaines informations vitales telles que la jauge de santé du joueur.
4. PAX East : salon professionnel de l’informatique et du jeu vidéo se déroulant tous les ans à Boston.
NoE : Pour obtenir l’équilibre parfait, à savoir un jeu difficile tout en étant convivial et juste envers les joueurs, ces salons ont dû être primordiaux pour obtenir des retours intéressants.
DA : Oui, cela nous a vraiment été très utile de nous rendre à des salons comme PAX East et de voir où les joueurs bloquaient ou se posaient des questions. C’était d’ailleurs assez rare, deux passages en particulier dans mon souvenir. J’allais à ces salons. Je regardais les gens jouer, je faisais mon rapport à Tom et il apportait des modifications aux passages où les gens peinaient.
J’ai commencé à travailler avec Tom lorsque le jeu était à 90 % terminé. La fin n’était pas encore intégrée. Tout était presque terminé, mais pas tout à fait. J’ai envoyé des versions du jeu à pas mal d’amis développeurs.
J’ai eu de bons retours de beaucoup d’entre eux, et aussi des conseils très précis qu’un joueur lambda ne ferait pas. Par exemple, dans un passage du jeu, vous devez sauter depuis un rebord. Un développeur nous a recommandé d’intégrer un délai de 5 millisecondes pour qu’il soit tout de même possible de sauter une fois le bord atteint. C’est ce genre de conseils très précis qu’un joueur normal ne ferait pas, du style : « Oh, 5 millisecondes, ça devrait le faire ! » (rires)
NoE : Avez-vous eu du mal à régler le niveau de difficulté ? Y avait-il toujours des gens qui trouvaient le jeu trop difficile ?
DA : Pas tant que ça. Je pense que sur les salons, les gens prennent le jeu pour voir, sans rien savoir. Ils perdent beaucoup et abandonnent trop facilement. À la maison, on s’assoit et on prend son temps. On apprend rapidement.
NoE : Il y a une courbe d’apprentissage, comme pour tous les jeux classiques.
DA : Oui, comme pour tout. Une chose que j’aime vraiment beaucoup à propos de ce jeu, c’est que si vous y jouez tranquillement, il y a normalement un moyen de tuer l’adversaire sans y laisser de plumes ou même de l’éviter tout simplement.
Donc, si vous essayez d’y aller à fond en tirant partout, comme dans Contra(5), vous serez sûrement rapidement éliminés, mais si vous vous dites : « OK, il y a un ennemi droit devant. Je vais monter sur cette plateforme et le descendre depuis là-haut. Il ne pourra pas m’atteindre si je suis en hauteur ! » Si vous remarquez ces petits indices dans le décor, tout devient plus simple. Ce n’est que plus tard dans le jeu que vous devez affronter des créatures en combat rapproché.
5. Contra : jeu de tir « run and gun » pour NES commercialisé en Amérique du Nord en 1988. Une version modifiée baptisée Probotector fut commercialisée en Europe en 1990.
NoE : Mais ces passages sont spécialement conçus pour voir ce dont vous êtes capable, non ?
DA : Oui, tout à fait !
NoE : Ce jeu propose une ribambelle d’armes et d’équipements intéressants. Outre le disrupteur d’adresses dont nous avons déjà parlé, quels sont vos préférés ?
DA : Ah, voyons voir ! Sans trop en dire, il y a une blouse qui vous permet de traverser les murs. Elle devient très utile, surtout quand vous avancez dans le jeu. C’est un power-up très intéressant. Imaginez une amélioration de soins enfermée entre deux murs par exemple. Vous vous demandez : « Comment je vais l’attraper ? » Une fois que vous pouvez vous téléporter entre ces murs, tout devient plus simple.
NoE : Revenez-vous beaucoup en arrière dans des zones que vous avez déjà parcourues ? Si je vois quelque chose qui me paraissait intéressant par exemple, est-ce que je peux revenir plus tard pour mieux chercher ?
DA : Eh bien, quand vous ouvrez la carte du monde, vous pouvez placer des repères dessus. Donc, si vous remarquez quelque chose d’intéressant dans une région, vous pouvez l’indiquer sur la carte et revenir plus tard. Il y a quelque chose de très agréable à revenir dans la première zone du jeu après avoir récupéré des power-ups et plein d’équipement ou de matériel. Vous revoyez tous ces ennemis qui vous faisaient très peur au début, mais vous êtes tellement plus fort que vous n’en faites qu’une bouchée. C’est toujours agréable comme sensation.
NoE : C’est sûr ! Donc, vous pouvez traverser des murs et « glitcher » le monde qui vous entoure. Y a-t-il d’autres façons de modifier le cours du jeu ?
DA : Eh bien, il existe un outil de Mot de passe dans le jeu. On peut y entrer de vieux codes idiots et amusants. L’un d’eux est inspiré de Metroid. Si vous entrez JUSTIN-BAILEY dans l’outil Mot de passe, Trace enfilera un justaucorps rose. Je le trouve très drôle. Il y a des indices cachés dans le jeu, et si vous en trouvez un, vous pouvez l’entrer à l’endroit voulu et vous obtiendrez une récompense.
Je trouve ça très intéressant. Si vous jouez le début et si vous continuez à avancer jusqu’au boss final que vous battez, vous risquez de louper près de la moitié du jeu selon moi. Le truc, c’est qu’aucune de ces énigmes ne vous saute aux yeux ou est indiquée par un grand panneau du genre : « Énigme à résoudre ici ! » En fait, vous remarquez quelque chose de bizarre ou vous trouvez une information intéressante et vous vous dites : « Je me demande s’il se passera quelque chose si je tape ça ici. »
NoE : Axiom Verge propose un mode Speedrun (Sprint) dédié. Est-ce que l’outil de Mot de passe sert à quelque chose ?
DA : L’outil de Mot de passe ne servira sûrement pas aux speedrunners(6) parce qu’ils sont incroyablement doués. J’ai bien essayé de faire comme eux, mais je ne suis pas à la hauteur. Les améliorations de santé ou de puissance ne les intéressent pas plus que ça parce qu’ils font uniquement appel à leur dextérité pour avancer. Personnellement, il me faut beaucoup de santé pour arriver à la fin du jeu, mais ces types n’ont pas besoin de chercher les cachettes et de récupérer des power-ups ou des trucs dans ce genre. Ils n’en ont pas besoin sauf s’ils font un run à 100 %, c’est-à-dire qu’ils se donnent pour objectif de tout récupérer.
6. Speedrun : les joueurs se donnent pour objectif de terminer le jeu le plus vite possible.
NoE : Ces joueurs ont pour habitude de finir les jeux d’arcade avec une seule vie. Avez-vous vu des speedrunners faire des choses qui vous ont vraiment surpris ?
DA : Oui, quelques-uns. Je me souviens d’un joueur qui faisait un speedrun pour une organisation de bienfaisance, et Tom et moi commentions sa partie au fur et à mesure. En gros, il avait fait l’impasse sur toute une portion du jeu normalement indispensable parce qu’il avait réussi à accéder à une zone à laquelle il n’était pas censé pouvoir accéder. À plusieurs reprises, j’ai demandé à Tom : « Tu savais qu’on pouvait faire ça ? » Parfois, il me répondait : « Oui, j’ai conçu ça de cette manière pour voir si les gens comprendraient. » D’autre fois, il me disait : « Non, je ne pensais pas qu’on pouvait faire ça. »
NoE : Ils ont utilisé ses systèmes contre lui !
DA : (rires) Exactement. J’ai essayé de les imiter, mais je suis loin d’être aussi doué. Je connais mes limites.
NoE : On ne peut donc pas vous demander de nous donner des trucs pour un speedrun alors ?
DA : Je peux vous dire comment ils font. Je ne peux pas vous en faire la démonstration. (rires)
La première fois que vous jouez, jouez normalement et terminez l’histoire. Le mode Speedrun propose deux grandes options. L’une d’elles supprime tous les éléments du scénario, les scènes cinématiques(7) et tous les dialogues, parce que les speedrunners veulent simplement faire du speedrun. Ils arrivent à une scène cinématique et on les voit trépigner d’impatience, donc cette option les supprime aussi. Il y a aussi un chronomètre en haut à gauche de l’écran pour voir votre temps, puis, à chaque boss, il enregistre votre temps.
C’est un jeu très axé sur le speedrun, même lorsque vous y jouez normalement, sans essayer de sortir de la séquence normale du jeu. Il y a un certain ordre dans lequel obtenir les objets. « OK, après avoir récupéré ce power-up, je dois récupérer ce power-up. » Plus vous jouez, plus vous prenez ce réflexe.
7. Scène cinématique : séquence non interactive d’un jeu vidéo au cours de laquelle il est possible de raconter une histoire.
NoE : On dirait qu’il y a beaucoup de secrets cachés dans les coins et les recoins.
DA : Si vous jouez tête baissée jusqu’au dernier boss, vous vous direz que c’était une très bonne expérience de jeu, presque linéaire. Vous avez joué. Vous avez trouvé les différents lieux où vous rendre. Vous y êtes allés et vous avez battu le boss. Mais, d’après moi, quand vous commencez à voir ces énigmes – beaucoup d’entre elles sont surprenantes et imprévisibles – une impression très spéciale se dégage : « Waouh ! J’ai trouvé quelque chose que la plupart des gens ne trouvent pas. »
NoE : Vous avez parlé de JUSTIN-BAILEY l’Easter Egg de Metroid. Y a-t-il des Easter Eggs tirés d’autres séries ou d’autres références ?
DA : Il y a une région du jeu, Kur, qui s’inspire beaucoup de Rygar et de Blaster Master. Tom a écrit un post sur son site Internet à propos de la version Wii U. Il a mis des captures d’écran de Blaster Master et d’autres d’Axiom Verge. Vous voyez clairement les inspirations.
NoE : Axiom Verge tire-t-il parti des fonctions uniques de la Wii U ?
DA : Oui, il y a quelques fonctions très importantes. Celle que je préfère est la carte qui s’affiche en permanence sur le Wii U GamePad. Je me souviens que la première fois que j’ai joué à Axiom Verge, je n’arrêtais pas d’interrompre la partie pour vérifier où je devais aller ensuite. Une bonne partie des jeux actuels de ce type affiche une flèche indiquant : « Allez par là, puis par là, » et vous prend par la main. Ce n’est pas le cas de ce jeu. Vous devez trouver votre destination en regardant la carte et en vous demandant : « Qu’est-ce que je n’ai pas encore exploré ? Essayons d’aller par là. » Je m’arrêtais sans cesse pour regarder. Afficher la carte en permanence aide beaucoup le joueur. Bien sûr, l’autre fonction est le jeu sans téléviseur, très pratique pour ceux qui doivent partager la télévision avec le reste de la famille. Ils pourront quand même jouer.
NoE : Fermez les yeux et imaginez-vous prisonnier d’un monde extraterrestre hostile. Si vous pouviez mettre la main sur une des armes ou un des équipements d’Axiom Verge, lequel aimeriez-vous trouver en premier ?
DA : Dans un vrai monde extraterrestre ? Je ne sais pas trop, mais je peux vous dire que mon arme préférée dans Axiom Verge est le lance-flammes. Il est trop cool. Pour ce qui est équipements, j’aimerais bien mettre la main sur le disrupteur d’adresses. J’adorerais « glitcher » dans un monde extraterrestre, traverser les murs, etc.
NoE : D’accord, mais c’est un peu de la triche quand même ! Autre chose ?
DA : Voyons voir. Il y a quelque chose dont nous n’avons pas parlé, mais vous pouvez aussi obtenir un drone dans le jeu. Il sert un peu d’éclaireur et vous précède, règle leur compte aux ennemis et encaisse les coups à votre place. J’aimerais bien un drone. Un drone serait bien utile.
NoE : Nous avons entendu dire que vous travailliez sur d’autres jeux en ce moment. Est-ce que vous pourriez nous en dire un peu plus sur ces projets ?
DA : Bien sûr ! Outre Axiom Verge, je travaille sur deux autres jeux en ce moment. L’un d’eux s’appelle Chasm, et c’est aussi un jeu d’action-aventure rétro en pixel art et en 2D. Je le présente souvent de cette manière. Si Axiom Verge se rapproche de Metroid, Chasm se rapproche de Castlevania. Ce sont deux styles bien différents. Nous espérons que Chasm sortira bientôt. Nous en sommes au point où il est jouable de bout en bout, et nous adorerions le voir sur des plateformes Nintendo. Maintenant qu’on peut y jouer du début à la fin, nous allons ajouter notre sauce secrète et peaufiner l’ensemble pour passer d’un bon jeu à un excellent jeu.
L’autre jeu sur lequel je travaille s’appelle Mages of Mystralia. C’est un jeu très différent de Chasm ou d’Axiom Verge. Il s’agit d’un jeu d’action-aventure en 3D dans lequel vous incarnez une jeune fille appelée Zia qui comprend un jour qu’elle a des pouvoirs magiques. Dans l’univers du jeu, la magie existe, mais elle est très rare et sa pratique est interdite. Alors Zia se cache et apprend la magie toute seule. Le mécanisme principal consiste à découvrir des runes que vous pouvez combiner de plusieurs manières différentes pour concevoir vos propres sorts. Sur l’ensemble du jeu, vous pouvez potentiellement parvenir à des millions de sorts différents et créer quelque chose qui vous est propre.
NoE : Waouh ! Je ne veux même pas penser à l’aspect mathématique de la chose.
DA : Oui, et il va falloir faire beaucoup de test, mais nous ne pourrons clairement pas tester toutes les combinaisons. Il y en a des millions. Dans les différents salons où on l’a présenté, on a vu des joueurs créer des choses auxquelles on ne s’attendait pas et aborder le jeu d’une manière totalement différente de ce qu’on avait prévu. C’est formidable.
NoE : Cela doit être très gratifiant de voir des gens utiliser les outils que vous leur donnez d’une façon tout à fait unique et créative. Donc, si l’on regarde les jeux sur lesquels vous travaillez, on remarque une certaine tendance. Vous aimez les jeux très compliqués !
DA : (rires) Oui, je suis surtout attiré par un bon gameplay qui tient la route. Pour moi, c’est le plus important. Quand un jeu vous paraît bien, vous vous dites que vous pourriez jouer à ce jeu sans arrêt. C’est le genre de jeux sur lesquels j’aime travailler.
NoE : Pensez-vous sortir Mages of Mystralia sur des consoles Nintendo ?
DA : On adorerait !
NoE : Fantastique ! Aimeriez-vous ajouter quelque chose ? Un message pour vos fans ?
DA : J’aimerais remercier tout le monde pour leur patience parce que je sais que de nombreux fans de Nintendo voulaient voir Axiom Verge sur Wii U. J’ai l’impression que la Wii U est la console pour laquelle Axiom Verge était vraiment conçu et nous sommes vraiment heureux de savoir qu’il va être disponible dessus.
NoE : Merci de nous avoir consacré un peu de temps !
Axiom Verge est déjà disponible au téléchargement sur le Nintendo eShop pour Wii U.